Au fil de mes chroniques internationales dans Impact Campus, j’ai pu approfondir et partager ma passion pour l’actualité internationale. Depuis plus d’un an et demi, les méandres de la nouvelle m’ont conduit à écrire sur des enjeux de l’Europe à la Chine, du Proche-Orient à l’Amérique du Sud. Si les destinations se suivent et ne se ressemblent pas, la curiosité m’a toujours mené à chercher à comprendre des enjeux qui m’étaient a priori inconnus. Voilà comment j’en suis venu à m’intéresser au continent mal connu par excellence, du moins du Québécois lambda : l’Afrique.
L’actualité internationale présentée par les médias québécois, et nord-américains en général, ne fait pas la part belle aux États africains. Ces pays du « tiers-monde » pendant la guerre froide (par opposition aux deux pôles, soviétique et américain) se sont vus souvent être relégués au second plan de l’information internationale. Même après la chute du mur de Berlin, l’œil médiatique des années 1990 et 2000 était plutôt posé sur l’embrasement du Moyen-Orient, l’économie de l’Union européenne, ou tantôt sur l’essor économique chinois comme concurrent potentiel à l’hégémonie américaine. On en est presque venu à oublier que le « tiers-monde » du 20e siècle existe toujours, et qu’il pourrait même être au cœur des prochains enjeux internationaux. Voyons ainsi pourquoi, cette année, nous entendrons parler de l’Afrique.
Mali et Centrafrique : la France au combat
Mon séjour au Sénégal, à l’été 2013, a coïncidé avec la visite officielle du président américain Barack Obama à Dakar. Sa seule présence en Afrique de l’Ouest a induit un message clair : l’Afrique prend de l’importance dans la géopolitique internationale. Ainsi commence-t-on à découvrir que l’arrière-pays africain, si longtemps oublié, est un terrain fertile à la progression de l’islam radical et des groupes terroristes transnationaux. En effet, quelques mois plus tôt, le président français François Hollande avait déployé quelque 4000 soldats au Mali, tout proche. Le pays, partiellement occupé par des groupes indépendantistes touaregs et des islamistes proches d’Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI), était au bord de l’éclatement. En novembre, la France récidive en s’impliquant militairement dans un autre pays africain en déroute : la République centrafricaine.
Au moment de célébrer le réveillon du Nouvel An 2014, deux distinctes opérations militaires étrangères majeures sont en cours sur le continent africain par la France et ses alliés. Doit-on voir cette ingérence occidentale comme une action humaniste, voire courageuse dans un climat international apathique, ou au contraire un geste intéressé par les intérêts stratégiques et économiques? Après plus d’un an, l’opération française « Serval » au Mali (lancée le 11 janvier 2013) risque-t-elle de s’embourber et de voir ses coûts exploser, comme avant elle les interventions en Irak et en Afghanistan? Chose certaine, la page d’histoire qui est en train de s’écrire déterminera dans quelle mesure les pays occidentaux peuvent (ou doivent) agir dans des situations similaires. À suivre.
Soudan du Sud, le rendez-vous raté avec l’histoire
Après les violences qui ont ravagé le Nord-Kivu, en République démocratique du Congo (RDC), c’est maintenant au tour de son voisin du nord de s’enflammer. Le dernier-né des États du monde, le Soudan du Sud, résultat d’un référendum pacifique mené en 2011, vit une grave crise politique et humanitaire. Les affrontements, signés d’un conflit ethnique exacerbé par le contrôle sur les ressources pétrolières, ont produit leurs premiers massacres. Déjà, de nombreux observateurs appellent la communauté internationale à la rescousse pour stopper ces violences ethniques. Une puissance occidentale voudrait-elle faire comme la France au Mali ou en Centrafrique?
La transition ratée du Soudan du Sud vers un État souverain pacifique est d’autant plus dommage qu’il s’agit du premier État africain dont le tracé des frontières n’a pas été imposé par une puissance coloniale. En effets, les pays africains se sont entendus en 1964 pour ne pas remettre en cause le tracé des frontières (principe de l’intangibilité des frontières), malgré que ces limites aient historiquement divisé les peuples et les nations qui occupaient autrefois le territoire. Or c’est justement cette nouvelle frontière, celle entre l’ancien Soudan et le Soudan du Sud, qui est à l’origine des troubles : elle traverse un lucratif champ de pétrole. La ressource très convoitée a jusqu’ici été le moteur du conflit entre les deux Soudans, et son contrôle est maintenant l’enjeu de la guerre civile qui déchire le Soudan du Sud. Visiblement, 2014 sera encore une bonne année pour les ventes d’armement.
L’Afrique, continent du XXIe siècle?
Si les médias accordent une plus grande attention aux guerres et autres conflits, on omet parfois de souligner les réussites, renforçant trop souvent les a priori et préjugés. Certes, notre génération devra composer avec l’échec des « objectifs du millénaire » de l’ONU visant à éradiquer la pauvreté, en plus d’hériter d’une crise climatique qui viendra mettre encore plus de pression sur les ressources des pays les plus pauvres. Mais la globalisation a aussi créé de nouvelles solidarités – notamment grâce au Web et aux nouvelles technologies de communication. Plus que jamais, la question du développement devient indissociable à celle du partage des ressources. Un constat qui s’applique d’ailleurs même aux nations favorisées, comme le Québec.
Finalement, il est nécessaire de souligner que ce « tiers monde » traditionnellement relégué à la périphérie du réseau international a un fort potentiel de croissance. Les citoyens des pays africains, à forte proportion jeunes et polyglottes, aspirent tout autant à devenir acteurs de ce monde en changement. Les succès économiques du Ghana ou du Nigeria, par exemple, la coupe du monde de soccer en Afrique du Sud (2010) ou encore plus récemment la mort de Nelson Mandela ont été tant d’occasions de souligner cette « renaissance » de l’Afrique. Une tendance qui me laisse croire que cette nouvelle année, celle notamment de la commémoration des vingt ans du génocide du Rwanda, sera encore plus « africaine » que la précédente.