Critique théâtre: Stockholm, Le syndrome

Prise d’otages loufoque et colorée

Maintenus en otages, séquestrés, sans réponse, brutalisés, inquiets. C’est dans cette situation que se retrouvent les six personnages de la pièce Stockholm, Le syndrome et dans laquelle sont également plongés les spectateurs osant embarquer avec eux dans leur quête de réponses. Dans cette pièce de Gabriel Fournier, l’absurdité, l’humour et la critique se côtoient dans un délire amenant plusieurs questionnements sur la psychologie humaine.

Présentée au théâtre Premier Acte, la pièce STOCKHOLM, Le syndrome est qualifiée de « rencontre entre Huis clos de Jean-Paul Sartre et le théâtre d’Eugene Ionesco ». C’est dans le monde de l’absurdité que le dramaturge et metteur en scène Gabriel Fournier transporte les spectateurs.

Le spectacle de 1 h 30 s’amorce avec la situation réaliste d’une prise d’otages, mais verse graduellement vers l’absurdité au fur et à mesure que la pièce progresse. Dans cette situation, les personnages sont amenés à partager leurs dilemmes intérieurs, leurs questionnements et leurs secrets toujours dans un illogisme déconcertant. L’auteur a réussi à traiter du sujet délicat et difficile de la séquestration d’une manière humoristique. Abordant le syndrome de Stockholm comme la diffusion d’une maladie contagieuse, les personnages posent certains questionnements fondamentaux.

Gary, travailleur mal à l’aise aux ressources humaines, Camille, une secrétaire coincée, Daniel, un informaticien stressé, Yvon, un agent de sécurité vaniteux, Sylvain, un travailleur confiant des relations publiques, et M. Beaubien, le grand patron, devront faire face à un ravisseur dont ils ne connaissent rien.

Gabriel Fournier présente des personnages ayant une personnalité et une réaction à la séquestration très différente. Le jeu caricatural des acteurs, le choix des costumes, les voix des personnages ainsi que leur gestuelle complètent ce qui ressemble à une parodie hors du temps des personnalités typiques de notre société. D’ailleurs, on décèle une certaine critique quant aux catégorisations des individus par leur métier.

Les comédiens utilisent un langage soutenu et un vocabulaire littéraire, ce qui est quelque peu inusité dans le théâtre d’aujourd’hui, mais cela contribue à accentuer l’aspect tragique et saugrenu de la pièce. D’ailleurs, la prononciation cocasse de certains mots récurrents dans les répliques fait rire l’assistance, surprise devant une telle prestation.

La proximité avec les acteurs que procure la salle du théâtre Premier Acte permet d’apprécier le travail d’utilisation des expressions faciales des comédiens, qui est particulièrement développé dans cette pièce. La mise en scène originale plonge également les spectateurs dans la découverte d’une nouvelle manière de voir le théâtre. Parsemé d’extraits audio et vidéo ajoutant une seconde dimension, le récit se déroule dans un décor très épuré. Constitué essentiellement d’un mur, d’une porte et de l’enseigne « Sortie », il contribue à soutenir le sentiment d’impuissance des personnages.

Gabriel Fournier a su présenter un mélange de styles théâtraux original. Malgré quelques bredouillements des comédiens au cours de la représentation et une musique parfois trop forte pour comprendre les répliques, c’est une première pièce qui séduit les spectateurs.

Ce spectacle met en scène le premier texte de Gabriel Fournier, qui avait soumis ses écrits aux Chantiers 2015, une construction artistique du Carrefour international de théâtre de Québec.

Stockholm, Le syndrome est présenté jusqu’au 29 octobre au théâtre Premier Acte.

Consulter le magazine