Doit-on s’inquiéter du pic pétrolier?

Le pétrole, le sang de la société industrielle, n’est pas aussi abondant que nous le croyons. Pire encore, il le simple maintien de la production actuelle au-delà de 2010 est aujourd’hui mis en doute.

L’émission Une heure sur Terre, de Radio-Canada, portait sur l’énergie le 30 janvier dernier. Après le visionnement du premier reportage, l’animateur Jean-François Lépine a souligné qu’«[…] on a l’impression que le ”peak” pétrolier n’est pas pour demain […]» et qu’on découvre constamment de nouvelles sources de pétrole. André Caillé, invité à l’émission a ajouté que, depuis trente ans, on ne fait que repousser la date du pic pétrolier. Ont-ils raison?

Pic pétrolier : une introduction
Depuis 1859, la production mondiale de pétrole augmente d’environ 2 % par année. En 1949, le géophysicien Marion King Hubbert a annoncé que la production de pétrole des États-Unis connaîtrait un pic vers 1970. À cette époque, la plupart des spécialistes ne l’ont pas pris au sérieux. Ils avaient raison, du moins partiellement : 1970 est l’année où les États-Unis ont produit le plus de pétrole. Depuis, leur production est en déclin, selon l’Association for Study of Peak Oil. Quelle est la situation aujourd’hui?

Des données inquiétantes
L’Agence internationale de l’énergie (AIE) a publié dans son dernier rapport des données alarmantes. L’expert en énergie M. Simmons (2008) résume : «58 % de la production mondiale de pétrole provient d’environ 800 puits géants. Les 42 % qui restent proviennent de 70 000 petits puits.» De plus, la production mondiale repose maintenant sur 356 puits «supergéants» qui, comme les puits géants, ont presque tous passé leur «pic».

Devant ces chiffres, les réserves du rapport de l’AIE en disent long : «[…] les incertitudes sur les sources qui fourniront le pétrole pour répondre à la demande croissante […] sont très élevées» et «l’une des plus grandes incertitudes concerne le rythme auquel la production dans les gisements pétroliers en exploitation diminuerait avec leur maturité». L’économiste en chef de l’AIE, Fatih Birol, indiquait récemment que le monde aurait besoin de six nouvelles «Arabie Saoudite» pour assurer les futurs approvisionnements. Or, si de telles réserves existaient, l’appareillage technologique des géologues l’aurait montré. Selon beaucoup de spécialistes, il semble inévitable que la production de pétrole mondial se dirige prochainement vers un déclin irréversible.

Ce problème a été étudié en 2005 par le département américain de l’énergie. L’auteur du rapport, R. Hirsch, en arrive à la conclusion que «le monde n’a jamais fait face à un problème semblable. […] Le problème sera envahissant et permanent. […] Le pic pétrolier sera abrupt et révolutionnaire.»

À quoi ressemble l’avenir?
«Les technologies vont nous sauver» est sans contredit l’argument qui est le plus souvent avancé. Au moment où les besoins en pétrole seront criants, les solutions miracles qui vont être avancées seront soit trop onéreuses, trop préliminaires, trop longues à mettre en place ou trop superficielles pour être réalistes. Le monde devra s’adapter à une économie qui ralentit, qui rapetisse et qui consomme moins d’énergie.

Dominic Lemoine
Étudiant à la maîtrise en technologie éducative

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