Photo : Bandcamp

De la renaissance au triomphe pour Blaze Velluto

C’était mercredi dernier une occasion de renouveau et de mystérieux retour en arrière aux Pantoum alors qu’on assistait à la soirée de seconde naissance de l’album Weatherman par The Blaze Velluto Collection, maintenant sous l’aile de l’étiquette montréalaise Dare to Care Records. Un relancement, ce n’est pas chose vue tous les jours, et il faut la faire en grand.

Arrivés sur place avec un adorable chien, la Blaze Velluto Collection a su installer dès ses premières notes une ambiance intime et chaleureuse dans les murs du Pantoum.

Formule légèrement épuisée

Mais d’abord, armées de guitares acoustiques, d’un banjo et d’une valise en guise de grosse caisse, les Johans nous offrent une folk-pop assez traditionnelle pour ouvrir la soirée. On entend dans leurs chansons de fortes traces des Hay Babies, malheureusement sans le charisme et l’humour caractérisant le trio acadien, ou encore d’une Lisa Leblanc qui se prendrait trop au sérieux. Le projet est anglophone malgré l’origine locale d’Émilie Rochette et la forte appartenance saguenéenne de Cynthia Larouche, qui va jusqu’à demander à trois reprises si des spectateurs partagent son héritage, sans réponse. Bien qu’on comprenne l’association voulue avec le country et le bluegrass, la prononciation anglaise, un peu maladroite, serait à travailler.

Malgré une belle sensibilité dans les voix, il est difficile de passer par-dessus l’aspect monotone et répétitif des compositions. À plusieurs moments de la soirée, on arrive à sincèrement se demander si elles n’ont pas joué deux fois la même pièce. Le tout devient un peu plus intéressant quand le banjo est remplacé par une guitare acoustique « électrisée », mais on reste tout de même dans un faux-americana assez laborieux.

Entourées d’un accompagnement plus complet, comme elles l’ont fait sur leur EP 56/62, on pourrait croire que les musiciennes auraient plus à offrir en spectacle et qu’elles pourraient dépasser l’aspect égal de la prestation de mercredi. Une reprise de « …Baby One More Time » vient changer un peu la donne, mais le registre vocal des deux chanteuses ne se prête pas particulièrement à l’énergie débordante de la pièce de Britney Spears.

Si les filles ne faisaient pas de la musique depuis 2015 déjà, on pourrait donner une note d’espoir pour un projet amateur, mais considérant leur expérience de composition, il est impératif pour le duo d’injecter un peu de nouveau dans la formule. Le projet aura au moins servi à rendre la performance de la Blaze Velluto Collection encore plus électrisante par comparaison.

Un indiscutable triomphe

Le sextuor de Blaze Velluto s’empare en effet de la scène comme s’ils y étaient nés (ou re-nés?). Ils nous rappellent efficacement qu’ils ont produit, en 2017, un des meilleurs albums de psych pop des dernières années. Nicholas Jenkins, alias Blaze Velluto, s’impose dès la première pièce, Poetry for a Picture, avec sa voix douce mais contrôlée. La voix de sa comparse Kathleen Roy avec ses accents du Sud des États-Unis, complimente à merveille les compositions de Velluto et leur tourbillon d’influences autant vintages que contemporaines.

Dans Marjoram, des pianos électriques géniaux combinés à un surprenant solo d’harmonica, qui réussit à être rafraichissant malgré la connotation vieillie de l’instrument, remplacent le fuzz-folk de l’enregistrement studio et prouvent que le groupe a fait un travail de réinvention pour ce second lancement. Les rengaines presque western, comme Morning Dew deviennent encore plus dynamiques en spectacle et font danser le public, qui semble parfois avoir besoin d’un petit coup de pouce des musiciens pour arrêter de parler. La magnifique et sensible Pondicherri est particulièrement embrouillée par les discussions incessantes de la foule, mais le calme revient alors que presque tous les bavardeurs entonnent en cœur We’re Gonna Take You Out avec le groupe.

Les éléments musicaux réussis se combinent et se chevauchent, que ce soit la fin jam rock à la Grateful Dead de Marjoram, les agréables flutes à bec (oui, c’est possible!) dans le solo de guitare acoustique fuzzée de Weatherman, la groove inépuisable de M. Coyote, la douce bossa nova claire obscure et l’incroyable solo de clarinette de Dingo Dingo. Les musiciens et musiciennes entourant Velluto transportent les spectateurs dans l’univers presque cinématographique des compositions de l’artiste de Québec. Un triomphe indiscutable qui nous fait oublier le début de soirée maladroit et sortir du Pantoum avec un sourire ineffaçable au visage.

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