En administration des affaires, il faut savoir parfois être diplomate. Faire partie du monde des affaires requiert une bonne aisance et compréhension de sa clientèle. C’est pourquoi plusieurs cours nous amènent à comprendre des comportements de consommations et à adopter certains codes et standards comportementaux. On appelle cela du marketing ou même de la communication. Et la plupart du temps, dans cette étude de comportements, on va plus loin. On observe et on étudie nos cerveaux pour mieux nous « forcer la main » à consommer et accélérer notre processus décisionnel.
Essayons de comprendre les choses d’une autre manière. Penchons-nous sur les résultats des élections américaines. Si l’on fait abstraction de la politique un instant et qu’on regarde ces résultats d’un autre point de vue, on remarque un côté différent de cette élection: le marketing.
« Le cerveau reptilien est le royaume de la douleur et de la peur. Le royaume du subconscient. Donc si vous voulez réussir, vous ne devez pas vous arrêter au besoin des consommateurs, ce qu’ils souhaitent, mais vous devez creuser profondément pour trouver leurs douleurs et développer un business qui réponde à cette douleur », mentionne le consultant en neuromarketing, Patrick Renvoisé, dans le documentaire Neuromarketing : votre cerveau les intéresse.
De ce point de vue, la campagne électorale du président Donald Trump prend tout son sens et peut être considérée comme un exemple d’une stratégie bien pensée de neuromarketing. Durant ses 18 mois de campagne, son équipe électorale et lui n’ont pas essayé de présenter un plan d’action qui répondrait aux besoins de la population américaine. Ils ont plutôt relevé des points de vue révoltants et déstabilisants. Ils ont donc joué la carte de la douleur, et ce, aux dépens de ce que peut penser le monde entier.
Contrairement à son adversaire, Hilary Clinton s’est concentrée sur ce que la population veut, sur ses besoins. On comprend donc que, d’un point de vue neuromarketing, le fait d’attaquer les douleurs morales de son peuple est justement ce à quoi Donald Trump doit sa victoire.
On part du principe que l’Américain type fait partie de l’une des plus grandes sociétés de consommation. En ciblant la partie émotionnelle du cerveau de nos voisins du Sud, Donald Trump et son équipe ont fait preuve d’une grande ingéniosité en ce qui a trait au neuromarketing.
Patrick Renvoisé admet qu’« il y a toujours un danger effectivement de manipuler les gens, mais d’un autre côté, quand le modèle de cette prise de décision est public, c’est aussi la responsabilité du consommateur d’aller comprendre ce que font toutes les entreprises qui essaient de leur vendre quelque chose ».
Mais en fait, arrêtons-nous un instant sur ces propos. Comprenez bien : il est du devoir des consommateurs d’être averti de toutes les pratiques auxquelles ont recours les entreprises.
« L’odeur est le seul sens que nous avons qui outrepasse la partie rationnelle de notre cerveau et qui va directement dans la partie émotionnelle. Et même si je vous dis que c’est une odeur manipulée, vous ne pourrez pas vous dire : « hey je suis influencé », car elle va directement dans la partie émotionnelle. Et le filtre de votre raison ne peut pas vous dire : « ne sois pas influencé par ça » », explique, dans le même documentaire, le consultant en neuromarketing Martin Lindstrom.
Par le biais de l’odorat, par exemple, le consommateur est inconsciemment manipulé. Si toutefois il essaye de comprendre ce qu’on lui fait, pourrait-il pour autant l’empêcher ?
Remarquez-vous la contradiction ?
Si le filtre de notre raison ne peut pas faire en sorte d’empêcher notre manipulation, à quoi bon assumer nos responsabilités de consommateur et chercher à comprendre toutes ces techniques que les entreprises utilisent sur nous ? Les entreprises sont conscientes de l’ampleur des pratiques auxquelles elles ont recours. Et tant qu’il est du devoir d’un consommateur d’être alerte et responsable, elles estiment que ces actes n’affectent pas leur conscience.
Est-ce éthique ? C’est à débattre. Certains tendent à croire que ce n’est pas moralement acceptable. Sur cette lancée, on peut s’interroger sur l’intérêt des entreprises et/ou systèmes politiques qui s’arrachent la dernière technologie dans le but unique de vouloir façonner un comportement de consommation chez les consommateurs, et ce, dès notre plus jeune âge. En fait, on est piégé en plein cœur des Hunger Games. Des jeux de consommation où le Président Snow cherche la meilleure manière de nous faire succomber.
D’autres diront qu’on est peut-être bien dans un jeu, mais un jeu d’échecs. Un jeu où il faut se résoudre à adopter la meilleure stratégie et où le consommateur a pour seule issue d’accepter.
En fait, si l’on considère la question : que pensez-vous de l’usage du neuromarketing ? La réponse qui vient à l’esprit est certainement que c’est flippant pour un consommateur de se dire qu’on peut si facilement le manipuler. Mais du point de vue d’un marqueteur, il y a une certaine adrénaline qui entre en jeu. Un interdit, une audace, une évolution. Une avancée qui pousse à accorder à ces techniques le bénéfice du doute que la population est prête à accorder au président Donald Trump. Car au final, on ne sait pas où risquent de nous mener ces techniques ni quels en sont les bienfaits pour notre futur.
Et il y a aussi le fait que le monde des affaires oblige à faire partie du côté obscur de la force. Mais il reste, qu’en tant que citoyen du monde, il est de notre devoir de s’assurer que toutes nos actions respectent nos valeurs morales dans la limite de celles de notre société.