Embryons mi-humains, mi-animaux, et bébés-médicaments

La manipulation d’embryons humains à des fins scientifiques a beaucoup fait jaser ces dernières années. Alors que ce n’était qu’une hypothèse il y a quelque temps, la sélection génétique d’individus est maintenant réalité. «Hourra», clament les scientifiques qui y voient enfin une façon de faire avancer la recherche et de guérir certaines maladies génétiques.

Des cellules de rechange
Le projet de loi accepté par les députés britanniques, permettant la création d’embryons hybrides, devrait entrer en vigueur ce mois-ci. Ces embryons ne serviraient qu’à la recherche médicale et seraient détruits au 14e jour de développement. Les groupes religieux s’opposent à ce projet, mais les chercheurs assurent qu’il faciliterait la recherche et permettrait de faire un pas de géant dans la compréhension de plusieurs mécanismes biologiques.

«Ces expériences visent à développer des cellules souches embryonnaires. Ces cellules peuvent se différencier en n’importe quel type cellulaire. Le but ultime en laboratoire est de fabriquer des cellules de foie ou des neurones, par exemple, pour ensuite les implanter chez des individus malades», explique Frédéric Barabé, professeur au Département de médecine de l’Université Laval. Selon lui, ce projet ne soulève pas de grands débats car il sera interdit d’implanter de tels embryons dans un utérus humain. Il ne croit pas non plus que les scientifiques se transformeront soudainement en Frankenstein comme le craint l’Église catholique. «Ceci permettra de bien comprendre comment reprogrammer des cellules souches et voir si elles vont fonctionner si elles sont replantées», ajoute M. Barabé. Au Canada, la loi est très vague concernant l’utilisation d’embryons à des fins de recherche. Il n’y a pas vraiment de restriction.

Des bébés guérisseurs
Le texte de loi, approuvé par le Premier ministre britannique Gordon Brown, dont le fils cadet âgé de deux ans souffre de mucoviscidose, une maladie génétique, prévoit également l’autorisation de bébés-médicaments. Les cellules de ces bébés, sélectionnés génétiquement pour ne pas être porteurs d’une maladie génétique particulière, sont utilisées pour guérir un membre de la famille.

Cette façon de faire est déjà acceptée ailleurs dans le monde. En Espagne, le premier bébé médicament du pays est né le mois dernier. Les cellules contenues dans le sang du cordon ombilical du nouveau-né, des cellules souches, serviront à guérir son frère atteint d’anémie congénitale, une maladie génétique fréquente chez les Espagnols.

Outre les transfusions mensuelles, le seul traitement possible pour cette maladie consiste en la greffe de cellules souches. En sélectionnant un embryon dépourvu de gènes malades, les parents s’assuraient de mettre au monde un bébé dont les cellules pourraient être greffées chez leur fils aîné et se différencier. «Ce n’est pas une bonne raison pour avoir un enfant mais si les parents en veulent un autre, scientifiquement, ça a du sens. Ils n’ont pas créé un enfant pour le tuer ou lui prendre un organe. De plus, ce bébé aide son frère», soutient Frédéric Barabé.

Plusieurs maladies génétiques peuvent être détectées dès le stade embryonnaire. Au Québec, il existe des banques de sang de cordon dont les cellules pourront être greffées à des individus malades et compatibles. Ces banques sont dirigées par Héma-Québec.

Consulter le magazine