Du 18 au 29 janvier se tiendra en ligne la septième édition du Festival Plein(s) Écran(s). Le concept est simple : chaque jour, pendant 24 heures, il vous sera possible de visionner des courts-métrages de toutes sortes. C’est donc plus d’une quarantaine de films qui seront présentés durant le festival. Pour l’occasion, différent.es journalistes d’Impact Campus proposent de vous présenter certains de ces courts-métrages, présentations ponctuées de nos réflexions, et ce, jusqu’à la fin du festival. Nous reprenons, à une exception près, la formule de l’année dernière. Cette fois, une pluralité de journalistes et d’angles d’approches vous accompagneront, manière de pocéder qui, si elle semble tendre vers l’éparpillement, est représentative de la divesité des propositions et de l’étendue des publics rencontrés : fictions, films d’animation, documentaires, toustes y trouveront leur compte. Nous vous encourageons grandement à y jeter un coup d’œil : c’est un événement important, qui contribue à la démocratisation de l’art cinématographique.
Pour participer au Festival Plein(s) Écran(s), rien de plus simple : l’événement est gratuit et disponible à toustes. Vous n’avez qu’à vous rendre sur leur page Facebook (ici) ou Instagram (ici). Sinon, sachez que les courts-métrages seront disponibles directement sur leur page web : https://pleinsecrans.com/
Légende (telle qu’établie par le Festival)
Ça déménage ! : ça brasse en tabarouette
Ça surprend : ta matante dirait « c’est spéciaaaaaal »
Ça va mal à shop… : et ça chatouille tes feels
Ça te replace les chakras : aussi efficace qu’une thérapie
22 janvier – Frédérik Dompierre-Beaulieu, cheffe de pupitre aux arts
Souvenir, souvenir (15 minutes) – Coup de coeur
Réalisation: Bastien Dubois | Mood: Ça va mal à shop…
Synopsis: Bastien veut faire parler son grand-père sur la guerre d’Algérie, mais n’est peut-être pas prêt à entendre ce qu’il a à dire.
Avis: Dans ce court-métrage d’animation, Bastien aborde les traumas familiaux et le rapport à la honte que peuvent entretenir différentes générations. En tentant de restituer l’histoire de son grand-père et son expérience lors de la guerre d’Algérie, il interroge de manière très sensible le meilleur moyen de mettre en récit l’indicible, ce matériau auquel il tente de donner un sens plus qu’il ne se penche sur l’histoire de la guerre elle-même. Soutenu par une alternance des esthétiques et un rendu visuel frappant, Souvenir, souvenir donne à voir la complexité des filiations tant collectives qu’intimes, un trait et une rencontre à la fois.
Colza (5 minutes)
Réalisation: Victor Chagniot, Camille Broutin, Matthieu Dores, Victoria De Millo Gregory, Maxime Jouniot et Jade Khoo | Mood: Ça te replace les chakras
Synopsis: Alors que le village assiste au plus grand concert qu’il n’ait jamais vu, une jeune lézarde nommée Clarence vole un précieux avion en papier.
Avis: En quelques minutes seulement, les réalisateur.rices réussissent à mettre en place un univers fictionnel intéressant, enveloppant et, malgré la brièveté du court-métrage, complet. Les personnages et le récit m’ont tout de suite accrochée et m’ont certainement donné l’envie d’en visionner davantage. Touchant, Colza ne fait toutefois pas dans le drame, et prend plutôt le pari de la solidarité, de l’envol (littéralement) et de l’émerveillement.
Chiatura (16 minutes)
Réalisation: Toby Andris | Mood: Ça déménage !
Synopsis: Après la mort de son mari dans une mine de Géorgie, une opératrice de téléphérique se lance dans une guerre personnelle contre la ville.
Avis: C’est d’abord lors de la 11e édition du Festival de cinéma de la ville de Québec en septembre dernier que j’avais eu l’occasion de visionner Chiatura, présenté dans la catégorie Récits du monde. Mon avis n’a pas changé depuis : ce récit en est un du deuil, de la dernière chance, de l’après-coup, et plus encore de la résistance, comme autant d’outils pour confronter non pas la mort, mais ce qui s’en suit. Pour soi, et pour toustes les autres, surtout. Un récit vrai qui réussit à mettre en échec l’impuissance et qui vous donnera probablement envie, vous aussi, de lever le poing.
Duos (22 minutes)
Réalisation : Marion Defer | Mood: Ça surprend
Synopsis: Un couple de vagabonds s’introduit dans une maison. Quand les propriétaires rentrent plus tôt que prévu, les intrus font une étonnante rencontre.
Avis: Wow. Je ne vous en dévoilerai pas trop, parce que, comme le festival l’indique avec le mood du court-métrage, ça surprend. Proposition très ingénieuse qu’est celle de Marion Defer. On y rencontre deux personnages s’étant malgré elleux résilié.es à un mode de vie usurpatoire et qui choisissent de se laisser porter par ces existences qui ne sont pas les leurs. Iels se retrouvent confronté.es à leur solitude et à ce qu’iels auraient pu devenir grâce à un jeu de posture et de miroir qui, s’il donne lieu a quelques instants comique de soulagement, vous pincera tout autant le cœur.
23 janvier – Frédérik Dompierre-Beaulieu, cheffe de pupitre aux arts
Aska (14 minutes)
Réalisation: Clara Milo | Mood: Ça surprend
Synopsis: Deux jeunes soeurs doivent jeter les cendres de leur mère dans la bouche d’un volcan afin d’empêcher son éveil.
Avis: Tout comme Chiatura, j’avais précédemment visionné ce court-métrage lors de la dernière édition du Festival de cinéma de la ville de Québec, lui aussi dans la catégorie Récits du monde. Aska, avec ses images en noir et blanc et son esthétique saturée, renouvelle les représentations du plus grand que soi, de ce qui nous dépasse, et ce, grâce à une sororité bordée par l’intuition, la communion et le sacré et s’incarnant notamment dans la gestuelle et la corporalité.
10 femmes au téléphone (11 minutes) – Coup de coeur
Réalisation: Julie Roy | Mood: Ça déménage !
Synopsis: Dix femmes sont reliées par une chaîne téléphonique. Quand l’une d’elles manque à l’appel, elles s’organisent pour la retrouver.
Avis: Comme j’ai aimé ce court-métrage. 10 femmes au téléphone, c’est dix tableaux, dix portraits éclatés, tous meilleurs les uns que les autres. Bien ancré dans l’ordinaire et le quotidien en poussant pourtant bien au bout les types et figures exploitées, ce film de Julie Roy m’a agréablement surprise, d’une part par son scénario original et, d’autre part, par sa manière de le mettre à l’écran en présentant, en onze minutes, ces perspectives et leur toile un peu loufoques. Pour tout vous dire, je n’ai pu m’empêcher de le visionner encore quelques fois. Certain.es crieront au zèle, moi j’appelle ça profiter à fond des merveilles que ce festival a à nous offrir. Tout simplement succulent (et un peu dithyrambique comme avis, tout de même).
Prison of the sun (7 minutes)
Réalisation: Kaveh Nabatian | Mood: Ça te replace les chakras
Synopsis: Une réaction à la pandémie et à l’agitation sociale, racontée par le “waacking”, une danse de rue interprétée par Axelle Munezero.
Avis: Initialement en noir et blanc, Prison of the sun dévoile graduellement ses couleurs, au fil des changements de plans qui, à certains moments, doublent le mouvement et semblent intégrés à la chorégraphie. Alors que le court-métrage se termine sur la révélation du visage de l’interprète qui nous regarde droit dans les yeux, sa plus grande qualité demeure sa capacité à mettre à l’avant plan la richesse du style de danse à l’honneur en nous montrant comment, au-delà de son caractère et de son vocabulaire pétillants et entraînants, il peut revêtir des formes nouvelles, être nuancé et, surtout, raconter. Une belle réussite tant pour Kaveh Nabatian que pour Axelle Munezero, icône et référence de la scène du hip-hop et du waacking au Québec.
In the jam jar (13 minutes)
Réalisation: Colin Nixon | Mood: Ça va mal à shop…
Synopsis: Un regard dans l’intimité des derniers jours de Joan, dont les rêveries sur la mort résonnent silencieusement avec celles de son fils.
Avis: C’est dans la thématique de l’amour maternel que nous fait ici plonger Colin Nixon. Si la présentation des scènes dans un cercle nous force à regarder autrement et nous donne l’impression d’épier, ce resserrement du focus sur l’essentiel nous oblige également à nous concentrer davantage sur les voix de la narration et nous invite à combler les manques. Par ce dialogue entre une mère et son fils, la distance et le vide laissés par la mort et le deuil semblent être réduits, de sortes que l’échange puisse, le temps d’un pot de confiture, faire revivre leur relation.
24 janvier – Frédérik Dompierre-Beaulieu, cheffe de pupitre aux arts
In Foetu (6 minutes)
Réalisation: Jacob Khayat | Mood: Ça déménage !
Synopsis: Deux jeunes frères se font garder par leur grand-mère. À l’heure du bain, un jeu innocent transformera la famille à jamais.
Avis: Court, mais Ô combien efficace. J’ai bien apprécié ces plans qui, en une seule séquence, montraient ces actions banales en simultané et nous laissaient dans l’attente du couperet. Sorte de clin d’œil – volontaire ou non – à L’orangeraie de Larry Tremblay, In foetu sait saisir et bouleverser son auditoire et vous laissera assurément avec un drôle de goût en bouche.
III (11 minutes)
Réalisation: Salomé Villeneuve | Mood: Ça va mal à shop…
Synopsis: Par une chaude journée d’été sur la rive d’un lac, trois frères et sœurs sont confrontés pour la première fois à la mort.
Avis: Avare de dialogues, ce premier court-métrage de Salomé Villeneuve fait dans la simplicité. Ce récit raconte l’intensité, mais également l’ambivalence et l’ambiguïté des liens fraternels – ou plutôt des liens aldephiques, si l’on souhaite être plus inclusif.ve. La réalisatrice y enchaîne autant d’images sensibles qui tendent aussi à montrer la relation entretenue avec la nature et témoignent de l’attention portée aux détails de la part de la réalisatrice. Une incursion caniculaire dans l’univers des souvenirs d’enfance.
Les terrains vagues (5 minutes)
Réalisation:Marie-Ève Drolet | Mood: Ça te replace les chakras
Synopsis: Une conversation libre sur les modèles et idées préconçus qui impactent nos façons de vivre la sexualité.
Avis: Décortiquer le vaste spectre de la sexualité et des relations, voilà ce que met ici en œuvre Marie-Ève Drolet. La narration polyphonique lève le voile sur ces expériences singulières afin de mieux en comprendre l’épaisseur et la complexité dans une perspective jeune et actuelle. Empruntant au témoignage, ce court-métrage et ses jeux visuels attirent tout en douceur l’attention sur ces préoccupations qui, heureusement, gagnent de plus en plus en visibilité et en légitimité.
Sikiitu (26 minutes)
Réalisation: Gabriel Allard Gagnon | Mood: Ça surprend
Synopsis: Ali, un adolescent inuit fan de hip hop, voit tous ses problèmes se matérialiser dans la vieille motoneige de son père, constamment en panne.
Avis: À la limite du documentaire et de la fiction – sorte de marque du réalisateur -, Sikiitu témoigne des difficultés rencontrées à l’adolescence, dans le cas présent au sein de la relation entre un père et son fils. Exaspéré par les défis rencontrés, Ali s’en remet au hip-hop en s’identifiant à son idole de rap, qui finira d’ailleurs par venir le hanter. L’immersion sensible dans cette communauté inuit du Nunavik relève autant de la quête identitaire et du rapport à la culture et aux origines que du clash générationnel.
Photos fournies par le Festival Plein(s) Écran(s)