Thèse en bref : L’autre Commission Laurendeau-Dunton

L’héritage intellectuel de la commission royale d’enquête Laurendeau-Dunton sert de prétexte pour repenser la réconciliation entre le Québec et le Canada d’alors. Valérie Lapointe-Gagnon, étudiante chercheuse au doctorat en histoire à l’Université Laval, s’est penchée sur le sujet pour la thèse.

Juillet 1963 : le premier ministre canadien de l’époque, Lester B. Pearson, confie à André Laurendeau ainsi qu’à Davidson Dunton, deux importants intellectuels à l’époque, la tâche de coprésider une commission royale d’enquête sur le bilinguisme et le biculturalisme canadien. Leur ambitieuse mission à l’aube du centenaire de la Confédération canadienne : penser un pays alors que l’anglais est surreprésenté et qu’une partie du Québec, commence à réclamer une identité bien à elle.

Quelque huit années plus tard, après avoir parcouru le Canada d’un océan à l’autre et remis un volumineux rapport final, la Commission Laurendeau-Dunton émet des recommandations qui teinteront les futures politiques. Encore aujourd’hui, ces recommandations trouvent résonnance dans plusieurs débats qui animent les sociétés canadiennes et québécoises.

Voilà pour la version officielle, mais qu’en est-il de la Commission en elle-même? Qui sont les acteurs qui y ont pris part? Qu’est-ce qui s’y est dit et fait qui vaut la peine qu’on s’y attarde? Ce sont ces questions, et bien d’autres, qui ont animé Valérie Lapointe-Gagnon, étudiante au doctorat en histoire à l’Université Laval, dans ses recherches.

Rencontrée fin 2013 par Impact Campus, l’étudiante chercheuse avoue d’emblée que c’est le contexte bien particulier du moment ainsi que l’identité de ceux qui ont pris part à la Commission Laurendeau-Dunton qui l’ont poussée à s’y intéresser. « Je m’intéresse beaucoup à l’histoire du Québec moderne, mais également à celle des intellectuels. Avec la Commission Laurendeau-Dunton, j’ai pu joindre ces deux champs d’intérêt », souligne-t-elle.

Car, selon Mme Lapointe-Gagnon, cette commission a été un moment fort de la vie intellectuelle et académique canadienne. « Elle a permis au domaine des sciences humaines de combler certaines lacunes. En effet, bien qu’il soit alors bien fourni en experts de toutes sortes, ce champ de recherche était encore peu développé. C’est pourquoi la Commission, incapable de s’appuyer sur des données pour travailler, a dû rattraper ce manque en mettant en place un Bureau de la recherche auquel elle a commandé quelque 178 études », affirme-t-elle.

Elle poursuit : « Laurendeau-Dunton, c’est aussi l’occasion pour des figures marquantes et représentatives de la mosaïque culturelle du Canada des années 1960 de participer à une grande entreprise de communication pancanadienne. Ce sont des hommes et une femme, pour la plupart humanistes dans l’âme, qui sont allés expliquer leur mandat partout au Canada. Ce faisant, ils ont suscité débats et discussions citoyennes sur une question très controversée. »

Celle qui vient d’effectuer sa soutenance de thèse et qui se destine au postdoctorat estime avoir réussi dans sa thèse à rendre justice à l’ensemble des commissaires siégeant à la commission. « On s’était beaucoup attardé par le passé au personnage d’André Laurendeau, mais bien moins à ceux des autres commissaires », note-t-elle d’ailleurs au passage.

Au final, Mme Lapointe-Gagnon espère que ses travaux aideront à mieux apprécier l’ensemble de l’héritage de la Commission Laurendeau-Dunton, mais également des commissions royales d’enquête en général. « On l’oublie facilement, mais elles sont quand même au centre de la vie démocratique canadienne », analyse-t-elle.

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