Pierre Sormany, sommité du journalisme canadien, a transmis un peu de son savoir lors d’une conférence sur le reportage scientifique à l’écrit à l’université Laval.
Anne-Laure Nivet
Pas tout à fait un cours, pas tout à fait une conférence. Les étudiants viennent vraisemblablement d’assister à un cours sur le journalisme scientifique. Polycopiés d’articles sur les tables. «Titre», «chapeau» et «lead» écrits à la craie blanche au tableau. Pierre Sormany arrive. Valérie Borde, professeure et journaliste, le présente. Il travaille pour le journal Québec Science depuis 40 ans et en est aujourd’hui l’éditeur et le directeur général. Il a également travaillé pour Radio-Canada pendant 20 ans.
Selon Pierre Sormany, le journaliste scientifique doit avant tout s’adapter à son lecteur et donc écrire des textes appropriés au niveau de la vulgarisation du medium. Il va de la haute vulgarisation, destinée à un public possédant un certain bagage scientifique, à une vulgarisation plus basique, qui s’adresse à un très grand public, en passant par un niveau intermédiaire, comme c’est le cas de Québec Science. Pierre Sormany a ensuite expliqué que le journaliste scientifique traite de sujets qui font «l’actualité, mais avec l’éclairage de la science». Il doit fournir assez d’éléments pour «le plaisir d’explorer, le besoin de comprendre» du lecteur, que ce dernier puisse comprendre les enjeux et y réfléchir. Mais le lecteur ne doit pas se perdre à la lecture d’informations superflues dans sa réflexion et son analyse critique. Il doit sentir les limites du savoir qui évoluent au fil des découvertes. Par ailleurs, le journaliste doit rendre la science comme elle est : vivante … et parsemée d’embûches !
Effectivement, la science est une suite d’aventures non linéaires. Il faut la raconter en accéléré, car les projets s’étendent sur des années, et en la scénarisant comme un film hollywoodien. Il faut aller à la rencontre des chercheurs dans leurs milieux de travail quotidien pour «sentir le terrain, être un rapporteur d’activité et pas seulement un témoin théorique». Bref, chercher la petite histoire derrière la grande. Connaître et transmettre le côté humain de la recherche scientifique permet aussi de rendre une image plus sensible, plus vivante. Pierre Sormany illustre ses propos par de nombreux exemples vécus dans différents milieux : une usine de métallurgie, un laboratoire de génétique, des bureaux. C’est là qu’il réalise qu’il ne lui reste que cinq minutes pour un cours donné habituellement en une heure !
Mais on a eu l’essentiel : il faut raconter la science, avec ses difficultés et ses obstacles, ce qui accentue l’héroïsme des chercheurs pour mieux passionner les lecteurs.