Par Andréi Audet, journaliste multimédia
Un ours polaire abandonné sur une banquise à moitié fondue, une planète crasseuse où aucun signe de vie y est visible ou encore des océans noircis par des millions de litres de pétrole s’y étant déversés. Bien que ce genre d’images qui circulent abondamment sur les réseaux sociaux puissent éveiller une conscience environnementale chez certains, par son caractère alarmiste, elles décourageaient plus de gens à adopter des habitudes vertes pour soulager la planète bleue.
Un changement de direction face à l’influence que la société a par rapport aux changements climatiques et à la préservation de l’environnement s’impose selon Pénélope Daignault, professeure titulaire au département d’information et de communication de l’Université Laval. Cette chercheuse se concentre depuis les dernières années sur la façon dont les gens perçoivent les différents messages environnementaux. Elle croit que leurs destinataires doivent emprunter la voie positive.
« Je me suis intéressée dans le cadre de mes différentes recherches à la façon dont on parle aux gens. Comment doit on les aborder pour qu’ils se sentent interpelés par l’enjeu environnemental ? Et éventuellement, pour changer leurs habitudes. Ce n’est pas par la menace, mais bien en misant sur l’espoir, l’optimisme et en leur donnant des outils au
quotidien pour qu’à leur échelle, ils puissent changer les choses. Ça peut réellement faire plus résonner »
Urgence climatique. Désastre planétaire. Lutte aux changements climatiques. Guerre aux polluants. Des mots à connotation négative qui peuvent être une piste de réflexion sur le ton à employer lorsque vient le temps d’aborder les changements climatiques à la population, notamment dans les médias.
« Certaines personnes se sentent impuissantes face aux changements climatiques. Surtout avec la manière dont le message est véhiculé dans les médias. Par exemple, on entend que c’est urgent, que c’est catastrophique. Ils vont préférer se mettre la tête dans le sable et nier la notion des changements climatiques, ou tout simplement ne pas y penser puisque ça les rend inconfortables sur le plan psychologique. »
Pour que les comportements d’une société changent, il faut également miser sur les différentes normes sociales en vigueur, et c’est ce qui expliquerait par exemple qu’il y ait des réfractaires à adopter de saines habitudes pour la préservation de l’environnement.
« Si dans l’entourage d’une personne, les gens ont des voitures hyper polluantes, qui ne posent pas de gestes pour l’environnement et surconsomment, il est clair que la norme sociale n’est pas favorable. »
Toutefois, ceux et celles qui lancent des initiatives pour contrer les effets du réchauffement planétaire pourraient être la solution afin que les normes sociales évoluent dans le bon sens.
« En montrant aux gens différentes initiatives vertes qui sont
positives, ils sont témoins qu’il y a de l’espoir. C’est positif, et les gens vont se mobiliser autour de ça. Ils permettent du même coup des changements d’habitudes au sein de la société. »
Les générations plus récentes, pensons aux Y et Z, qui sont nées entre 1980 et 2000, sont-elles plus influençables quant à l’enjeu environnemental, qu’il soit amené d’une manière négative ou positive ? Mme Daignault, qui collabore régulièrement au média web d’action climatique Unpointcinq, pense que oui.
« Ce sont eux qui vont vivre sur la planète du futur. Ils sont donc plus susceptibles d’amener un discours pro- environnement au sein de leur famille. »
Alors que certaines personnes se sentent moins concernées à faire leur part puisqu’elles ne croient pas qu’il y aura une différence sur le sort de la planète, la chercheuse les encourage à changer leur fusil d’épaule.
« Si tout le monde dans son quotidien pose de petites actions, mais tout de même concrètes, ça pourrait avoir un poids suffisant pour propulser le mouvement environnemental de
façon collective, et par la suite monter jusque dans les instances politiques. »
Une personnalité publique comme la mairesse de Montréal, Valérie Plante, qui instaure plusieurs mesures environnementales au sein de sa ville peut être un bon modèle d’une pression sociale positive, selon Mme Daignault.
« Elle peut servir de modèle à d’autres villes. Certaines personnes vont parler de ses gestes à leur entourage pour la lutte aux changements climatiques, donc il est certain que ça amène quelque chose de positif. »
Le rôle des grandes entreprises est également primordial. Les épiciers IGA et Metro autorisent depuis peu leurs clients à apporter leurs propres contenants réutilisables pour la viande ou encore le poisson.
« Au final, il est certain qu’ils veulent attirer de nouveaux clients, mais ils agissent en suivant la tendance qui tend à être conscient qu’on doit poser des gestes. »
En attendant de voir une influence plus constructive et non défaitiste par rapport à l’environnement, Pénélope Daignault rappelle qu’en partageant des images de type apocalyptique ou sans espoir quant à l’avenir de la planète sur son mur Facebook, on ne fait que donner des munitions aux climatospectiques qui y voient une sorte de propagande malsaine.