De la plage à la plâge, de on va voir à on va vouère, autant d’accents pour une même langue

Chaque région ou chaque pays a ses expressions, c’est bien connu et même compréhensible, mais pourquoi autant d’accents ? La lettre « A »ne se prononce-t-elle pas de la même façon en Gaspésie et dans la région de Québec ? Ou encore au Québec et en France ? Il semblerait que non et voilà pourquoi.

Par Jimmy Lajoie-Boucher, journaliste collaborateur

 

Chaque population a développé son accent par mimétisme, autrement dit, on se le passe d’une génération à l’autre. Cependant, le plus étrange est en fait que les accents naissent au contact des autres langues. En effet, prenons le sud de la France, par exemple. Du côté de Marseille, le français s’est développé près de l’Italie. On peut ainsi remarquer que les Marseillaises et Marseillais vont prononcer les « r » de façon plus prolongée, comme leurs « n » et leurs « e ».

Et pourquoi Nice n’a-t-elle pas cet accent si distinctif de la Côte D’Azur ? La réponse se trouve à Paris. Durant le temps de la monarchie française, tous les pouvoirs se trouvaient dans la capitale. Plus elle prend de l’importance, plus son français devient la référence et c’est cet accent que l’on entend partout. Il est question du français normatif que l’on entend à la télé ou à la radio bien sûr, non pas de l’accent pédant que certains peuvent se donner. Donc pour en revenir à Nice et Marseille, cette dernière se trouve être une ville portuaire, alors que la première est plus une ville de nature estivale où se développe l’industrie touristique. C’est pourquoi Nice devient donc une ville davantage tournée vers le nord que sa voisine qui elle, se tourne plus vers le sud.

Le même phénomène peut se remarquer en Alsace. On parle même du français d’Alsace. On peut remarquer une prononciation plus marquée de la première syllabe des mots alors que l’habitude est plutôt d’accentuer la dernière. Certaines voyelles sont aussi très fermées, comme si on collait deux d’entre elles ensemble. Les Alsaciens prononcent moins les mots du nez par ailleurs, leur français est plus « craché ». On parle ici du substrat alsacien, langue influencée par l’ancien Allemand. Toutes ces caractéristiques sont attribuées à la langue allemande par le fait même. L’Alsace est d’ailleurs une région qui borde l’Allemagne et qui, de 1870 à 1919, est annexée par cette dernière.

Qu’en est-il de l’accent québécois ?
En fait, il faut remonter à 1534, alors que Jacques Cartier arrive au Québec, comme vous l’aurez deviné. De cette époque jusqu’à la bataille des plaines d’Abraham, le français du Québec est le même que celui de Paris, car tous les colons viennent de France. On ne prononce pas toutes les syllabes, comme le vieux français, à noter aussi qu’avant 1740, le français n’avait pas d’accent. Les « é, è, ê » s’écrivaient « es ». C’est l’Académie de la langue française qui les introduit cette année-là dans la troisième édition du dictionnaire de l’Académie.

Après la conquête des Britanniques, le lien avec la France s’est arrêté. Et contrairement à ce que l’on peut penser, ce n’est pas les Québécois qui ont changé leur façon de parler, mais bien les Français. Ils se sont mis à prononcer de façon pointue toutes les syllabes. Cependant, en raison de la colonisation britannique, le français de France et celui du Québec se sont développés de manière parallèle.

Et les régions du Québec…
Pour les régions en fait, la théorie la plus admise remonte à la colonisation française. Pour combler certaines régions, on prenait des Français qui partaient souvent de la même région. Ainsi, ces colons s’installaient ensemble dans diverses régions québécoises. Maintenant, dû à l’éloignement de chacune d’entre-elles, et les connexions plus difficiles les unes aux autres, chaque région a développé son accent. Quelques données nous sont accessibles grâce à une étude de l’Université de Montréal. Nous pouvons y voir, entre autres, que de 1608 à 1679, les colons venaient surtout de Normandie, de Paris et de la Loire.

Par la suite, très tôt dans le processus de colonisation, deux pôles prendront forme : les régions qui dépendaient de Montréal et celles qui dépendaient de Québec. L’est et l’ouest, dont la région du Saguenay, entre autres, qui se développeront, et par le fait même, auront leur dialecte. Voilà pour la petite histoire des accents !

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