Critique du roman les enfants du Printemps

Publié en 1932 à New York, Les enfants du printemps de Wallace Thurman, figure afro-américaine notoire de la Renaissance de Harlem, est traduit en français pour la première fois par Daniel Grenier aux éditions Mémoire d’encrier.

Après The Blacker the Berry en 1929, le second roman de Thurman, Infants of Spring, s’immisce dans la vie de Raymond Taylor, écrivain en herbe, et ses amis artistes, peintres, chanteurs, musiciens, poètes, qui vivent dans une commune de Harlem appelé le « Niggeratti Manor ». Tout commence lorsque Ray rencontre Stephen Jorgenson, un étudiant scandinave venant de débarquer à New York, et ce dernier lui demande d’emménager au manoir. L’arrivée du nouveau locataire provoque plusieurs tensions au sein des colocataires afro-américains, dont la légitimité de la présence d’un Blanc dans le quartier Harlem. En résumé, l’histoire parle des relations impossibles d’amitié et d’amour entre les Noirs et les Blancs. Leurs débats enflammés font réfléchir le lecteur sur le rôle des artistes afro-américains dans la société américaine, mais plus particulièrement à la ségrégation raciale toujours ambiante après la guerre civile.

Reconnaissance de l’art afro-américain

La véritable Negro renaissance se fait impatiemment attendre à New York et les artistes du manoir pensent recevoir leur moment de gloire sous peu. En fait, le livre se révèle être une satire de ce courant artistique, puisque chaque personnage du roman représente une figure importante de l’époque. Le protagoniste, Ray, incarne aussi Thurman lui-même. À travers sa narration, l’auteur arrive à transmettre ses propres préoccupations : comment peut-on construire un art propre au peuple afro-américain sans copier les standards des Blancs ? Peut-on se démarquer en faisait du « vrai » art sans être classifié comme de l’art ethnique ? Faut-il s’identifier à l’histoire des Noirs entier ou porter seul le fruit de son art ? Ces questions, débattues tout au long du livre par les personnages, montrent les différentes prises de position au sein de la communauté afro-américaine. Thurman illustre bien les nuances relatives à l’importance du renouveau artistique dans le mouvement d’émancipation des Noirs aux États-Unis. Le roman Les enfants du printemps se veut une réelle immersion dans le cercle bouillonnant d’artistes afro-descendants dévoilant les espoirs et les paradoxes de cette époque charnière.

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