Comment les fruits sans pépin défient la nature

Plusieurs consommateurs préfèrent les fruits sans pépins. Mais ce raisin ou ce melon d’eau dont on  n’a pas besoin de recracher  les pépins pose le dilemme de la poule et de l’œuf. Comment réussit-on à cultiver et à reproduire les variétés de fruits sans graines et, par conséquent, sans embryon?

Plusieurs procédés permettent de produire des variétés de fruits sans pépins. Dans l’agriculture maraîchère des raisins, par exemple, on asperge le fruit d’un traitement au moment de sa formation. La technique pour cultiver un raisin sans pépins est donc plutôt simple: on arrose les cépages avec une hormone – l’acide gibbérellique – qui empêche la formation du bulbe (donc des semences). «Puisqu’il s’agit d’une plante vivace, elle va refaire des bourgeons et, l’année suivante, il y aura des graines», explique Yves Desjardins, professeur au département de phytologie de l’Université Laval. Il s’agit donc d’une intervention qu’il faut recommencer chaque année.

Un autre exemple serait celui du melon d’eau. On peut obtenir une variété sans pépins par des croisements génétiques entre un plant diploïde et un plant tétraploïde. La ploïdie caractérise le nombre d’exemplaires des chromosomes d’une cellule. Donc, le croisement d’une plante dont les chromosomes sont organisés en paires (diploïde) avec celle qui en possède quatre (tétraploïde) provoquera un avortement des graines et résultera en une plante triploïde (dotée de trois exemplaires de chromosomes). Les plantes triploïdes ainsi créées sont stériles. Il faudra recroiser les deux plants mères afin de produire de nouveaux fruits sans graines, précise Yves Desjardins. Notons que ce phénomène est impossible à observer dans la nature.

Une exception s’impose: les oranges sans pépins, elles, peuvent être obtenues de façon naturelle. C’est une mutation spontanée découverte il y a deux cents ans qui est à l’origine d’un fruit sans graines qui a mené les cultivateurs à reproduire le processus en procédant à la greffe d’une tige sur un porte-greffe. «Par multiplication végétative, on préserve l’atout qu’on cherche à obtenir, soit le fruit sans pépins», explique Yves Desjardins. Ces oranges que nous consommons aujourd’hui sont donc des clones de la toute première variété sans pépins apparue spontanément et multipliée, depuis!

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