Le Ritalin et les études : jamais sans raisons médicales

Illégal s’il n’est pas prescrit, le Ritalin – ou méthylphénidate – pourrait tenter plusieurs étudiants, mais devant la dépendance qu’il peut créer, les spécialistes de l’École de psychologie de l’Université Laval insistent pour dire qu’il ne devrait être pris qu’en cas de réel besoin.

Le Ritalin, «c’est un stimulant, c’est comme prendre une surdose de café. Ce n’est pas recommandé pour le système cardiaque», déclare la professeure Nancie Rouleau, qui déconseille ce médicament à tous ceux qui ne souffrent pas d’un trouble de déficit de l'attention avec ou sans hyperactivité (TDAH). Celle qui est également directrice de la Clinique Universitaire de TDAH ajoute que le méthylphénidate peut aussi augmenter les risques de souffrir d’insomnie, d’anxiété, de dépression ou d’anorexie.

Nancie Rouleau souligne toutefois que les médecins préfèrent prescrire d’autres médications de méthylphénidate que le Ritalin, étant donné son effet de courte durée. «Son effet ne dure que trois heures alors que des dérivés comme le Concerta peuvent agir jusqu’à douze heures», précise la professeure.

Dépendance et tolérance
Il est bien connu des spécialistes que quiconque consomme du Ritalin ou toute autre médication de méthylphénidate risque de développer une dépendance. «Si les personnes atteintes de TDAH prennent déjà ce risque, ce serait insensé que ceux qui n’en ont pas vraiment besoin en prennent aussi», déclare Martine Simard, professeure en neuropsychologie clinique à l’École de psychologie de l’Université Laval. Cette dépendance est directement liée à la fonction première du médicament, soit de stimuler la production de dopamine, un neurotransmetteur qui tempère l’agitation et qui agit sur le système de la récompense.

Toutefois, ceux qui ne sont pas diagnostiqués avec un TDAH sont potentiellement plus à risque de développer une tolérance à la dopamine, ce qui fait que, pour ressentir le même effet, ces personnes risquent d’avoir à prendre toujours plus de méthylphénidate. «Ces personnes ont déjà un taux de dopamine suffisant et, lorsqu’on hausse la barre, leur organisme s’habitue. Cette barre risque d’avoir à être dépassée pour toujours ressentir les mêmes effets», explique Martine Simard.

Le Ritalin et autres méthylphénidates diffèrent du café ou des boissons énergisantes étant donné qu’ils sont capables d’influencer le caractère d’une personne pendant qu’ils font effet. C’est ce que confirme une étudiante anonyme de l’Université Laval qui a souffert d’un déficit d’attention jusqu’à l’adolescence. «Tous mes amis remarquaient que je parlais moins, que je ne souriais pas et que j’avais la mine basse», a dit l’étudiante. En relatant un épisode au Cégep où on lui avait prescrit du Ritalin pour ses périodes d’examens, elle se décrit comme étant devenue «obsessive au sujet des études et des devoirs. Je sentais qu’il fallait que je les termine le plus vite possible pour me débarrasser d’un stress qui m’accompagnait toute la journée».

Consulter avant tout
Malgré l’inconfort que peut entraîner l’usage du Ritalin, cet épisode au Cégep avait néanmoins permis à l’étudiante, comme à bien d’autres, de faire remonter ses notes. «J’étais en train de couler mon cours de français puis, en prenant du Ritalin, je me suis mise à réussir avec 80%», raconte-t-elle. Par expérience, celle-ci recommande la médication au méthylphénidate à ceux qui en ont réellement besoin, puisqu’elle juge que «ça ne vaut pas la peine de vivre des effets secondaires pour rien».

Aux étudiants qui ont une difficulté chronique à se concentrer, la professeure Nancie Rouleau conseille avant tout de consulter les cliniques du campus avant de songer à prendre du méthylphénidate. «Les étudiants doivent faire une prise en charge au lieu de se gaver de stimulants. C’est beaucoup plus facile de régler ce genre de problème en consultant auprès des bons psychologues et médecins qu’on a sur le campus», conclut-elle.
 

Qu’est-ce que le TDAH?
Le trouble de déficit d’attention avec ou sans hyperactivité est une maladie neurobiologique qui débute à l’enfance et qui se poursuit à l’âge adulte dans 80% des cas. Environ 5% de la population du Québec en souffrirait selon ce que rapporte Nancie Rouleau de la Clinique Universitaire de TDAH.

Trois sous-types de TDAH peuvent être diagnostiqués, soit l'inattention, l'hyperactivité et l'impulsivité. «Les médecins peuvent aussi déterminer une combinaison de ces trois sous-types», souligne Nancie Rouleau.

L’inattention chez les étudiants adolescents et adultes peut se reconnaître par une difficulté à gérer son temps et à arriver à temps aux cours ou au travail. L’impulsivité s’identifie par une difficulté à contrôler sa colère et une tendance à interrompre les gens. Les adultes hyperactifs ont plutôt tendance à trop parler et à dépenser plus d'énergie que les autres pour faire la même quantité de travail. Ces symptômes varient bien sûr d’un individu à l’autre.

Le TDAH est d’abord d’origine héréditaire, puisque «dans la grande majorité des cas, un des parents d’un enfant atteint présente lui aussi des symptômes hyperactifs ou de déficit de l’attention», rapporte Nancie Rouleau. Le TDAH peut aussi être le résultat d’une exposition au tabagisme ou à d’autres substances toxiques durant la vie fœtale.

Consulter le magazine