A oil pump is seen at sunset outside Scheibenhard, near Strasbourg, France, October 6, 2017 . REUTERS/Christian Hartmann - RC1431C2ADD0

Désinvestissement des énergies fossiles : un combat prioritaire

À ce jour, il est annoncé que l’équivalent de 6 000 milliards de dollars devraient être désinvestis du domaine des énergies fossiles. Quelle bonne nouvelle nous dirons-nous, mais est-ce une solution miracle aux problèmes que représentent les changements climatiques ? Certainement pas la seule, mais elle fait partie de l’équation, expliquent les experts du panel sur le désinvestissement des énergies fossiles, présenté au Carré des affaires FSA ULaval-Banque Nationale, le 31 janvier dernier.

D’entrée de jeu, les panélistes nous rappellent que le Groupe d’Experts Intergouvernemental sur l’Évolution du Climat ( GIEC ) a révélé en 2013 que les trois dernières décennies furent les plus chaudes jamais enregistrées dans le dernier siècle. De plus, en 2015, l’Accord de Paris, regroupant 195 États, semble être un formidable exploit, mais les engagements pris ne sont pas contraignants et probablement, après vérification, trop faibles pour éviter la hausse de trois degrés Celsius, d’ici la fin du siècle.

Le désinvestissement dans les énergies fossiles n’est pas la seule et unique solution afin d’arrêter le réchauffement planétaire et la dégradation de l’environnement. Le professeur Patrick Gonzalez, de la Faculté d’économie de l’Université Laval, souligne l’importance ainsi que les résultats concrets des mesures coercitives comme la taxe carbone, la bourse du carbone ou bien les Renewable Energy Credits de nos voisins du sud.

En ayant un impact direct sur la rentabilité des différents projets d‘infrastructure dans le domaine de l’énergie, ces mesures coercitives sont des outils de premier plan pour la lutte contre les changements climatiques. Les campagnes de désinvestissement ayant, selon lui, des impacts plus indirects. L’objectif étant d’abord symbolique, car lorsque quelqu’un cesse d’investir, un autre dans le monde le fera à sa place, estime l’expert en économie de l’énergie.

Des responsabilités individuelles

Les impacts individuels sont aussi extrêmement déterminants et les négliger, parce que notre fond de retraite est investi de manière responsable, serait une méprise, souligne Patrick Gonzalez.

Le Québec a beau avoir une économie moins dépendante aux énergies fossiles, l’achat de véhicules de type VUS, particulièrement gourmands, y est très important. De plus, le Canada est parmi les plus grands producteurs de combustibles fossiles au monde, et demeure encore aujourd’hui un formidable paradis fiscal pour le secteur primaire et les compagnies extractives.

Les mouvements sociaux, tel que celui contre le projet Énergie-Est ont un impact important et il est de notre responsabilité de presser nos élus d’êtres plus stricts et d’exiger des sanctions pour les entreprises dites irresponsables, estime les panélistes. L’investissement responsable semble également une avenue intéressante pour s’engager concrètement et collectivement dans la transition énergétique.

«  Si vous évacuez l’aspect humain dans la question de la transition, vous passez complètement à côté de celle-ci et vous reproduisez les anciens modèles qui nous ont amenés là où on est aujourd’hui. On a plus le temps pour les fausses solutions »,  rappelle la coordonatrice du Front commun pour la transition énergétique, Anne-Céline Guyon.

Les conséquences du désinvestissement

Anne-Céline Guyon explique que l’objectif derrière cette campagne de désinvestissement, est d’ébranler le pilier du financement du secteur des hydrocarbures, dans le but de passer vers un modèle de développement plus éthique. Détruire la planète est une chose, faire du profit grâce à cette destruction est aujourd’hui d’un commun dévastateur. Attaquer ainsi la réputation des entreprises ciblées envoie un signal de risque aux investisseurs, croit-elle.

De son côté, Olivier Gamache, président-directeur général du Groupe investissement responsable (GIR) depuis 2007, accompagne les investisseurs dans leurs décisions. Il explique qu’il est parfois difficile de tracer la ligne, de poser la limite de ce qui est moralement et éthiquement responsable lorsque l’on veut investir: « considérons-nous un fabricant de train d’atterrissage pour avion de chasse comme égal d’un fabricant d’armes ? »

Les compagnies cherchent également à bien paraitre en adoptant des titres politiquement corrects. Il existe même du « charbon propre ». Avec un peu d’imagination et de volonté financière, on peut essayer de se soulager la conscience. « Si votre conseiller financier dit que l’investissement responsable, ce n’est pas une solution pour vous, j’en ai une pour vous, changez de conseiller financier », mentionne Olivier Gamache.

Amélie Laframboise, l’une des invitées, indique durant la conférence que le Gouverneur de la Banque de l’Angleterre, Mark Carney, estime que 5 000 à 7 000 milliards de dollars, d’ici 2050, transiteront, chaque année, de différents fonds en direction de la transition énergétique.

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