Depuis le début de la session d’automne 2024, il est possible de voir des sacs mauves dans les poubelles des toilettes de l’Université Laval. Normalement, ces sacs servent strictement à la collecte de résidus alimentaires. Alors, que font les sacs mauves dans les poubelles de l’université?
Par Marie Tremblay, journaliste multiplateforme
Il ne faut pas s’inquiéter, c’est voulu! L’Université participe actuellement à un nouveau projet pilote avec la Ville. Afin de bien comprendre les dimensions de cedit projet, commençons par revoir les bases de la collecte de résidus alimentaires dans les sacs mauves.
La biométhanisation, le choix de Québec
La biométhanisation est un processus de dégradation de la matière organique par des bactéries dans un milieu sans oxygène pour le transformer en gaz naturel (biogaz) et en fertilisants (digestat). La Ville récupère les restes de table pour en faire des fertilisants et les boues municipales pour la production de biogaz.
Pour avoir une production constante et efficace, il est préférable de collecter les résidus alimentaires, car leur potentiel méthanogène est plus élevé que celui des cartons et autres papiers. Dans le matériel distribué pour la collecte, le guide pratique définit les résidus alimentaires par les questions suivantes : Est-ce que ça se mange ou est-ce une partie de quelque chose qui se mange? Dans les municipalités qui font plutôt du compostage, les cartons souillés peuvent être acceptés, car c’est un processus de dégradation de la matière organique par des bactéries en milieu ouvert. La nature des déchets est donc moins restrictive. Cependant, le compostage requiert un espace considérable et peut être difficile à implanter en raison de l’opinion, parfois défavorable, du public. En effet, certaines personnes favorables à ce genre de projets peuvent changer de camp lorsque l’emplacement est annoncé, parce que personne ne veut vivre les effets négatifs d’un projet, que ce soit la pollution visuelle des éoliennes ou les odeurs d’un centre de compostage. C’est le principe du « oui, mais pas dans ma cour ».
Dany Levesque, Conseiller en environnement au service de la gestion des matières résiduelles et de la valorisation de la Ville de Québec, explique que l’implantation d’un centre de biométhanisation permet le traitement des résidus sur le terrain de la ville. De cette façon, le voyagement inutile des résidus sur de plus grandes distances est évité. Cela permet aussi que certaines étapes du processus se fassent dans des installations déjà existantes, notamment l’usine d’épuration des eaux usées et les conduits souterrains qui permettent l’acheminement des boues municipales (matière organique provenant de la station des eaux usées).
De plus, les sacs mauves sont collectés en même temps que les ordures ce qui permet de sauver des coûts importants sur le transport, mais aussi de réduire les gaz à effet de serre d’une collecte supplémentaire. Toujours selon M. Levesque, c’est 3 150 tonnes de CO2 par année qui sont sauvées en camionnage.
Et après la collecte?
Une fois le sac mauve balancé dans la benne à ordure à l’extérieur de la maison, combien d’entre-nous réfléchissons à ce qui arrive ensuite? Soyons honnêtes, l’avenir de nos déchets ne nous préoccupe pas ou très peu.
Les sacs mauves sont fabriqués au Québec dans un matériel résistant au compactage. Il faut savoir que la couleur mauve est primordiale pour la suite du tri, car il est effectué à l’aide d’un capteur optique qui détecte la pigmentation de l’emballage. Les sacs sont vidés puis décontaminés, à la main, des déchets indésirables comme le plastique. Pour cette raison, il est très important de ne pas utiliser le sac mauve pour autre chose que la collecte de résidus alimentaires. Le bon fonctionnement du processus de récupération tient donc sur la responsabilité citoyenne. Ensuite, le contenu des sacs se retrouve dans un mélange d’eau chaude et de boues municipales, affectueusement appelé le « smoothie ». C’est cette substance qui est envoyée à l’usine de biométhanisation. La ville prévoyait de recycler les lambeaux de sacs mauves dans la fabrication de mobiliers urbains. Par contre, développer les bonnes techniques prend du temps. Pour le moment, les sacs mauves terminent à l’incinérateur.
Un nouveau projet pilote
Enfin, de retour aux sacs mauves sur le Campus. M. Lévesque a aussi été en mesure de répondre à cette interrogation. L’Université Laval participe présentement à un projet pilote avec la ville. Il s’agit d’ajouter une matière fibreuse dans le digestat, un des produits de la biométhanisation, à des fins de recherches. En effet, on s’interroge sur les potentiels avantages d’ajouter de la fibre à cette matière. Bien sûr, cela requiert que les sacs mauves dans les « poubelles » des toilettes ne soient pas contaminés par d’autres déchets. Selon l’Université, les erreurs de tri sont peu fréquentes. Cependant, ce projet évolue dans l’ombre et il ne semble pas y avoir de campagne de sensibilisation ou d’information prévue sur le sujet.
Les essuie-mains sont donc acceptés dans les sacs mauves sur le campus de l’Université uniquement. Dans nos maisons, la question demeure : est-ce que ça se mange ou est-ce une partie de quelque chose qui se mange? Si la réponse est non, direction poubelle. Pour s’y retrouver, il existe l’application Ça va où? Il suffit d’entrer notre code postal et l’item dont nous souhaitons disposer. De cette façon, nous pouvons faire le tri de nos déchets de façon éclairée (et beaucoup plus simple).
Des informations supplémentaires sont disponibles sur le site de la Ville de Québec.