La parabole de place d’Youville

Le maire Labeaume ne fait pas l’unanimité. En fait, il déchaîne plutôt les passions. Je connais des gens qui l’adorent sans conditions et d’autres qui le détestent tout autant. Cependant, sa formation en sociologie transparaît généralement dans ses décisions. C’est le cas ici, dans le nouveau programme de développement de l’art public  de la ville de Québec.

La ville investira 1 million $ par an afin de s’assurer que 1% de tout les investissements en immobilisation servira à mettre en place une oeuvre d’art public.

Lorsque de telles décisions sont prises, les critiques fusent de toute part. En général, elles critiquent l’investissement en art comme étant inutile, en particulier durant une période d’austérité économique. Rappelons toutefois que

Il y a quelques années, Lemonde.fr réalisait un charmant vidéo expliquant succinctement l’importance de l’investissement public en art.

Dans ce vidéo, l’importance de l’investissement en art est expliqué par trois principes économiques; l’utilité marginale décroissante, les externalités positives et l’effet multiplicateur.

Dans le vidéo, l’art et la culture est considéré comme une marchandise tout à fait différente des autres. En effet, alors que pour l’ensemble des biens normaux l’utilité marginale est décroissante. Cela signifie que plus l’on achète d’un bien, plus le bien-être qui découle de son achat diminue dans le temps. Posséder un ordinateur, par exemple, offre beaucoup d’utilité. Posséder deux ordinateurs augmente également le bien-être, mais un peu moins. Si l’on achète 100 ordinateurs, l’achat du 100e offrira bien peu de bien-être.

L’art et la culture est toutefois une exception à cette règle. En effet, l’utilité marginale de la culture semble être croissante à la marge. Ainsi, le bonheur ressentit par l’écoute d’une symphonie augmente avec le temps. C’est pourquoi l’art est aussi importante pour une société.

Le second principe est le concept d’externalité positive. l’on parle souvent d’externalités négatives, la pollution par exemple, mais l’on parle moins souvent des externalités positives. Dans le vidéo, l’image de marque de la France est considérée comme une externalité positive. En effet, le travail artistique de tous les artistes français depuis les constructeurs des cathédrales jusqu’à Johnny en passant par Renoir et Saint-Saëns, définit ce qu’est un français et ce qu’est la culture française.

Ainsi, l’intervention du gouvernement du Québec dans la fondation du cirque du soleil a eu un grand effet sur l’image de la culture québécoise et s’est révélé excessivement rentable comme investissement. En fait, tous les produits culturels participent à la création d’une image et d’une certaine idée de notre identité culturelle.
Le troisième concept est l’effet multiplicateur. L’effet consiste en la multiplication que subit tout dollar investit dans quelque chose. Le Capitole de Québec, par exemple a ce genre d’effet. une personne désirant se rendre au théâtre une soirée ira probablement au restaurant avant, paiera pour se stationner et ira peut-être prendre un verre après. Ainsi, l’existence du Capitole et la présence d’un espace public raisonnablement agréable (Place d’youville et la rue Saint-Jean) a engendré d’autres dépenses de la part de l’individu qui aurait tout bonnement pu rester chez lui ce soir-là.

Le Conference Board du Canada, dans une étude de 2008   qui mériterait d’être actualisée, a analysé la situation de la culture et des retombées qu’elle engendrait au niveau du Canada. En retombées directes, l’industrie culturelle entraîne des retombées de 46 milliards $, soit 3,8% duPIB canadien. Avec l’effet multiplicateur, ce chiffre grimpe à 84,6 millards $ et 1,1 millions d’emplois en sont tributaires.

Tous ces effets sont très difficiles à calculer et à contrôler pour une entreprise privée, d’où l’importance de l’intérêt et de l’investissement public en art et en culture. Pour cette fois-là donc, chapeau M. Labeaume.

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