Le 12 mars dernier avait lieu à Montréal un rassemblement de la campagne de revendications et d’actions interuniversitaires pour les étudiantes et les étudiants d’éducation en stage (CRAIES). Réalisé devant le bureau du ministre des Finances du Québec, Carlos J. Leitão, le rassemblement avait pour but d’attirer l’attention du public sur la réalité économique imposée aux étudiants en enseignement pendant leurs stages en milieu scolaire.
Vêtu de sarraus blancs, le groupe composé d’une dizaine d’étudiants en enseignement a pris place derrière des bureaux d’écoliers disposés de façon à rappeler une salle de classe afin d’assister à une leçon d’économie.
« À l’approche du budget, nos demandes sont claires et réalistes : 20,3 millions de dollars par année pour compenser les stagiaires en enseignement qui subissent la précarité financière. S’il y a assez d’argent au gouvernement du Québec pour verser une véritable cagnotte aux médecins, il devrait y en avoir assez pour compenser les profs de demain », déclare Antoine Côté, étudiant en enseignement du français au secondaire à l’Université de Montréal et porte-parole de la CRAIES.
Le mouvement, qui existe maintenant depuis quatre ans, revendique une compensation financière du dernier stage de prise en charge en enseignement d’un montant de 576$ par semaine. Il rappelle du même coup que la dépense correspondrait à 0,1% du budget en éducation, et à un centième de la hausse salariale consentie aux médecins.
Le porte-parole rappelle que le stage 4 nécessite d’un étudiant qu’il endosse 100% des tâches d’un enseignant régulier. Planification, prestation de cours, correction, suivi avec les parents et rencontres à l’école sont quelques-unes des tâches qu’ils devront réaliser pendant celui-ci. Il s’agit ainsi d’un stage à temps plein. « En plus de ça, l’étudiant ou l’étudiante a des obligations universitaires. Il a encore des séminaires et des travaux de stage à rendre », indique Antoine Côté.
De ce fait, les universités québécoises demandent communément de s’abstenir de travailler à l’extérieur pendant le stage. « À l’Université de Montréal, c’est formellement interdit », ajoute-t-il. De surcroît, il faut selon lui noter que le revenu des étudiants en enseignement vient fréquemment de la suppléance, ce qui n’est plus possible de réaliser pendant la durée d’un stage à temps plein les jours de semaine.
Pourquoi le sarrau blanc ?
« On porte le sarrau blanc pour mettre le gouvernement devant sa propre incohérence. On a appris dans les dernières semaines que les médecins allaient recevoir des immenses hausses salariales alors que nous, on a toujours aucun engagement clair de leur part en ce qui a trait aux stagiaires en enseignement », informe le porte-parole.
Selon lui, s’il est envisageable pour le gouvernement d’attribuer 2 milliards de dollars de plus aux médecins pour leur décerner des augmentations, il devrait aussi être en mesure d’investir 20 millions de dollars supplémentaires pour aider 3 900 stagiaires « qui vivent de la précarité financière ». En guise de comparaison, les 10 médecins spécialistes les mieux payés l’an dernier auraient reçu une rémunération totale de 20 millions de dollars, selon Antoine Côté.
« Les médecins ont l’oreille du gouvernement. S’il faut être médecin pour que le gouvernement nous écoute, on va le porter le sarrau blanc », déclare-t-il finalement.
Du mouvement à l’Assemblée nationale
Mercredi dernier, les représentants de la CRAIES se sont présentés à l’Assemblée nationale sous l’invitation du député de Québec Solidaire Gabriel Nadeau-Dubois. Ce dernier a ainsi profité de l’occasion pour adresser la contradiction qu’il perçoit entre les actions du ministre de l’Éducation, du Loisir et du Sport et son désir de valoriser la profession d’enseignant, soulevé dans son livre paru en février.
« Ce sont les profs de demain. [Ce sont] les gens qui, dans les prochaines années, vont s’occuper de nos enfants, vont les élever, les socialiser, les éduquer. Il y a beaucoup de ces gens-là qui [font déjà] ce travail d’enseignement, et ils le font de manière bénévole. En fait, encore pire : ils le font à leurs frais, parce qu’ils doivent payer leurs frais de scolarité d’un côté, en plus, de travailler à temps plein », déclare Nadeau-Dubois devant les journalistes.
Lorsque confronté en chambre par le député de Gouin à ce propos, le ministre Proulx a réaffirmé sa position en établissant une fois de plus la valorisation de l’enseignement comme priorité, mais n’était pas en mesure de déclarer avant son dépôt que le prochain budget accorderait aux étudiants en éducation les 20,3 millions de dollars nécessaires à la rémunération au dernier stage. Rappelons que ledit budget sera déposé le 27 mars prochain.