Robert De Niro s’invite à Québec !

Entre show surréaliste et stand-up humoristique, You’re talking to me nous plonge dans l’imaginaire de son seul et unique personnage – un peu dérangé et à l’anxiété sociale handicapante. Cette nouvelle production du Collectif de la Tanière est à l’affiche du Premier Acte, et ce, jusqu’au 11 mai.

Par Camille Sainson, journaliste multiplateforme

Si la scène théâtrale de Québec est diverse et variée – pour notre plus grand plaisir – il est rare d’assister à des représentations portées par un.e seul.e acteur.rice. Véritable coup de poker puisque la pièce ne repose que sur deux épaules, l’interprète doit vite nous convaincre et nous embarquer dans son histoire. C’est donc un pari réussi pour Juan Arango qui parvient immédiatement à faire rire l’assemblée. Son talent d’imitateur est indéniable, mais il est également touchant dans sa fragilité, ce qui ne le rend que plus humain à nos yeux.

Jeune adulte en quête d’identité, notre personnage se retrouve empêtré dans des situations sociales dont il n’arrive à s’extirper que grâce à ses imitations. Jim Carrey, Matthew Mcconaughey, Sylvester Stallone, Joe Pesci, c’est tout Hollywood qui s’agglomère sur cette petite scène ! Le rythme s’accélère, Juan Arango passe du français à l’anglais avec une fluidité déroutante, nous assistons presque à une conversation aux multiples personnages ! Puis le tempo décélère, nous découvrons le cœur du problème : l’impossibilité pour Juan d’accepter l’invitation d’une jolie fille. Son handicap est son pire ennemi. Seul moyen de le vaincre ? Devenir quelqu’un d’autre. Et qui de mieux que Robert De Niro pour s’essayer à la vie de célébrité ?

Malheureusement, tout n’est pas rose lorsqu’un serveur ou un vendeur dans un dépanneur reconnaissent le visage de De Niro et veulent absolument un selfie avec lui ! Le retour à la réalité est donc un véritable chemin de croix vers l’acceptation de soi afin de recouvrer un peu d’estime personnelle ! Le fil rouge permettant ce retour n’est autre qu’une Arianne mystérieuse, symbole du regard de l’autre, tout en gentillesse et bienveillance.

La mise en scène de Christian Fortin est prolifique et multidisciplinaire, le décor est maximaliste où tout objet a son utilité. Entre projections visuelles, jeux de lumière, et musique, nous nous sentons bel et bien plongé.es dans un film ! La fin est même racontée sous forme de storyboard, on adore le concept.

Finalement, nous observons quelques longueurs et redondances dans les dernières scènes, mais cela ne gâche en rien notre plaisir global. You’re talking to me explore avec justesse les complexes d’un homme moderne aux accents parfois peréciens dans un huis clos mental délirant et pose la question de la place de la pop culture dans nos vies. Est-elle notre amie ou notre ennemie ? À vous de juger.

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