En entrant dans la galerie du second étage du Alphonse-Desjardins, faites attention où vous marchez, car trois anciennes étudiantes au baccalauréat en arts visuels – Sarah Booth, Audrée Demers-Roberge et Éloïse Plamondon-Pagé – en marquent l’espace dans son entièreté depuis le 28 septembre.
Le projet de cette expo à trois voix commence avec Sophie Jacques, bientôt graduée à la maîtrise en histoire de l’art de l’Université Laval, qui voulait organiser une exposition dans la galerie du pavillon Alphonse-Desjardins avant la fin de ses études. Elle s’est donc précipitée avant le début de la session d’automne pour concrétiser ce projet en tant que commissaire.
En seulement deux semaines, les trois artistes avaient accepté l’invitation avec enthousiasme. L’exposition De passage se veut une réflexion sur les traces temporelles que tout un chacun laisse dans son sillage au quotidien. Comme l’explique Sophie Jacques : « Une trace peut être autant une action, un état ou un événement. Bien que les formes diffèrent, les traces sont toutes des preuves d’un passage. Dans le contexte de l’expo, les œuvres sont donc abordées comme les résultats d’un processus concret, mais également poétique. »
L’idée de la « trace » relie les artistes à un matériau, le bois. La matière organique est omniprésente dans l’exposition, ce qui lie les trois créatrices en un puissant tout. Elles semblent parler la même langue, mais avec des accents différents. L’impression de visiter une exposition solo est poignante, mais ce sont bien trois artistes distinctes avec des démarches uniques.
Audrée Demers-Roberge
Il est difficile de ne pas remarquer le cercle de bois brulés déposés par Audrée Demers-Roberge au milieu de la salle. Même si on ne voyait pas le bois, notre nez le remarquerait, l’odeur d’humidité et de feu de bois embaumant le centre de l’espace. On tourne autour de l’œuvre comme autour des vestiges d’une petite forêt brûlée. Elle « trouve ça inévitable dans notre environnement, les arbres très présents et c’est une richesse, malgré qu’au Nord on les perd », d’où l’idée de « prendre des espèces familières reconnaissables. »
Sarah Booth
L’oeuvre Ligne du temps est une structure en fibre de verre sur laquelle sont déposées des estampes réalisées à différents moments dans la vie de l’artiste. Du papier jauni côtoie le blanc immaculé. Les formes humaines s’entremêlent avec l’abstraction dans un mouvement figé dans le vide. « J’aime travailler avec des matières imparfaites qui génèrent du mouvement. Quand je grave du bois, je trouve des nœuds, des imperfections, les vibrations de quelque chose de vivant. »
Éloïse Plamondon-Pagé
La jeune artiste présente un court vidéo montrant un restaurateur d’œuvres d’art vénitien qu’elle a rencontré pendant un voyage à Venise. Bien qu’elle ne parlait pas l’italien et qu’il ne connaissait aucun mot d’anglais ou de français, elle a passé une journée à contempler le maître à l’œuvre. Dans un style documentaire sans narration, on découvre les gestes méticuleux de cet artisan.« Mon rapport au bois passe vraiment par le travail manuel artisanal, explique Éloïse Plamondon-Pagé. Le cadre que ce restaurateur construit, je le vois comme une preuve de son savoir-faire. Le bois, dans ce cas, est une trace d’un patrimoine manuel. »
Il est possible d’apprécier ce choeur visuel qui interprète le bois dans une harmonie de formes et de sens à la galerie du pavillon Alphonse-Desjardins jusqu’au 17 octobre.