Des poulets et des nerds *

Je rappelais à la blague, mercredi, en attendant le début de l’AG de la CADEUL, que l’association étudiante offrait, il y a quelques années, des ailes de poulet à qui daignait se déplacer. Après tout, c’est bien connu, les amateurs de poulet ont toujours supplanté les démocrates. C’est d’ailleurs une des grandes leçons de l’Histoire.

Blague à part, aller dans des assemblées générales me mène à considérer que certaines institutions sont maintenant gouvernées par des nerds. Pas nerd dans un sens péjoratif mais plutôt dans le sens que donnait à ce mot le génial auteur Douglas Adams lorsqu’il disait «un nerd est une personne qui utilise le téléphone pour parler à d’autres personnes à propos des téléphones.» Les nerds politiques, quant à eux, s’intéressent à la politique en elle-même, débattent démocratiquement de ce qui est démocratique et raffolent des AG, des votes et des questions préalables. Ils aiment parler de révolutions, peu importe qu’elles soient tranquilles, françaises, prolétariennes, industrielles ou américaines.

Quant aux autres, ils viennent pour les ailes de poulet, qui peuvent prendre plusieurs formes. Pour certains, le poulet, c’est de diminuer leur facture d’université. Pour d’autres, c’est un projet à l’échelle de leur association facultaire ou pour tout le monde. Chacun a son poulet politique, sa raison de se déplacer et de militer. Chacun a quelque chose à demander, à proposer pour son mieux-être et/ou celui de la société. Duplessis offrait des réfigérateurs et des lignes électriques, Charest a promis de se concentrer sur la santé. Labeaume a promis un stade, Obama du changement, Parizeau un référendum, la CADEUL un Laissez-passer universel, Harper un ménage. Ce n’est pas nécessairement du populisme et ce n’est pas automatiquement une mauvaise chose.

C’est le propre des nerds politiques que de se demander comment intéresser les citoyens à la politique. On cherche à trouver le projet porteur qui rallumera la torche de la révolution, qui ramènera tout le monde aux urnes et dans les AG. Mais, dans le fond, y a-t-il moins de poulet à offrir, pour les institutions politiques? En fait, ça dépend. Si tout cela n’était qu’une question de poulet, la question serait vite réglée. Personne ne s’entend sur la réponse à la question fondamentale: qu’attendez-vous d’un gouvernement, à quelque niveau que ce soit?

La bonne nouvelle, c’est qu’on dirait que la démocratie nous a donné le luxe de s’en foutre et d’aller chercher notre poulet ailleurs.

( * En écrivant ce titre m’est venu en tête que cela pourrait aussi désigner une recette audacieuse et avantgardiste de poulet sucré aux bonbons sûrs. Envoyez-moi vos suggestions pour celle-ci à redaction@impact.ulaval.ca et nous pourrions peut-être l’essayer…)

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