Sac d’os : une adaptation trop riche?

Écrit en 1998 par Stephen King, le roman fantastique est adapté au petit écran en mini-série par le réalisateur Mick Garris en 2011. Cependant, c’est en décembre 2020 que ces épisodes (deux parties de une heure trente) sortent en DVD et en Blu-Ray. Bien qu’aucun bonus soit ajouté et qu’aucune réactualisation du contenu soit faite, la série m’a donné envie de revenir sur certains points.

Par Léonie Faucher, rédactrice en chef

Adapter un roman de Stephen King représente un défi pour les réalisateurs.trices qui s’y attaquent, puisque ses univers laissent beaucoup de place à l’aspect imaginatif. Un dosage entre la fidélité au texte et des blancs volontaires pour ce qui doit être imaginé permet de réaliser une bonne adaptation.

Mick Garris est un spécialiste des adaptations en format minisérie ou double téléfilm des romans de Stephen King après avoir produit entre autres les minis-séries Le Fléau et Shining. Cependant, ce n’est pas sa meilleure adaptation, car elle contient beaucoup de superflus.

Résumé

Mike Noonan, écrivain à succès originaire de la ville de Derry, souffre du syndrôme de la page blanche à la suite de la mort de sa femme Johanna d’une rupture d’anévrisme quatre ans auparavant. Il fait également des cauchemars qui concernent sa résidence secondaire et de Sara Tidwell, une chanteuse de blues afro-américaine du début du vingtième siècle. Il décide de s’y rendre pour l’été alors qu’il n’y est plus retourné depuis la mort de sa femme. À peine installé, il découvre que Johanna, sa femme, avait fait à son insu plusieurs visites à Sara Tidwell. Il fait aussi la connaissance de Mattie, une jeune femme veuve depuis peu, et de sa fille de trois ans, Kyra. Mattie est la belle-fille de Max Devory, l’homme le plus riche et le plus influant de la région, et elle se bat pour conserver la garde de sa fille que Devory voudrait récupérer.

Des longueurs à ne plus finir

Avant tout, j’ai adoré l’adaptation cinématographique du deuxième épisode de la mini-série. C’est la première partie qui selon moi n’apporte absolument rien. Le spectateur.trice a seulement besoin des vingt, peut-être trente premières minutes, de ces quatre-vingts minutes d’introduction à la seconde partie. La femme décède d’un accident et le mari en est accablé, c’est tout ce qu’il y a de pertinent dans ce premier une heure trente pour la suite de l’histoire. Le réalisateur se noie (jeu de mots avec les noyées du film) dans son arythmie, ce qui traîne l’auditoire dans un dédale scénaristique mou.

Durant l’écoute, j’ai l’impression que ces longueurs nous sortent de l’univers King. En effet, des images s’enchaînent dans des lieux anodins sans rythme et rendent le tout ennuyeux. Alors que la deuxième partie défile sans pause pour le spectateur. trice. Elle commence avec une réponse sur l’intrigue et ensuite, c’est un glissement de terrain jusqu’à une pré-fin solide avec la résolution de la malédiction. Puis, une fin où on traverse finalement la ligne de l’excessif avec une communication avec l’au-delà tirée par les cheveux.

Un coup pour oui, deux coups pour non

L’intrigue tourne (énormément) autour de la communication avec l’au-delà. Le romancier Mike tente de parler avec sa conjointe décédée en lui demandant de s’exprimer ainsi : «un coup pour oui, deux coups pour non ». Ensuite, ce sont les manifestations classiques de présences fantomatiques connues des films d’horreur : objets qui bouge, tourne-disque qui part tout seul, des bruits et des hallucinations. Jusque là, ça va !

Ici, l’originalité et la force de cette communication viennent des lettres; la conjointe communique avec une cloche pour les coups et compose des mots avec les lettres aimantées sur le frigidaire. L’écrivain comprend les messages que sa femme lui envoie de l’au-delà pour régler le mystère autour du lac grâce aux jeux de lettres.

(Spoiler alert) Par contre, ça se gâte à la fin où un arbre en forme de femme est possédé par la chanteuse country, celle qui a lancé la malédiction. La femme de l’écrivain apparait sans aucune apparence fantomatique pour le défendre de l’arbre. L’écrivain a même droit à un baisers après le combat. Je trouve que ça enlève le peu de réalisme que l’on peut avoir dans une histoire de fantôme qu’elle apparaisse si tactile. Puis, juste avant la fin, l’apparition de Mattie dans la baignoire qui est simplement de trop. L’utilisation des effets spéciaux est décevante  ; l’eau se soulève pour former une femme. L’apparition du fantôme perd sa crédibilité et ressemble davantage à une attaque du pokémon Carapuce.

Sauver par les acteurs. trices et les décors

La mini-série est sauvée par un jeu d’acteurs puissant avec de grands noms en tête d’affiche. En effet, Pierce Brosnan (Mike Noonan) interprète avec excellence les nombreux changements d’états d’âme du personnage : endeuillé, apeuré, déterminé et héroïque. Le retournement de situation le pousse à protéger Kyra, la jeune enfant, passant d’écrivain reclus à Jackie Chan.

Ensuite, les décors offrent un cadre magnifique, soit les lacs canadiens. Le lac est utilisé autant pour sa magnificence que pour l’aspect terrifiant, alors qu’il cache des horreurs dans ses profondeurs invisibles de la surface.

La composition des scènes de cauchemars et des visions du passé est juste et réaliste. L’auditoire n’a pas de difficulté à différencier la réalité des épisodes hallucinogènes ou des cauchemars. D’ailleurs, le décor de la chanteuse Sara Tidwell à la foire est à s’y méprendre. Entre le décor réaliste d’une foire de country, des balles de foins et des attractions, Mike Noonan se retrouve à la lointaine époque.

En bref…

Pour moi, c’est un coup pour oui, malgré les faiblesses qui découlent davantage de la forme que du contenu. En effet, l’impression générale est que l’adaptation a voulu en montrer trop, comme si aucun choix scénaristique n’avait été fait entre le texte et le scénario pour couper des scènes peu intéressantes à l’écran.

Néanmoins, l’intrigue est bien ficelée et surprend le spectateur. trice avec des retournements de situation dans le dénouement de la seconde partie. Bref, c’est un à voir si un investissement de trois heures est prêt à être donné.

Auteur / autrice

  • Léonie Faucher

    Passionnée de l'écriture, Léonie termine cette année son Baccalauréat en études et pratiques littéraires. Plus tard, elle vise l'enseignement de la littérature au collégial. Son parcours universitaire est marqué par son implication journalistique. Les mots et la photographie sont ses outils de prédilection. En tant que journaliste, les sujets sociaux, artistiques et les créations l'intéressent particulièrement.

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