Un doctorant en sciences de l’orientation de l’Université Laval s’intéresse aux raisons qui poussent environ un étudiant au doctorat sur deux à abandonner ses études avant d’obtenir son grade de Philosophiæ doctor (PhD.).
Le constat est alarmant : malgré une augmentation marquée du nombre d’étudiants de 3e cycle dans les pays de l’OCDE lors des dernières décennies, le taux de diplomation demeure faible. Au Québec, il est estimé que sur les 14 000 étudiants inscrits au doctorat en 2010, seuls 8400 (60 %) de ceux-ci obtiendront un diplôme. Les 5600 autres (40 %) abandonneront en cours de parcours, parfois après y avoir investi plusieurs années de leur vie.
Pire encore : les statistiques quant aux taux de diplomation et d’abandon sont constantes depuis les cinquante dernières années.
« Tous sont perdants relativement à cette situation, affirme David Litalien, doctorant en sciences de l’orientation de l’Université Laval. Les étudiants gaspillent du temps et de l’argent. Les universités perdent de précieuses sources de revenus. Mais surtout, la société se prive d’une expertise dont la valeur est inestimable en cette ère d’économie du savoir. » Le nombre de récipiendaires de doctorat est un bon indicateur de prospérité économique.
Chercher des explications
Qu’est-ce qui explique pourquoi certains doctorants persévèrent alors que d’autres décrochent? C’est la question sur laquelle s’est penché l’étudiant chercheur dans le cadre de son doctorat. Plus précisément, il a tenté de cerner les variables qui seraient en mesure de prédire les intentions d’abandonner les études de doctorat.
Après avoir questionné des centaines de doctorants non persévérants et diplômés ainsi qu’un millier d’autres en cours de diplomation, David Litalien est catégorique : c’est la manière dont un doctorant perçoit ses propres compétences qui est au cœur de la persévérance des études de 3e cycle. « La relation est claire : moins un étudiant au doctorat se sent bon dans ce qu’il fait, plus il a de chances de décrocher », résume-t-il.
Plusieurs facteurs influencent la perception de compétences. Le fait de bénéficier d’un soutien adéquat de la part de ses collègues étudiants chercheurs, du corps professoral, mais plus encore de son directeur de recherche semble être l’un des plus importants. « Sentir que ces individus nous appuient et croient en nous favorise la motivation. En retour, celle-ci explique une forte perception de compétences », analyse-t-il.
À sa grande surprise, David Litalien n’a constaté que très peu d’effets des revenus ou de l’endettement sur la persévérance aux études de doctorat. L’environnement de recherche, note-t-il, est un facteur bien plus important à prendre en compte.
Histoires d’horreur
Ses données étant essentiellement collectées sous forme de questionnaires, le jeune chercheur n’a malheureusement pu interroger ses répondants sur la teneur de leurs réponses. N’empêche, il a tout de même reçu plusieurs témoignages de la part de ces derniers. Si la plupart étaient anodins, plusieurs relevaient carrément de l’horreur : vol de propriété intellectuelle, non-reconnaissance du travail accompli, absentéisme quasi complet du directeur de recherche, etc.
« Force est de constater que les étudiants gradués ne constituent pas une priorité pour tous les directeurs de recherche, déplore David Litalien. Une meilleure rétention des étudiants aux études de doctorat par les universités passera inévitablement par un changement de culture dans les milieux de recherche. »