Si vous suivez un peu la scène politique provinciale, je sais que vous avez attendu avec incertitude le dévoilement de la Coalition pour l’avenir du Québec d’hier...

Quand les attentes sont hautes

Si vous suivez un peu la scène politique provinciale, je sais que vous avez attendu avec incertitude le dévoilement de la Coalition pour l’avenir du Québec d’hier (sinon, allez à la page X pour savoir de quoi il en retourne). On pense ce que l’on veut de François Legault et des multiples tentatives de réinvention de la roue de «centre-droit» au Québec.

Cependant, l’incertitude a laissé sa place, dès la sortie officielle du document, à une certaine amertume. C’est que, voyez-vous, on aurait presque pu être très «2011» et remplacer le document par un simple tweet de 140 caractères : «Ayons du courage. Ça presse. Soyons nationalistes. L’éducation est importante: montons les salaires des profs. Rationalisons.»

Ce lancement fait partie, en quelque sorte, de cette tendance qu’ont les «anciens» ou les «futurs» de la politique québécoise de faire paraître des «documents de réflexion», des manifestes ou autres supposés pavés dans la mare. Faisons le compte.

Lucien Bouchard, Joseph Facal et autres lancent le manifeste pour un Québec lucide (2005). Ils se refusent par la suite à d’autres déclarations sur le sujet et le tout tombe dans les limbes. Même si le manifeste en tant que tel n’est plus beaucoup cité, ses idées semblent avoir percolé dans certaines mesures du dernier budget Bachand. Cependant, ils donnent naissance à une floppée de parodies, pastiches et contre-attaques comme le manifeste pour un Québec morbide.

Toutefois, la plus célèbre de ces répliques est venue de Françoise David et Amir Khadir, avec leur manifeste pour un Québec solidaire (2005), ce qui devient, oh! surprise, le nom de leur parti né moins d’un an plus tard.

Éric Caire et Marc Picard lancent en 2010 «Le Québec noir sur blanc», qui reprend des positions qu’ils revendiquent «de centre-droit».

Entretemps, le PQ renomme en 2008 son argumentaire en «manifeste pour la souveraineté», on lance le manifeste pour un Québec durable (2007), et le manifeste pour un Québec pluraliste (et sa réplique, pour un Québec laïque et pluraliste, tous deux en 2010), qui ne font pas tant de vagues, un peu comme le manifeste pour un Québec numérique (2010) et le manifeste pour un Québec fier (2009).

Et ça, c’est sans parler des «pactes», qui se multiplient. Tout le monde clame haut et fort qu’il se sacrifie pour améliorer le débat public et prendre le haut du pavé intellectuel.

À croire que l’avenir florissant de l’économie du Québec passe par la fortune des imprimeurs et des concepteurs de sites Web dédiés à des manifestes. Autre secteur dont je prédis une forte croissance : la section des lettres ouvertes dans les journaux. Tout ce débat d’idées ne va pas se faire tout seul!

Certes, la Coalition propose un groupe de réflexion avec, à la clé, des idées concrètes pour le Québec. Cependant, elle le fait à un moment où tout le monde attendait un nouveau parti, un manifeste, un coup d’éclat quelconque.

Pour poursuivre dans les citations littéraires, comme la semaine dernière, je vous propose au sujet de la CAQ un titre de Shakespeare : «Beaucoup de bruit pour rien». Pour l’instant, du moins. Ou bien Edmond Rostand, qui faisait dire à Cyrano de Bergerac «C’est un peu court, jeune homme! On pouvait dire… Oh! Dieu!… bien des choses en somme.»

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