Merci à une des rares bactéries poussant uniquement sur les roches dans les Alpes suisses, des chercheurs de l’Université du Texas à Austin et de l’Institut Pasteur en France ont été les premiers à identifier comment l’alcool peut affecter des protéines clés du cerveau.

Les effets de l’alcool sur le cerveau étudiés à l’échelle atomique

Merci à une des rares bactéries poussant uniquement sur les roches dans les Alpes suisses, des chercheurs de l’Université du Texas à Austin et de l’Institut Pasteur en France ont été les premiers à identifier comment l’alcool peut affecter des protéines clés du cerveau.

Valérie Désyroy
Chef de pupitre sciences et techno

Courtoisie : Wikimedia, Jon Sullivan, Creative commons
Courtoisie : Wikimedia, Jon Sullivan, Creative commons

C’est une étape importante qui vient d’être atteinte, puisque les résultats de cette étude pourraient éventuellement permettre de synthétiser des médicaments qui annulent l’interaction entre l’alcool et le cerveau. « Maintenant que nous avons identifié cette protéine clé, il est possible de développer un médicament qui pourrait bloquer le site de liaison », explique le professeur Adron Harris, chercheur en biologie et directeur du Centre Waggoner de l’alcool et de la toxicomanie à Austin. Le Pr Harris et son ancienne chercheuse postdoctorale, Dre Rebecca Howard ( maintenant professeure adjointe au Skidmore College ), ont publié dans Nature Communications la structure de la protéine du cerveau. Cette protéine, classée dans la catégorie « canal ionique ligand dépendant », est un facteur clé de la plupart des effets physiologiques et comportementaux primaires de l’alcool.

Grâce à un homologue bactérien

Le Pr Harris explique que depuis peu, on se doute que ces canaux ioniques sont des sites de liaison importants pour l’alcool. Cependant, les chercheurs ne pouvaient pas le prouver, car ils n’arrivaient pas à cristalliser la protéine du cerveau et donc étaient incapables de recourir à la cristallographie aux rayons X pour déterminer la structure de cette protéine, liée ou non à une molécule d’éthanol. La percée est venue lorsque le groupe de recherche du Dr Marc Delarue à l’Institut Pasteur a séquencé le génome de cyanobactéries violaceus Gloeobacter. Ils ont noté une séquence de protéines sur la bactérie très similaire à la séquence des canaux ioniques ligands-dépendants humains, et ont réussi à cristalliser cette protéine. Pour la première fois, les chercheurs ont décrit les effets de l’éthanol à l’échelle atomique : ils ont identifié 5 sites de liaisons de l’éthanol, avec une précision de l’ordre de l’Ångstrom ( 10 milliardième de mètre ).

Cette structure a permis de comprendre la manière dont la fixation de l’éthanol sur la protéine active l’ouverture du canal, perturbant ainsi l’activité neuronale.

Limiter les effets de l’alcool

Le Dr Harris et son équipe compte à présent identifier d’autres protéines importantes de cette famille de canaux ioniques ligands-dépendants, afin de développer des médicaments qui agiraient sur ces protéines, pour aider les gens à diminuer ou à cesser leur consommation d’alcool. Des composés antagonistes pourraient, par exemple, maintenir ces canaux fermés afin de limiter les effets de l’alcool.

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