Depuis le 1er janvier 2017, les chargé(e)s de cours de l’Université Laval sont sans nouveau contrat de travail. Alors que les négociations perdurent depuis près de deux ans et demi, les deux parties semblent encore loin d’une conclusion dans ce dossier.
«Ça fait plus de deux ans que nous travaillons sous l’ancienne convention collective», explique d’entrée de jeu la présidente du Syndicat des Chargées et Chargés de Cours de l’Université Laval (SCCCUL), Christine Gauthier. En d’autres mots, depuis décembre 2016, les conditions de travail et le salaire n’ont pas évolué pour les membres du syndicat.
Alors que les négociations ont débuté lentement, la présidente du SCCCUL souligne qu’un changement de porte-parole d’un côté de l’administration en janvier 2018 a, depuis, permis une certaine progression, principalement sur des clauses normatives.
Toutefois, la réalité les a vite rattrapés et elle n’hésite pas à dire que les gains réalisés depuis l’automne sont «très minimes».
La Vice-rectrice aux ressources humaines, Lyne Bouchard, rétorque que la convention collective des chargé-es de cours est la plus complexe à l’Université Laval. «Les demandes étaient vastes et nous ont amenés à rouvrir presque toute la convention», explique-t-elle.
«Au contraire, moi j’ai plutôt tendance à penser que c’est de montrer du respect à des employés que de prendre le temps de s’assoir avec leurs représentants pour vraiment remettre en question la convention collective», estime la Vice-rectrice, désirant ainsi bien comprendre la réalité des chargé-es de cours.
Obtenir une convention mieux adaptée
La grande majorité des 1 600 membres du SCCCUL estime que l’ancienne convention ne répond plus aux conditions de travail d’aujourd’hui. L’omniprésence des cours à distance, des cours hybrides ou du co-enseignement à l’Université Laval a fondamentalement modifié les conditions de travail des chargé-es de cours.
«Dans une situation de très grand groupe, en quoi sommes-nous en mesure de bien faire notre travail lorsqu’il y a une surcharge de travail qui est générée ?», questionne Christine Gauthier, en expliquant qu’à distance, l’accompagnement est plus individualisé, ce qui demande un travail plus important.
Un salaire en dessous de la moyenne ?
«Nous sommes les moins bien payés au Québec. C’est révélateur d’une injustice que nos membres décrient», affirme la Chargée de cours au Département des fondements et pratiques en éducation.
«Les membres nous disent, comment ça se fait qu’une université l’autre bord de la rive, à 20 km , un chargé de cours gagne 10 000 $ alors que moi j’en gagne 8 724 $ ? Ça soulève des questions. Parce que la Grande Université Laval, on s’entend, comment ça se fait que la Grande Université Laval n’est pas capable d’offrir un salaire au moins comparable à ce que les autres universités offrent à leurs chargés de cours ?», questionne Mme Gauthier.
L’administration ne partage pas la position du syndicat en ce qui concerne l’enjeu salarial, mentionnant que le montant se rapproche des «universités comparables». Néanmoins, le syndicat devrait être en mesure d’obtenir une augmentation pour ses membres. «Les salaires n’ont pas été indexés depuis 2016, c’est sûr qu’il va y avoir des augmentations», confirme Lyne Bouchard en laissant savoir que ces dernières seront négociées dans les prochaines semaines.
«Il faut aussi noter que le ministère de l’Éducation accorde une augmentation salariale de 0 % à l’Université Laval dans sa subvention », soulève la Vice-rectrice affirmant par le fait même que l’administration doit demeurer réaliste dans sa capacité à payer.
La clause réserve
L’un des objectifs du SCCCUL dans cette négociation est de renforcer le lien d’emploi. Pour ce faire, le syndicat demande une révision à la baisse de la clause réserve. Cette clause permet aux facultés de réserver un pourcentage de leurs cours (actuellement établie à 14 %) pour des étudiant-es ou des professeur-es invité-es par exemple. Les cours compris dans la réserve ne sont donc pas accessibles aux chargé-es de cours.
Les deux parties semblent loin d’une entente puisque du côté de l’administration, on désire augmenter cette clause à 15 %, alors qu’on demande une baisse à 10 % du côté du SCCCUL, incluant un pourcentage réservé aux étudiant-es.
Les négociations sur cet enjeu risquent d’être difficiles considérant la position claire de l’Université Laval. «Dans la formation d’un-e étudiant-e au doctorat, il faut l’exposer à l’enseignement dans une salle de cours. Pour nous, ça fait partie de notre mission d’offrir ces opportunités-là», réplique Lyne Bouchard soulignant aussi l’importance des collaborations avec des professeur-es d’autres universités pour développer la recherche.
Liste des principales demandes syndicales du SCCCUL
- Une convention encadrant tous les types de cours.
- Des PECC aux exigences raisonnables et un processus d’attribution limitant l’arbitraire.
- Protéger l’accès au travail et renforcer le lien d’emploi.
- Une distinction claire entre «évaluation administrative» et «mesures disciplinaires», et un meilleur soutien des directions d’unités.
- Des conditions de travail mieux adaptées à la taille des groupes et aux nouvelles pédagogies
- Une rémunération équitable
Des prochains mois cruciaux
Pour la présidente du syndicat, la question est maintenant de savoir comment faire pour que la négociation avec les chargé-es de cours devienne une priorité pour l’administration.
D’abord, les membres du syndicat se sont prononcés en faveur d’une augmentation des moyens de pression. «Si l’employeur refuse de répondre à nos demandes importantes, on va être face à des décisions, est-ce qu’on se mobilise davantage ? C’est le son de cloche qu’on a», témoigne Christine Gauthier.
Elle demeure toutefois confiante que le SCCCUL et l’administration lavalloise parviendront à ratifier une entente dans un futur proche, du moins, elle l’espère.
La Vice-rectrice aux ressources humaines souligne, quant à elle, le travail très vigoureux effectué par le syndicat et son désir de continuer à cheminer vers une entente. «J’espère sincèrement, pour le bien de nos étudiants et même de nos chargé-es de cours, qu’on va éviter une grève », conclut Lyne Bouchard.