Le campus de l'Université Laval. Photo : Amaury Paul

L’UL s’engage dans la protection de la grive de Bicknell

L’Université Laval et le Séminaire de Québec ont signé, la semaine dernière, une entente de 40 ans qui vise à préserver l’habitat de la grive de Bicknell, un oiseau menacé de disparition.

L’Université Laval a accepté d’être titulaire d’un bail de conservation financé par la Fondation de la faune du Québec. Selon le coordonnateur de projets à la Fondation de la faune du Québec, Sébastien Rioux, il s’agit d’une entente dont les retombées sont pour le moins significatives. « C’est 40 hectares qui seront protégés pour 40 ans. À ma connaissance, c’est la première fois qu’il y a une superficie d’habitat qui est protégée pour la grive de Bicknell en terre privée », relève-t-il.

Comme il ne s’agit pas d’une pratique courante, aucun outil de conservation ne convenait à la protection de l’espèce. « C’est correct de signer des papiers, en bons citoyens, les administrateurs de l’Université Laval peuvent le faire. Je crois qu’où ça prend son envol, c’est l’aspect d’innovation. La raison était bonne, mais le moteur c’était de trouver de nouvelles solutions », indique le directeur des opérations à la Forêt Montmorency, Hugues Sansregret.

Ce qui est d’autant plus intéressant, selon Sébastien Rioux, c’est la flexibilité de l’entente. « Quand on veut s’attaquer à la conservation de l’habitat d’une espèce en particulier sur de grands territoires, le concept d’aire protégée dynamique devient intéressant. Les habitats évoluent, leur qualité aussi », explique-t-il.

L’Université Laval pourra réaliser des projets de recherche sur ce territoire forestier protégé, tout en s’assurant de la protection de l’habitat de la grive de Bicknell. Cet emplacement est soustrait de développements forestier et éoliens.

Espèce menacée de disparition

La grive de Bicknell est désignée menacée. « On est au premier niveau après vulnérable », soutient le biologiste pour le Service canadien de la faune et étudiant au doctorat en sciences forestières à l’Université Laval, Yves Aubry.

La raison : des perturbations dans son aire d’hivernage, soit les grandes Antilles. Haïti a perdu entre 80 à 90 % de ses forêts, de même pour la République dominicaine, qui a vu son milieu forestier diminuer grandement.

Ce qui inquiète encore plus les chercheurs, c’est la ségrégation de l’habitat dans les aires d’hivernage. Les mâles hivernent à plus haute altitude et les femelles à plus basse. Les habitats qui sont les plus transformés, selon Yves Aubry, sont ceux à basse altitude. Le sexe-ratio témoigne de l’impact de cette ségrégation. On dénombre deux à trois mâles pour une femelle.

« C’est le segment qui est très critique. Ça réduit la probabilité de progression de la population. En plus, c’est une espèce très vulnérable à la prédation dans son habitat, soit des sapinières très denses. Il y a l’écureuil roux qui, une année sur deux, va prédater jusqu’à 80 % des nids. »

Urgence d’agir

« Même si on sait que la cause principale est dans la période d’hivernage, l’espèce ne peut pas supporter de pressions supplémentaires, affirme le biologiste pour le Service canadien de la faune. Il faut être proactif et comprendre ce qu’on fait. »

En effet, selon lui, la situation est alarmante. Au Québec, bien qu’on ne possède pas beaucoup de données de référence, les chercheurs tendent à noter une diminution. Dans les Maritimes, la situation est semblable.

C’est d’ailleurs pour cette raison que la Fondation de la faune du Québec souhaite exporter son modèle d’entente de conservation avec un propriétaire privé.

« C’est quelque chose qu’on pourrait essayer de répliquer dans d’autres provinces canadiennes. Au Nouveau-Brunswick, la grive de Bicknell est présente sur le territoire de Irving, des terres privées, un peu comme celles du Séminaire de Québec », illustre Sébastien Rioux.

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