Un refus méprisant

(En réaction à l’article «Des chaises vides» de Dominique Talbot, publié en page 3 de l’édition du 24 février dernier)

J’ai pris connaissance des raisons alléguées par le représentant de l’Institut économique de Montréal (IEDM) pour expliquer le refus de l’organisation de débattre avec Claude Vaillancourt, secrétaire général d’ATTAC-Québec (Association québécoise pour la taxation des transactions financières et pour une action citoyenne) dans un débat organisé par l’AELIES sur l’avenir du système financier mondial. Le débat devait avoir lieu entre Marcel Boyer, vice-président de l’IEDM et Amir Khadir, député de Laurier. Ce dernier a dû annuler sa participation et les responsables du débat ont fait appel à Claude Vaillancourt.

L’IEDM, par la voix d’André Valiquette, dit que Marcel Boyer ne veut pas débattre avec une personne qui n’est pas à la hauteur et qui n’a pas la compétence pour un tel débat. Il précise que Claude Vaillancourt n’est qu’un professeur de cégep et, en plus, écrivain. Comprenons : un économiste néolibéral ne peut s’abaisser à croiser le fer avec un vulgaire citoyen engagé, fut-il secrétaire général d’un des groupes altermondialistes les plus importants, présent dans une cinquantaine de pays et de régions, dont le Québec. Depuis dix ans, ATTAC, un organisme d’éducation populaire et de vulgarisation économique, dénonce les fondamentalistes de l’économie néolibérale, ceux-là mêmes qui nous ont conduit à la crise majeure que nous connaissons et qui, pour plusieurs, se retrouvent à l’IEDM.

Monsieur Boyer ne veut rien savoir des citoyens qui ne seraient pas des économistes patentés. Or, c’est justement parce que les citoyens ne se sont pas occupés à surveiller ces soi-disant experts que ceux-ci nous ont embarqués dans le train fou qui nous a conduit dans un mur. Pour paraphraser Clémenceau, l’économie est une chose trop sérieuse pour la confier aux économistes.

Claude Vaillancourt (et il n’est pas le seul à ATTAC) est régulièrement invité à s’adresser à des auditoires universitaires, que ce soit à l’UQAM, à l’UdM et même à l’extérieur du pays pour parler du sujet qui faisait l’objet du débat refusé par l’IEDM. Il ne manque pas de rappeler qu’ATTAC a été un des rares groupes à annoncer la crise actuelle. La réalité donne, hélas, raison à ATTAC et confirme la faillite totale des thèses défendues par l’IEDM. Alors, si on parle de compétence en matière économique, M. Boyer peut aller se rhabiller. Ajoutons enfin que le mépris de ce dernier n’est pas seulement dirigé contre ATTAC, mais qu’il touche aussi le public de l’Université Laval, qui était tout à fait compétent pour juger par lui-même de la valeur de chacune des deux thèses qui auraient été défendues si M. Boyer ne s’était pas désisté.

Robert Jasmin
Président d’ATTAC-Québec

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