Vous souvenez-vous de la première fois que vous avez exercé votre droit de vote ? J’entretiens peut-être une relation un peu tordue avec la politique, mais, dans mon cas, la défloration de ma vie citoyenne fut un évènement exaltant.

Vous souvenez-vous de la première fois que vous avez exercé votre droit de vote ? J’entretiens peut-être une relation un peu tordue avec la politique, mais, dans mon cas, la défloration de ma vie citoyenne fut un évènement exaltant. 39e élection générale québécoise, 8 novembre 2008, j’étais fin prêt. J’avais épluché les programmes des partis, lu le journal quotidiennement et longuement pensé et repensé à qui j’allais donner mon vote. Avoir le pouvoir de faire un choix en tant qu’individu à part entière, en voilà un moment glorieux dans la vie d’un jeune adulte.

À ce moment, j’avais tout juste 18 ans. J’étais étudiant au Cégep, je venais de me trouver un emploi un peu plus sérieux. Je commençais à m’ouvrir sur le monde et sortir un peu de ma banlieue natale. Une situation typique pour quelqu’un de mon âge. Du jugement, je n’en avais pas une tonne ( et je ne baigne toujours pas dedans ), mais je sentais néanmoins que j’avais les outils nécessaires pour mettre un petit « X » responsable.

À 16 ans, est-ce que j’aurais fait pareil ? Non. Je ne crois pas. Encore un peu trop jeune, un peu trop désintéressé, un peu trop tête en l’air. Alors quand Pauline Marois remet sur la table l’idée du vote à 16 ans comme le week-end dernier en direct de Londres, je doute que ce soit une bonne idée.

Peut-être que si Jean Charest avait été le quatrième membre de Blink-182, que Pauline Marois avait joué sur le deuxième trio des Canadiens et que Mario Dumont avait fait Jackass, ça aurait été différent. Mais, soyons francs, à 16 ans, le commun des mortels se préoccupe peu de la politique provinciale. C’est bien beau de vouloir donner la parole aux jeunes, de tenter de les intéresser au mouvement citoyen, mais pour voter avec sa tête, il faut en avoir une sur ses épaules.

Je n’insinue pas que tout un chacun doté du sweet sixteen soit incapable de penser, d’analyser et de réfléchir. Toutefois, il faut jouer de prudence quand on jongle avec un droit aussi fondamental que celui de voter. L’âge de raison, existe-t-il vraiment ? Dur à dire, mais force est d’admettre qu’il faut un minimum de bagage personnel pour décider de l’avenir d’une province ou d’un pays.

L’étudiant moyen de 4e secondaire a encore des opinions et valeurs ancrées sur celles de ses parents et le milieu du travail lui est inconnu. Il a des idées et des désirs, mais peut-être pas toute la rationalité pour les mettre en perspective et les faire siens. Il n’a pas non plus encore assez d’autonomie intellectuelle pour analyser et critiquer ce qu’on lui propose. Il y a une sacrée marche entre 16 et 18 ans. Ladite période définit souvent le genre d’adulte que l’on deviendra et ça, il ne faut pas l’oublier.

Ainsi, avant de suivre aveuglément l’exemple de l’Écosse ( qui donnera le droit de vote au prochain référendum aux 16 et 17 ans ), Mme Marois devra y penser à deux fois. Commençons par stimuler les électeurs de 18 ans et plus, ensuite, on verra. Ce serait déjà un bon départ.

Raphaël Lavoie

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