Peu de gens ignorent l’existence de Bleu Nuit, série érotique ayant été présentée à TQS de 1986 à 2007. L’espèce d’ovni de l’histoire de la télévision québécoise a marqué les esprits au point que deux hommes, Éric Falardeau et Simon Laperrière, ont décidé de lui dédier un livre.
Drôle d’idée, écrire un livre sur Bleu Nuit. Pourtant, quand vient le temps d’expliquer la genèse de l’ouvrage, Simon Laperrière amène les choses de manière assez simple : « On discutait, Éric et moi, avec le journaliste français Gilles Esposito, qui écrit pour la revue Mad Movies, de la distribution du cinéma pornographique et érotique au Québec par rapport à celle en France. En en parlant, on s’est rendu compte qu’il n’y avait pas de livre sur Bleu Nuit, donc à ce moment-là on a sauté sur le projet. On s’est dit : » Puisqu’il n’y en a n’a pas, faisons-le! » »
Si le sujet est à première vue assez cocasse, on peut se demander s’il y a néanmoins un réel intérêt à réaliser un tel ouvrage. Pour Éric Falardeau, il est clair que la série a été assez influente pour être le sujet d’un livre. « Toute la génération des années 80-90 a découvert le cinéma érotique par l’entremise de Bleu Nuit ! […] Ce sont souvent les films qu’on voit plus jeune qui vont nous marquer. »
Plus qu’un simple essai
Là où le projet se démarque, c’est dans la composition du livre. En effet, Bleu Nuit : Histoire d’une cinéphilie nocturne ne prend pas la forme d’un essai continu, mais est plutôt un collage de textes de différents styles. On retrouve ainsi des essais, des entrevues, des récits, des critiques de film et même un scénario de film.
« On s’est rendu compte que Bleu Nuit touchait à tellement d’enjeux sociologiques, cinématographiques et humains que la forme d’un essai classique ne pouvait pas rendre hommage à certains d’entre eux. […] Ce que l’on espère, c’est que les lecteurs, à travers les histoires de Manon Dumais, de Marie-Laure Tittley, arrivent à se reconnaître, même si elles ouvrent en quelque sorte les portes de leur jardin secret », indique Simon Laperrière.
Taboue et oubliée
Si beaucoup de gens ont écouté Bleu Nuit, il est difficile de trouver des informations au sujet de cette série de nos jours. « Quand on a eu l’idée de monter ce livre-là, il y avait une chose qui était claire dans notre tête : c’est qu’il devait inclure la liste de tous les films présentés à Bleu Nuit. Le problème était que ce sont des informations qui ne sont pas disponibles sur Internet, ce qui aurait grandement facilité la tâche. […] Donc, ce qu’on a fait, c’est se tourner vers les archives en se rendant à la Cinémathèque québécoise, qui a conservé tous les TV Hebdo à partir des années 80. Et donc, pendant une période d’environ 5 jours, on regardait dans ces revues-là afin de voir quels films avaient joués à Bleu Nuit », raconte Simon Laperrière.
« On a une conception actuellement qu’avec Internet, le piratage, tout est disponible, tout se trouve. C’est plus ou moins vrai. Il y a des titres qui disparaissent, il y a des titres qui vont disparaître », ajoute-t-il. De plus, l’aura de gêne, de tabou qui entourait la série n’aide pas non plus quand vient le temps de retrouver des informations à son sujet. Éric Falardeau donne un exemple : « Quand il y avait des annonces de programmation de TQS chaque année dans les médias dans le TV Hebdo ou les journaux, on ne mentionnait pas Bleu Nuit, sauf dans les médias régionaux quelque fois. […] Dans les entrevues, les documentaires sur TQS, on n’en parle pas non plus. »
Un aperçu de ce que contient Bleu Nuit : Histoire d’une cinéphilie nocturne
- Une critique du film Raspoutine, « un film qui est étonnamment très fidèle à la vraie histoire de Raspoutine » selon Simon Laperrière.
- Un scénario de Erotic Detective Ninja 2, écrit par Jean-François Rivard (Série noire, Les Invincibles).
- Une entrevue avec Guy Fournier, le co-fondateur de la chaîne TQS.
- Dieu, es-tu là? C’est moi, M-L., un texte de Marie-Laure Tittley décrivant ses rituels d’écoute de la série.