L’ascension fulgurante de l’ultimate frisbee

Né vers la fin des années 60, sur les campus américains, l’ultimate frisbee est de plus en plus pratiqué partout au pays. À Québec, chaque semaine, des centaines d’étudiants se rassemblent au Stade Telus de l’Université Laval et au Cégep Garneau pour jouer des dizaines de matchs amicaux. Se voulant plus accessible et ouvert que bien d’autres disciplines, ce jeune sport développe actuellement une communauté grandissante.

Composée de 1600 membres, l’Association des joueurs et joueuses d’Ultimate de Québec (AJJUQ) grandit à un rythme effréné depuis quelques années. Tant au niveau collégial qu’universitaire, de plus en plus de jeunes s’impliquent dans cette nouvelle discipline. « En un an seulement, le nombre d’équipes collégiales a doublé, passant de 8 à 20 sur surface intérieure et de 4 à 10 à l’extérieur », explique Antoine Turgeon, directeur général de l’organisme.

Le circuit universitaire canadien est, quant à lui, déjà très développé. Plusieurs tournois se dérouleront d’ailleurs dès le mois de septembre, dont les championnats nationaux, qui auront lieu à Montréal cette année au mois d’octobre. « Ici, à l’Université Laval, on a déjà une équipe masculine, et on veut pousser pour avoir un groupe de filles cette année », assure M. Turgeon.

Vers un développement  professionnel à Québec

En opération depuis 2014, le Royal de Montréal, qui évolue dans l’American Ultimate Disc League (AUDL), demeure la seule équipe de niveau professionnel en frisbee au Québec. Il y a trois ans, le club montréalais signait un contrat d’exclusivité sur le territoire québécois pour éviter toute compétition dans la province. Voilà maintenant que cette entente vient à échéance cette année, laissant tout le reste du Québec libre de pénétrer le marché.

Le directeur exécutif du Royal, M. Jean-Lévy Champagne, estime que son sport devrait donc connaitre une expansion d’ici peu, dans la ville de Québec par exemple. « Il y a des membres passionnés là-bas et c’est certain que ça fonctionnerait, résume-t-il. Il y aura des défis financiers et logistiques avant d’en arriver là, mais d’ici cinq ans, oui c’est possible ».

À Québec, cette ouverture attire déjà plusieurs investisseurs. La masse de joueurs y est vaste, mais certains risques sont considérables. « La question réside dans la capacité du bassin de la ville, qui doit être assez large pour que la ligue soit en confiance avec la pérennité d’un club, explique Antoine Turgeon. Il y a un risque financier, mais ce sera viable d’ici peu à Québec». Le directeur général avoue d’ailleurs que certaines discussions ont été entreprises avec des hommes d’affaires et que la ville de Québec adore ce genre d’initiatives sportives locales.

Du ultimate dans le programme Rouge et or?

Rassemblant toutes les fédérations au pays, Ultimate Canada travaille depuis peu à l’élaboration d’un regroupement des universités pour sa discipline. Inspirée de celle des États-Unis, cette nouvelle ligue universitaire pourrait amener les campus québécois à former de nouveaux programmes. « Il faut mettre en place un cadre très performant, ce qui peut être plus difficile au Canada, étant donné l’énorme distance entre les villes, note M. Champagne. Reste qu’il y a un fort intérêt pour ça, des joueurs et des organismes ».

À l’Université Laval, l’AJJUQ rêve d’une plus grande collaboration avec le Rouge et Or, un programme dont la marque de commerce est déjà bien établie et réservée aux plus grandes équipes sportives. L’association ne vise pas un club lavallois d’ici les prochaines années, mais travaille fort à pousser l’idée au maximum. « Pour l’instant, on veut simplement collaborer avec l’Université au niveau des infrastructures et de la promotion », avoue M. Turgeon. À moyen-terme, ce dernier souhaite « une équipe d’ultimate à Laval, au même titre que toutes les autres disciplines sportives ».

Étudiant au Cégep Limoilou en génie civil, Félix Marceau est quant à lui très impliqué dans l’obtention d’une future équipe Rouge et or en ultimate. Celui qui joue également pour le Royal de Montréal rappelle que le réseau universitaire canadien est déjà quelque peu développé.  «Depuis l’an passé, Sherbrooke a une équipe officielle, tout comme UBC, Victoria et l’Université du Manitoba, résume-t-il. C’est moins développé à l’est, ce pourquoi je me donne trois ans pour avoir une équipe ici à Laval».

Depuis maintenant deux ans, le jeune homme âgé de 20 ans monte un programme officiel qu’il compte présenter bientôt à l’UL. « Tout y est : organisation, financement, vision de l’équipe, poursuit-il. Je structure le projet pour que l’université ait simplement à reprendre l’idée et à la faire rouler ». En octobre prochain, Félix Marceau a d’ailleurs l’intention de participer aux championnats canadiens au sein d’une équipe d’étudiants lavallois, afin de prouver à l’administration qu’il y a beaucoup de talent à l’interne.

Le futur de la discipline

À l’aube des Jeux de Rio, qui s’amorceront le 5 août prochain, on peut se demander si ce sport fera éventuellement son entrée olympique. Sur ce point, Jean Lévy-Champagne estime que ce n’est qu’une question de temps avant de voir le ultimate frisbee au programme. « Je prévois qu’il y sera dès 2024, dans un format mixte, exprime-t-il. Ça aura un impact et une croissance sur toutes les ligues, au niveau professionnel et junior ».

Les activités juniors devront également être mieux organisées selon le directeur de l’AJJUQ, qui souligne que certaines améliorations peuvent être apportées à l’interne. « On voit une coordination provinciale des ligues et des réseaux étudiants par le Réseau de sport étudiant québécois (RSEQ), admet-il. On voudrait bientôt pouvoir entrer aux Jeux du Québec ».

Une plus grande médiatisation du sport contribuera ensuite à promouvoir une belle image du ultimate. Ayant été introduit à TVA Sports récemment, ce sport deviendra progressivement une chose du commun, selon Félix Marceau. « Ça sera mieux vu dans le futur, explique-t-il. Les visions vont s’ouvrir et les préjugés passeront en diffusant la pratique».

Par-dessus tout, cette discipline devra continuer d’être un acte de socialisation pour toutes les tranches d’âge. C’est du moins ce que rappelle Jean-Lévy Champagne, lui-même étant un joueur toujours actif. « C’est un beau sport pour se faire des amis et socialiser, conclut-il. Avant de commencer la soirée, un match de frisbee se place bien, et c’est un peu ce que cherche la communauté des cégeps et des universités je crois ».

Les principaux règlements de l’ultimate frisbee
  1. Trois modes de jeux sont possibles. Chaque équipe s’entend pour envoyer quatre, cinq ou sept joueurs sur le terrain.
  2. Le détenteur du disque ne peut pas marcher et doit demeurer statique jusqu’à ce qu’il effectue une passe à un autre joueur.
  3. Le but est d’atteindre la zone des buts, passe par passe.
  4. Si une échappée ou une interception survient, l’équipe adverse reprend possession du disque. Le joueur relançant l’attaque frappe alors le frisbee sur le sol, signe que le jeu peut reprendre.
  5. Les matchs sont généralement auto-arbitrés : les fautes flagrantes sont donc laissées à la discrétion des joueurs, qui doivent faire preuve d’équité.
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