Le 21 octobre dernier s’ouvrait à Cali, en Colombie, la 16e Conférence des Parties sur la biodiversité. Réuni.es sous le thème de la « paix avec la nature », les participant.es y ont discuter de comment appliquer les promesses qui furent formulées il y a deux ans à Montréal. Bien que la conférence se soit soldée sur un échec d’entente pour financer les ambitions de l’Accord Kunming-Montréal, certaines victoires sont à souligner.
Par Antoine Morin-Racine, chef de pupitre aux actualités
Des objectifs ambitieux, mais peu de temps pour les réalisés
Parmi les objectifs votés en grande pompe à Montréal il y a deux ans, ont compte la protection de 30% des milieux marins, terrestres, côtiers, et d’eau douce avant 2030, « [m]ettre fin à l’extinction d’origine [humaine] des espèces menacées connues et, d’ici à 2050 », et « [i]nvestir au moins 200 milliards de dollars par année d’ici 2030 pour protéger la biodiversité dans le monde. ». Aux yeux de Dominique Gravel, professeur en biologie à l’Université de Sherbrooke dont la recherche se concentre sur la complexité des écosystèmes, ce sont des objectifs qui sont très ambitieux avec un échéancier qui l’est encore plus.
Les 196 pays membres de la conférence étaient ainsi réunis à Cali cette semaine pour décider d’un plan d’action vis-vis de ce qui avait été voté il y a deux ans, mais la plupart d’entre eux n’avaient pas encore finalisé leur propre plan national sur la biodiversité, souligne-t-il.
« Moi ça m’inquiète un peu », dit-il en rappelant également qu’aucun des objectifs du protocole précédent d’Aichi sur la biodiversité n’avait été atteint à l’approche de la dernière COP à Montréal.
En date de la fin de la conférence samedi, les participant.es n’avaient toujours pas conclu d’entente autour du financement des fameux « objectifs 30×30 » et aucun plan de reddition de comptes pour les objectifs de l’Accord Kunming-Montréal n’a été mis en place.
Dominique Gravel mentionne toutefois qu’il y a encore beaucoup d’espoir dans des conférences comme la COP16, les conférences similaires sur le climat ayant changé l’entièreté de notre paysage politique et les dernières COP sur la biodiversité ayant bien amené à l’avant de la scène médiatique et politique l’enjeu de la biodiversité.
Parmi les accomplissements des deux dernières semaines, on compte notamment la création d’un fonds dédié au partage des revenus de la numérisation des données génétiques acquises bien souvent dans des zones protégées par de grandes compagnies pharmaceutiques ou cosmétiques. Une mesure qui viendrait notamment en aide à plusieurs peuples autochtones habitant dans ces zones et ayant une grande connaissance des plantes et des animaux utilisés par ces compagnies.
Les peuples autochtones à l’honneur
La conférence s’est tenue à quelques centaines de kilomètres du bassin amazonien, l’une des plus grandes réserves de biodiversité sur la planète, mais aussi le territoire ancestral d’au moins 385 tribus autochtones différentes. Celles-ci ont profité de l’événement pour rappeler le rôle crucial que leurs peuples jouent dans la préservation de la biodiversité.
Un autre surnom donné à la conférence pendant son déroulement fut « la COP des peuples ». Un véritable G9 des nations autochtones qui se partagent l’Amazonie au sein des 9 pays qui la découpe (Brésil, Colombie, Pérou, Bolivie, Équateur, Venezuela, Guyane anglaise, Guyane française et Suriname) s’est formé pendant la durée de la conférence.
Les peuples de la coalition demandent entre autres la protection d’une plus grande quantité de leur territoire des activités extractives et les pleins pouvoirs sur l’administration de ces zones protégées. Iels demandent également un financement direct de ces efforts par la communauté internationale et la mise en place d’un groupe permanent autour des enjeux autochtones au sein de la COP sur la biodiversité.
Les peuples autochtones (mais aussi les peuples afrodescendants) ont obtenu gain de cause à la fin de la semaine avec la création d’un « organe subsidiaire » dédié à la représentation des peuples autochtones au sein de la conférence. La Convention sur la diversité biologique a également reconnu pour la première fois l’apport des peuples afrodescendant dans la préservation de la biodiversité.