Elephant Song : un pétard mouillé ?

Le dernier né du réalisateur Charles Binamé, Elephant Song, mettant en vedette Xavier Dolan, est sorti le 20 février sur les écrans du Québec. Le film place le spectateur dans une ambiance de huis clos où les rapports de force entre les personnages sont des plus inégaux.

Mathieu Massé

Les années soixante dans une institution psychiatrique. Le docteur Lawrence disparaît mystérieusement après une rencontre avec un patient, Michael (Dolan). Début vingtaine, ce dernier offre des allures de manipulateur-sociopathe. Le directeur de l’hôpital, le docteur Green (Bruce Greenwood), s’installe avec lui pour tenter de lui soutirer l’information : où est le docteur Lawrence ?

Dès les premières minutes, on sent que le rapport de force entre Michael et le docteur Green est tout sauf égal. Michael joue avec le psychiatre comme avec une marionnette. Le jeu d’esprit s’épaissit à mesure que les mensonges se dévoilent ou s’envolent. On distingue certaines vérités cachées dans les histoires que Michael raconte.

Mais surtout, les éléphants. On voit dans cette image une métaphore subtile d’un souvenir qui ne peut tout simplement pas s’effacer de la mémoire du patient. Une vérité. La vérité si simple, qu’au fond, elle est aussi évidente qu’un éléphant dans un corridor.

Le film réalisé par Charles Binamé et écrit par Nicolas Billon à la base sous forme théâtrale est mené un peu facilement dans le huis clos que représente le bureau du psychiatre. La promiscuité qu’impose l’espace fermé donne lieu à une infinité de déclinaisons du champ-contrechamp, qui finit par lasser.

Heureusement, Binamé a pris soin d’aérer le tout avec quelques scènes où l’on sort de l’atmosphère de plus en plus étouffante de mensonges et de demi-vérités. Un ou deux flashbacks dans la mémoire du patient donnent aussi une perspective quant à son passé qui est plongé dans l’obscurité.

Il est un peu difficile de ne pas aimer Xavier Dolan dans le rôle de Michael, le patient trop intelligent pour son statut d’aliéné mental. On rappelle que la pièce originale se situait dans les années 80, époque où on commençait à voir une certaine désinstitutionnalisation. Binamé a préféré ancrer son film plus tôt, moment où les malades mentaux étaient beaucoup plus ostracisés.

Bruce Greenwood joue un docteur plus que convaincant, mais il est hautement dépassé par un Xavier Dolan qui semble ne pas avoir à jouer pour être méprisant et ouvertement chauvin.

La version doublée en français, présenté dans la majorité des salles au Québec, donne par contre une impression amère lorsque la voix de Dolan est postsynchro avec sa propre personne. Il en est à se demander pour quelle raison le tournage s’est fait en anglais.

Elephant Song est une histoire avec beaucoup de potentiel, mais qui malheureusement n’arrive à capter l’attention du spectateur que par bouts, sans réussir à l’emprisonner dans son univers.

3/5

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