Le Comité Logement d’aide de Québec Ouest conduit en ce moment une enquête pour mieux comprendre la crise du logement dans l’ouest de la ville. Charles-Olivier P. Carrier est organisateur communautaire au CLAQO. Pour lui, la proportion « famélique » de logements sociaux n’est qu’un seul des enjeux auxquels l’arrondissement fait face.
Antoine Morin-Racine, chef de pupitre aux actualités
Actif depuis plus de 20 ans, le CLAQO est l’un des rares organismes pour le droit au logement en dehors du centre-ville. Afin d’avoir une connaissance encore plus fine de leur secteur, le comité a récemment commencé à conduire une enquête sur le logement locatif dans l’arrondissement Ste-Foy.
Celle-ci comporte notamment des questions sur la proportion du revenu accordé au loyer, la relation locataire-propriétaire et l’état des logements. Le sondage tentera également de s’informer à propos des possibles expériences des répondant.es au tribunal administratif du logement ainsi qu’à de possibles expériences de discrimination.
Outre la collecte d’information, l’enquête aura également pour but de mieux orienter l’action du comité sur le terrain dans les années à venir. Le comité ayant été handicapé par un changement d’équipe durant la pandémie, les suites serviront de tremplin pour la reprise de leur travail politique. Les résultats seront dévoilés lors d’une soirée discussion le 30 novembre prochain à 19h au centre Claude Allare.
Sainte-Foy : Un arrondissement à plusieurs visages
Avec un volume d’appel qui a triplé cette année selon les organisateurs, le sondage viendra surtout préciser ce qui se voit déjà sur le terrain. Le Front d’Action populaire en réaménagement urbain (FRAPRU) produit à chaque recensement un « dossier noir » du logement au Québec. Le plus récent a révélé que 45.2% des locataires de Sainte-Foy dédient entre 30% et 80% ou plus de leurs revenus au logement.
Malgré la réputation de banlieue plus aisée de Sainte-Foy et ses environs, M. P. Carrier tient à mentionner qu’il s’agit d’une idée préconçue : « Ce n’est pas vrai du tout. … À Sainte-Foy, il y a des locataires. Il y a de la pauvreté. » Selon les chiffres du FRAPRU, 58% des ménages de l’arrondissement sont des locataires, une proportion 10% plus haute que celle de la Capitale-Nationale dans son ensemble.
De tous les problèmes du secteur, « l’explosion des nouveaux développements » est en un qui exacerbe particulièrement la crise depuis les dernières années.. Envoutés par le projet de tramway et la transformation de résidences pour ainé.es en condos de luxe, ces développements sont souvent inaccessibles financièrement aux locataires du quartier. M. Carrier n’hésite pas à les décrire comme une « pression embourgeoisante ».
Pour lui, Sainte-Foy affiche l’un des taux d’inoccupation les plus élevés à Québec, précisément à cause de ce genre de projets.
Les tactiques de « rénoviction » et de reprise par le propriétaire se sont également invitées dans l’arrondissement. Des phénomènes relativement nouveaux chez les propriétaires individuels locaux selon le CLAQO.
Des étudiant.es mais pas que
Avec la présence de la Cité universitaire, on considère souvent les étudiant.es comme constituant la grande majorité des locataires de Sainte-Foy. Même si leur présence est importante, M. Carrier tient à rectifier ce « cliché ».
Sainte-Foy est notamment l’un des pôles d’immigration les plus importants de la ville. Celleux-ci habitent souvent dans des logements trop petits et sont également susceptibles de faire face à de la discrimination.
Les personnes âgées figurent également fortement dans la population de locataires que dessert le CLAQO. « Les gens veulent rester dans Sainte-Foy », témoigne M. Carrier.
Comme avec les étudiant.es et les personnes immigrantes, les propriétaires profiteront souvent de leur précarité et de la méconnaissance de leurs droits. « Quand ils voient quelqu’un comme ça, les propriétaires sentent le sang dans l’eau et décident souvent d’envoyer les « gros bras », confie-t-il.
Effets locaux d’une crise nationale
Pour M. Carrier, il ne fait pas de doute que l’ensemble des problèmes de logements de Sainte-Foy sont le résultat d’une crise « multifactorielle » plus grande.
Il souligne l’arrêt complet de réinvestissement dans le logement social depuis 2019 par le gouvernement de la CAQ comme facteur clé à la crise du logement. Pour lui, cela explique en partie la diminution marquée de logements abordables dans la province. « La seule solution pour le logement abordable c’est l’investissement [dans le logement social] », affirme-t-il.