Critique littéraire : Nu

Foutre, fente, fuck

Nu

Collectif dirigé par Stéphane Dompierre

Québec Amérique

Ça commence doucement. D’abord, on le déshabille, puis on découvre sa peau rougie par l’envie. Il sent bon. On le caresse du bout des doigts et il s’écarte lentement. On plonge le nez dans sa chair. Il tremble, il nous dit des belles choses. On le regarde et il est Nu, le recueil de nouvelles érotiques du collectif d’auteurs dirigé par Stéphane Dompierre.

Et Nu continue le coït, un peu moins doucement avec des histoires charmantes et vives. On se retrouve en plein soir de tempête avec une inconnue prenant sa douche avec Un glaçon entre les dents de Charles Bolduc. Plus tard, on est l’élève d’un beau et blond professeur d’équitation avec Chasseurs Sauteurs de Marie-Hélène Poitras. Un peu après, on retombe dans son amour d’il y a six mois, par un bout de peau, sur un banc de parc avec C’était au printemps, t’en souviens-tu? de Nancy B. Pilon.

Nu poursuit plus rudement avec des histoires provocantes, presque choquantes. On paye 4 995$ pour se faire sauter par on ne sait qui, quelque part au Nouveau-Mexique, avec La Fente d’Isabelle Massé. On suce des gardiens avec son amie pour aller voir un show de Dead Obies avant de finir la soirée en trip à trois avec Opération Commando de Miléna Babin. On s’introduit dans le Québec tout entier à la recherche de la baise de sa vie, celle aux mouvements de bassin circulaires avec Baise fondatrice de Patrick Senécal.

Et puis, Nu termine très profondément avec des histoires de remises en question. On a des envies pour le masseur cliché des tout inclus et pour une « douchebag » au maillot Budweiser avec Punta Cana mon amour de Geneviève Jannelle. On écoute les leçons d’un inconnu qui nous apprend à nous masturber quelques heures avant la fin du monde avec Quelques heures avant la fin, ou le potentiel de Juliette de Sophie Bienvenu.

Le recueil propose d’exciter autrement par une tentation recherchée, une quête de désir moderne et de sensations nouvelles. Les images défilent dans la tête, pas sur l’écran d’un portable. Peu importe le HD, on les découvre bien plus claires et plus efficaces lorsqu’elles sont construites à même le crâne. Encore mieux, ces images ne lassent pas : toujours offertes différemment, parce qu’il y a autant de façon d’écrire une baise qu’il y a d’auteurs.

Si le vocabulaire est parfois redondant – parce qu’il n’y a pas trente mille façon de dire « foutre », « fente », « fuck » – , il n’irrite pas trop, faute peut-être de concentrer l’attention sur autre chose.

Nu, un recueil québécois de nouvelles érotiques, unit des auteurs émergents et d’expérience, des histoires de tous les goûts et de la prose pour éveiller l’envie. Inutile de dire que le livre se lit d’une seule main…

4/5

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