Sur la juste place des femmes en politique, viser la «parité» semble maintenant rendu «la chose nor­male» pour les partis politiques, du moins en paroles.

La parité, oui mais à quel prix ?

Dans les lunettes de Rosalie Readman

Sur la juste place des femmes en politique, viser la «parité» semble maintenant rendu «la chose nor­male» pour les partis politiques, du moins en paroles. On a pu le voir dans le contexte des dernières élections qué­bécoises. Au début ceux-ci disaient vouloir se rappro­cher le plus possible du 50% dans les candidatures pré­sentées, puis ils se sont félicités du nombre record de femmes élues (32,8%) et ont finalement commencé à dé­battre du nombre de femmes idéal à l’intérieur du conseil des ministres…

En général, je suis d’accord et milite même pour l’atteinte de l’objectif, mais je dois dire que cette semaine, Rona Ambrose m’a fait douter. Pour ceux qui ne le savaient pas encore, notre «charmante» ministre conservatrice de la condition féminine à voté mercredi dernier en faveur d’une motion visant à rouvrir le débat sur le droit de l’avorte­ment des femmes au Canada. Non, nous ne retournerons pas dans les années 60, la motion a fort heureusement été battue. Cependant, après avoir assisté à cet épisode assez troublant de la politique canadienne, une réf lexion s’impose : vouloir à tout prix plus d’éluEs si elles ne repré­sentent pas vraiment une évolution pour les femmes en politique, ou dans la société plus généralement, est-ce vraiment pertinent?

On peut relativiser et se dire que c’était une exception, que c’est le gouvernement conservateur du Canada et qu’au Québec, au moins, ça ne serait jamais arrivé. En effet, mais sommes-nous vraiment en si meilleure position ? Premier exemple; le gouvernement libéral de Jean Charest en 2007 a été le premier gouvernement de l’histoire à établir une vraie parité au conseil des ministres on doit le souligner. Pourtant, en regardant d’un peu plus proche, on apercevait rapidement que des députées pertinentes étaient reléguées à des postes d’adjointes alors qu’une femme comme Julie Boulet était nommée ministre même si elle n’avait aucunement la com­pétence pour le poste. Pourquoi ? Celle-ci remplissait la vraie condition du parti pour être ministre : ramasser beaucoup d’argent pour le parti, l’objectif libéral de financement étant d’un minimum de 100 000 $ par année pour les ministres.

Deuxième exemple qui avait retenu mon attention dans la dernière année, notre ancienne ministre de la condition féminine québécoise, Christine St-Pierre et sa vision de la beauté féminine :

«Moi, si je vois une femme qui n’est pas maquillée, ça me dérange. Des fois, je vais même me passer la réflexion: vrai­ment, elle pourrait se mettre un peu de rouge à lèvres. C’est comme s’il manquait quelque chose. Je sais que c’est terrible ce que je dis là, parce que je suis ministre de la Condition féminine.»

Mme Ste-Pierre avait eu le mérite d’être honnête, mais j’étais loin d’être rassurée.

Finalement, dans quel camp est-il mieux de se ranger dans le débat nombre ou qualité de la représentation sur la place des femmes en politique ? Peut-être qu’en effet nous nous sommes trop concentrés sur le nombre et pas assez occupés du reste dans les dernières années. Soyons ambitieux, visons les deux ! Je ne veux pas remettre en question l’atteinte de la parité; pour amener plus de femmes en politique, il est certes nécessaire qu’elles ne se sentent plus en minorité. Tâchons seulement de ne pas oublier que la relève devra se sentir inspirée par les élues déjà présentes pour faire le grand saut.

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