Norge au Trident : le chemin du nord

L’auteur, metteur en scène et acteur Kevin McCoy revient au théâtre du Trident du 3 au 28 mars pour sa nouvelle création autobiographique : Norge.

Arthur Paquet-Desilets 

Norge, c’est la Norvège, pays d’où la grand-mère de McCoy a émigré en 1919 pour une raison inconnue. Américain de naissance, fils de parents qui n’ont jamais vu ce pays, l’auteur est fasciné par la quête de ses origines. Saisissant l’opportunité de s’y rendre, il traverse le pays pour visiter le petit village qui a vu naître son aïeule. Dans une narration ponctuée de traits d’esprit et de réflexions sur l’immigration, le nord et sur le Québec, McCoy raconte son aventure et profite de l’occasion pour introduire les grands noms de la culture norvégienne comme Munch, Ibsen et Grieg. C’est aussi l’opportunité de décrire cette autre nordicité européenne.

De retour au Québec, McCoy poursuit ses recherches pour se lier à sa famille perdue, mais la trame de fond change. L’auteur nous familiarise avec ses problèmes de santé et avec la maladie d’Alzheimer qui frappe ses deux parents au même moment. Il nous raconte leur fin de vie et leurs discussions tragi-comiques.

On peut se questionner à savoir si l’artiste parvient à transmettre son «aventure». Pour fascinante que soit la perspective de plonger au cœur d’un pays comme la Norvège, on est plutôt surpris de l’écouter nous décrire sa chambre d’hôtel et ses investigations à la bibliothèque pour trouver un petit village reclus.

On reprochera peut-être aussi la mise en scène un peu facile de la pièce. L’acteur joue très peu avec les éléments de décors, utilisant plutôt un écran projetant paysages, artefacts, peintures et photos d’une qualité discutable. En contrepartie, la présence sur scène de la pianiste Esther Charron jouant discrètement des œuvres de Grieg donne certainement une profondeur remarquable à l’exposition. Cette trame musicale pénètre l’auditeur de l’ambiance norvégienne que cherche à rendre McCoy un peu maladroitement avec ses photos de gratte-ciels à Oslo. La récitation d’un poème de Nelligan en norvégien ou encore une réinterprétation du fameux Cri de Munch à l’aune des attentats d’Oslo sont toutefois d’intéressants ajouts à l’œuvre.

Pour faire justice à la pièce, il faut savoir que McCoy travaille le «théâtre documentaire». Norge, c’est plutôt un témoignage, une histoire très personnelle qu’une tragédie grecque. C’est dans cette perspective que la simplicité de l’histoire, des personnages, des décors et des costumes s’insère. Jouant sa propre histoire, l’acteur apparaît d’ailleurs très sincère et fort sympathique particulièrement lors de ses discussions avec sa mère mourante. Trop intime ? Il faut avouer que le courant ne passe pas toujours entre l’artiste et le spectateur et que sa vie privée, dans ce qu’elle a d’«extraordinaire», nous apparaît, à nous, un peu ordinaire.

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