Loïc April : désillusion enthousiaste

Des guitares électriques qui peuvent rappeler Malajube, une voix claire et juste, des paroles intelligentes et poétiques. Loïc April présente un premier album éponyme soigné et efficace, qui plaira aux amateurs et amatrices de sonorités pop et de musique qui grafigne, paradoxe exploité à merveille par l’artiste.

Dès les premières notes de Fleur de violence, on commence à cerner le projet qui nous est proposé par la maison de disque Bonsound. Rien de révolutionnaire, mais une fraicheur bien venue alors qu’avril se pointe le bout du nez dehors. Quand la batterie s’arrête pour laisser place à la voix et à la guitare en ouverture, on se plait dans la douceur des harmonies, mais surtout dans l’attaque bien vivante des notes. C’est une des principales qualité de l’album d’ailleurs : un équilibre entre une esthétique lisse et des racines plus grasses.

La ligne de basse qui ouvre la deuxième piste du long-jeu, Le silex qui aimait trop le froid, est envoutante, si bien qu’on en oublie que la première guitare s’entend à la cinquantième seconde de la pièce alors que débute le refrain, l’un des moments grandioses de la production. Tout au long de l’album, les enchainements musicaux sont fort originaux et travaillés, ce qui permet à Loïc April de définitivement s’éloigner d’une étiquette trop pop et de concrétiser sa couleur indie.

Comme si elles avaient été placées là dans le but de paver le chemin pour Prestidigitateur, les premières chansons de l’opus permettent de pleinement apprécier les variations de rythme et de texture entre les pièces, mais surtout, à l’intérieur d’un même titre. Le refrain, simplement la voix sur une guitare en petite réverbération, créé une coupure qui permet de toujours relancer la montée en intensité, pour nous amener au moment le plus rock de l’album, dans la pièce qui s’avérait jusqu’à présent la plus douce.

Le crescendo se poursuit avec Fais de ma tête ton jouet, qui, en toute simplicité à l’oreille, cache une certaine complexité musicale, à la fois dans les choix mélodiques et dans l’organisation de l’accompagnement, qui surprennent par moment. Les harmonies vocales y sont particulièrement réussies.

Les paroles de Loïc April le placent au cœur de ses contemporains, traitant d’anxiété sociale, de solitude et de désillusion. Composé « au fil des répètes matinales dans un local poussiéreux de l’est de Montréal », on ressent le spleen qui caractérise les grandes villes post-industrielles.

Mes ruines sur tes décombres s’inscrit en continuité avec les autres pièces, peut-être un peu moins efficace à ce point-ci, étant donné les similitudes dans l’agencement des mouvements. À partir du deuxième couplet, on sent qu’on essaie de s’envoler ailleurs, avec une finale très énergique, particulièrement sur le plan vocal.

Un album pop-rock n’en est pas un sans une ballade plus douce, ce à quoi À revers vient remédier. La combinaison guitare-batterie-basse – et même voix- semble particulièrement en synergie dans ce morceau, qui dénote un travail intéressant d’harmonisation des tones en studio, pour produire un tout très uniforme.

L’ascendant Malajube revient en force dans Des points pour la démarche, qui pousse le côté rock un peu plus loin que les autres pièces. Un 2 :30 bien « rentre-dedans », question d’arriver fin prêt pour le Purgatoire final. Construite à l’image de l’album, les lignes de voix accrocheuses s’entremêlent à des guitares par moment planantes, par d’autres très définies et up-tempo, dans un agencement personnalisé avec beaucoup de caractère.

Loïc April (album éponyme), réalisé par Jonathan Charrette, est disponible en ligne via plusieurs plateformes d’écoute et sera officiellement lancé ce vendredi 30 mars à la Casa del Popolo à Montréal à 20h.

Photo : Courtoisie, Raphael Ouellet
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