Graphisme : Pierre Fortier

Vous, cyberdépendant? C’est « lorsque l’utilisation récurrente des nouvelles technologies occasionne des problèmes importants pour l’individu » que cela devient de la cyberdépendance, croit Maxime Verreault, responsable de l’équipe Jeux pathologiques et cyberdépendance au Centre Casa, à St-Augustin. Coup d’oeil sur un phénomène qui demeure flou. 

Malgré l’apparente clarté du sujet, les chercheurs qui s’y intéressent ne s’entendent pas sur ce qu’est réellement la cyberdépendance. Peu d’études ont été répertoriées sur le sujet et aucun consensus n’a été trouvé jusqu’à présent.

Les chercheurs tentent de lister une « différenciation des utilisations », mentionne Sandra Juneau, professeure en travail social à l’Université du Québec à Chicoutimi (UQAC). Cela signifie qu’ils essaient de définir si l’utilisation des technologies et de tout ce qui y est associé est de l’ordre de l’utilisation personnelle ou bien professionnelle.

Selon Maxime Verreault, la cyberdépendance est un terme qui « englobe beaucoup de choses ». Ce nouveau phénomène concerne aussi bien les jeux vidéos, les nouvelles technologies d’information, la pornographie et le gambling. Le fait que ce nouveau concept regroupe une multitude de problèmes individuels ne permet pas de définir efficacement les critères nécessaires afin de savoir si, en tant qu’individus, nous sommes atteints ou non par ce syndrome.

Malgré les dissensions, en règle générale, la cyberdépendance consiste en l’utilisation récurrente des moyens de communication, des technologies numériques et des applications qui y sont associées, offerts par Internet.

Un phénomène en constante évolution

L’apparition des premières technologies associées à Internet en 1995 a engendré la création de ce phénomène. Il est important de comprendre que les critères d’identification de ce trouble ne sont plus valables aujourd’hui.

Au milieu des années 90, si, dès notre réveil, nous nous connections à notre modem Internet, cela était un signe avant-coureur d’une possible cyberdépendance. Aujourd’hui, il en est tout autre. Pour cause : les nombreuses évolutions sociales et technologiques.

Même si le nombre d’heures passées sur Internet peut être considéré comme un indice dans la définition du syndrome, Maxime Verreault précise « qu’il faut aller regarder au-delà des symptômes simples ». Ces derniers correspondent aux premiers signes pouvant être aperçus chez un individu, comme le nombre d’heures passées sur la toile et le sentiment de manque ressenti par une personne envers la technologie.

Il s’agit d’un phénomène complexe qui nécessite une étude attentive en analysant non seulement l’utilisation des technologies de l’individu, mais également l’aspect psychologique de la maladie.

Profil recherché

« C’est souvent un élément déclencheur » dans la vie d’un individu qui entraîne la présence de la cyberdépendance, explique le responsable de l’équipe Jeux pathologiques et cyberdépendance. Il identifie que ce sont davantage des personnes de niveau pré-universitaire qui sont concernées. Le fait qu’elles soient en pleine transition sur le plan scolaire expliquerait cette influence.

Le Centre Casa de St-Augustin, un organisme à but non lucratif pour les adultes aux prises avec des problèmes de jeu excessif, de cyberdépendance, de dépendance à l’alcool, aux drogues ou aux médicaments, a reçu une dizaine de patients atteint de cyberdépendance exclusive jusqu’à présent.

Le Centre apporte alors à chaque individu un plan d’intervention spécifiquement conçu pour ses besoins. Les professionnels présents tentent de faire prendre conscience au patient de la place que prenait cette dépendance dans sa vie et ainsi, ils cherchent à modifier la relation existante entre l’individu et sa dépendance.


 

 La cyberdépendance et les études universitaires

Un constat : les universitaires sont de grands utilisateurs d’Internet et de toutes ses composantes. À l’approche de la fin de la session, la tentation de se laisser distraire est grande. Qu’en est-il de la cyberdépendance au sein des établissements d’enseignement supérieur?

Selon la professeure en travail social Sandra Juneau, « il faut définir avant tout si la cyberdépendance est une nouvelle dépendance ou bien un nouveau phénomène de socialisation ». Cela signifie que nos nouvelles habitudes de consommation, combinées à l’explosion d’Internet dans le quotidien des individus peuvent sembler « normales » au 21e siècle.

Aucune recherche ne montre jusqu’à présent l’impact de la cyberdépendance sur le quotidien des étudiants universitaires, ni sur la réussite des examens de ces derniers. Dans un milieu universitaire où Internet est omniprésent, les avis sur la question divergent.

En avoir conscience

Selon Roxane St-Pierre Rousseau, étudiante en communication publique à l’Université Laval, la cyberdépendance correspond au fait que l’individu soit incapable « de ne pas aller sur Internet, que ça devienne une partie prenante de notre vie et qu’on passe tout notre temps là-dessus. On communique juste avec ça, on ne fait rien d’autre ». Pour sa part, elle mentionne qu’elle est capable « de faire la part des choses dans son utilisation des technologies et d’Internet ».

Quant à la question d’une possible relation de cause à effet de la réussite scolaire avec le phénomène, Roxane St-Pierre Rousseau précise que si Internet devient une obsession, cela implique donc que cela devienne un élément très important au sein du quotidien d’un étudiant. Cela peut faire en sorte que « les travaux scolaires ne sont plus une priorité, car la dépendance prend le dessus sur la vie » de l’étudiant.

D’autres discours se font également entendre sur la cyberdépendance. Audrey Sanikaupoulos, aussi étudiante en communication publique, pense qu’elle concerne des personnes « qui sont totalement accros à leur ordinateur et aux téléphones intelligents, [au point même où] ils ne peuvent pas s’en séparer dans la journée ». Elle-même se considère cyberdépendante puisqu’elle est connectée aux réseaux sociaux constamment afin de rester informée.

Quelques symptômes…

La psychologue Marie-Anne Sergerie a tenté de définir quelques symptômes de la cyberdépendance dans son article Cyberdépendance: la dépendance aux médias sociaux et à la technologie mobile.

  • Avoir des préoccupations à l’égard de son utilisation
  • Ressentir un manque qui s’identifie par un changement de comportement (mauvaise humeur, etc.)
  • Ne pas réussir à réduire son temps d’utilisation et/ou de connexion
  • Ne plus avoir d’intérêt pour des activités hors-ligne
  • Mentir quant à son temps d’utilisation à son entourage
  • Conséquences importantes en raison de la sur-utilisation des technologies (perte d’emploi, etc.)
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