En opposition au projet de loi 20, les étudiants en médecine de l’Université Laval pourraient voter une levée de cours d’une journée, le 30 mars prochain, pour se joindre aux autres étudiants en médecine de la province qui iront manifester devant l’Assemblée nationale.
Le référendum électronique se tiendra le 27 mars, selon les informations du Regroupement des étudiants en médecine de l’Université Laval (RÉMUL). Les étudiants de l’Université de Montréal (UdeM) ont déjà voté pour un débrayage le 30 avril. « On attend aussi le vote de Sherbrooke et McGill », indique Jessica Ruel-Laliberté, présidente du RÉMUL.
La représentante des étudiants en médecine explique être en accord avec « l’idéologie » derrière le projet de loi 20, qui est d’améliorer l’accès des patients aux médecins. Cependant, selon le RÉMUL, l’imposition de pénalités financières pour les médecins qui ne respectent pas les quotas de patients « ne devrait pas être le moyen choisi, car cela est trop contraignant et coercitif ».
« C’est un projet de loi qui touche de près nos étudiants parce que cela va remodeler et contraindre la pratique de la médecine familiale en enlevant de la diversité de pratique », déclare Jessica Ruel-Laliberté. Alors qu’actuellement, les médecins de famille peuvent faire de l’hospitalisation, des soins palliatifs, de l’urgence, ou encore de la pédiatrie, en plus de faire de la pratique de bureau, le projet de loi 20 les oblige à voir un certain nombre de patients. « Et en ayant par exemple 1000 patients à leur nom, les médecins auront beaucoup moins de temps pour faire autre chose. […] Alors si on se ramasse à ne faire que du bureau pour atteindre le quota, c’est sûr que nos étudiants ne voudront plus aller en médecine familiale », estime la présidente du RÉMUL.
La qualité de l’enseignement en question
« Un 2e point qui nous inquiète énormément dans les universités, c’est que plus de 50 % des médecins qui nous enseignent sont des médecins de famille. Or, le projet de loi 20 ne prévoit rien pour l’enseignement. Le quota de patients ne sera pas diminué pour le médecin enseignant », poursuit Jessica. Selon elle, les médecins enseignants vont manquer de temps et risquent d’annuler leurs charges de cours : « Il y a déjà des médecins enseignants qui ont contacté la Faculté de médecine pour dire que si le projet de loi passe, ils vont s’en aller. Dans les autres universités, certains ont déjà démissionné. »
« C’est une grande crainte pour nous de voir des enseignants partir. Cela diminuerait la qualité de l’enseignement ou augmenterait nos groupes de cours », commente la présidente du RÉMUL.
Un projet de loi qui dérange les doyens
Les doyens des facultés de médecine du Québec ont également formulé leur désaccord à l’encontre du projet de loi 20 dans sa formulation actuelle. « Nous sommes en accord avec les objectifs d’amélioration de l’accès et du suivi. Ce qu’on dit, c’est que le traitement est plus dangereux que la maladie actuellement », précise Dr Rénald Bergeron, doyen de la Faculté de médecine de l’Université Laval.
« Nous, dans le milieu universitaire, que toute la population ait accès à des services, c’est notre premier désir ! On forme les médecins pour cela. On n’est pas contre cet objectif-là, au contraire. […] Mais c’est davantage par concertation et coopération qu’on va y arriver plus que par coercition », argumente Dr Bergeron.
Selon lui, le projet de loi tel qu’il est présenté reste tout à fait silencieux sur le rôle des milieux d’enseignement et des impacts des transformations proposées sur ces milieux : « Les mesures qui sont annoncées dans le projet de loi nous mettent en danger comme réseau d’enseignement clinique et de recherche. […] Les médecins enseignants ne voient pas comment ils vont pouvoir répondre aux objectifs de la loi et continuer à participer à l’enseignement. »
[Mise à jour] Les étudiants des facultés de médecine de l’Université de Montréal, de McGill et de Sherbrooke ont quant à eux déjà voté en faveur d’une levée de cours pour la journée du 30 mars.