Du 18 au 29 janvier se tiendra en ligne la septième édition du Festival Plein(s) Écran(s). Le concept est simple : chaque jour, pendant 24 heures, il vous sera possible de visionner des courts-métrages de toutes sortes. C’est donc plus d’une quarantaine de films qui seront présentés durant le festival. Pour l’occasion, différent.es journalistes d’Impact Campus proposent de vous présenter certains de ces courts-métrages, présentations ponctuées de nos réflexions, et ce, jusqu’à la fin du festival. Nous reprenons, à une exception près, la formule de l’année dernière. Cette fois, une pluralité de journalistes et d’angles d’approches vous accompagneront, manière de pocéder qui, si elle semble tendre vers l’éparpillement, est représentative de la divesité des propositions et de l’étendue des publics rencontrés : fictions, films d’animation, documentaires, toustes y trouveront leur compte. Nous vous encourageons grandement à y jeter un coup d’œil : c’est un événement important, qui contribue à la démocratisation de l’art cinématographique.
Pour participer au Festival Plein(s) Écran(s), rien de plus simple : l’événement est gratuit et disponible à toustes. Vous n’avez qu’à vous rendre sur leur page Facebook (ici) ou Instagram (ici). Sinon, sachez que les courts-métrages seront disponibles directement sur leur page web : https://pleinsecrans.com/
Légende (telle qu’établie par le Festival)
Ça déménage ! : ça brasse en tabarouette
Ça surprend : ta matante dirait « c’est spéciaaaaaal »
Ça va mal à shop… : et ça chatouille tes feels
Ça te replace les chakras : aussi efficace qu’une thérapie
25 janvier – Ève Nadeau, journaliste collaboratrice
Mimine (13 minutes)
Réalisation: Simon Laganière | Mood: Ça va mal à shop…
Synopsis: Bonus, un père maladroit et insouciant, essaie d’en mettre plein la vue à son fils lors de sa journée de garde.
Avis: Je mentirais si je disais que je n’ai pas été charmée par la relation père/fils mise de l’avant par Mimine ainsi que par la performance de Stéphane Breton qui joue Bonus, le papa extravagant qui s’adonnerait à n’importe quelle activité, aussi risquée soit-elle, pour faire plaisir à Mimine (Laurent Lemaire), son fils. Parmi les courts-métrages du 25 janvier, il est celui m’ayant le plus fait sourire. Peut-être est-ce dû à la référence nostalgique et colorée au film Pixar Là-haut (dont la scène d’ouverture, avouons-le, nous fera toujours pleurer) ou encore à la tendresse et au dévouement d’un parent « tout croche » (c’est ainsi qu’il est perçu par certain.es) à l’égard de son adorable garçon souhaitant être diverti. Bien que les enjeux filiaux proposés par l’histoire (pensons à l’arc narratif convenu du père en garde partagée qui peine à créer des liens avec son enfant) ne réinventent pas la roue, la direction prise par le film, surtout dans les dernières minutes, est magique, créative et vaut le détour.
Des voisins dans ma cour (15 minutes) – Coup de coeur
Réalisation: Eli Jean Tahchi | Mood: Ça déménage !
Synopsis: Entre Parc-Extension et la ville de Mont-Royal, une clôture crée une étrange dichotomie entre deux voisinages.
Avis: Des voisins dans ma cour débute avec d’impressionnantes prises de vue aériennes nous faisant voler au-dessus de Montréal. Nous entrons ensuite dans la ville, alors qu’une voix radiophonique hors champ annonce l’installation d’une clôture entre Parc-Extension et Mont-Royal. J’ai absolument adoré l’usage du « split screen » servant à illustrer cette rupture. Des deux côtés de l’écran, le réalisateur donne à voir des scènes ordinaires, sans pour étant être ennuyantes, du quotidien des voisinages : des citoyen.es arrosent leur pelouse, traversent la rue, conduisent leur voiture; les enfants jouent dans la cour, dans les jeux d’eau, ne font que vivre, simplement. Il le fait, dois-je préciser, sans jamais avoir recours à des techniques narratives particulières (présentation de personnages, présence de dialogues, etc.), et c’est une totale réussite. Le silence qui en résulte laisse parler les images qui à elles seules nous émeuvent, en plus de nous amener à réfléchir aux problèmes et enjeux de la gentrification, de la ségrégation sociale et urbaine. Une œuvre documentaire engagée, politique, d’une grande beauté, faisant l’éloge de la subtilité.
Pas de titre (8 minutes)
Réalisation: Alexandra Myotte | Mood: Ça surprend
Synopsis: Un petit journaliste de campagne fait la surprenante rencontre de Louisiane Gervais, une sculpteure aveugle et iconoclaste.
Avis: Dans son court-métrage d’animation complètement délirant, Alexandra Myotte se réapproprie et réimagine un fait vécu, soit l’incendie du dépotoir de pneus de St-Amable arrivé il y a plus de trente ans. Pour ce faire, elle invente, entre autres, le fascinant personnage de Louisiane Gervais, sculpteure dévouée et véritable star du récit. Elle met également en scène un narrateur ufologue qui part à sa rencontre, dont la narration en jouale (assurée par Jean-Sébastien Hamel) est tout simplement savoureuse. Le travail visuel, quant à lui, est attrayant, réussi, sans pour autant être transcendant. L’imaginaire par moments psychédélique exploité par l’animation aurait pu, d’un point de vue créatif, innovateur, être bien plus déployé. Or, au niveau de l’histoire, je relève surtout des points positifs : l’humour, l’allusion aux extraterrestres, le mystère entourant Louisiane, la maigre satire des beaux-arts et, finalement, le « plot twist » concluant à merveille notre visionnement.
Chanson pour le nouveau monde (9 minutes)
Réalisation: Miryam Charles | Mood: Ça te replace les chakras
Synopsis: À la suite de la disparition d’un homme en Écosse, sa fille se remémore des paroles chantées avant la nuit.
Avis: Un voyage onirique plein de douceur, Chanson pour le nouveau monde de Miryam Charles me rappelle que je suis extrêmement fan des lents fondus à l’image qui proposent une transition entre le rêve et la réalité, la présence et la perte. Cela dit, si je n’avais pas d’abord lu le synopsis du film, je ne crois que pas que les images filmiques, même combinées à la splendide musique chantée en créole, m’auraient permis de deviner l’histoire qu’elles souhaitent raconter et qui porte sur une disparition. Certes, les paroles évocatrices et le choix des archives argentiques laissent présager un certain « manque » vécu par la chanteuse/narratrice, mais la relation sous-entendue qu’elle entretient avec son père disparu aurait mérité, à mon avis, d’être développée davantage. Peut-être n’ai-je pas réussi à me laisser complètement bercer par le style poétique et quasi-expérimental exploré par Charles qui est, somme toute, remarquable. Malgré ma déception ressentie, je suis curieuse de découvrir son premier long-métrage paru l’an dernier, Cette Maison, ainsi que ces autres projets.
26 janvier – Sabrina Boulanger, jounaliste multimédia
On ne tue jamais par amour (15 minutes)
Réalisation: Manon Testud | Mood: Ça te replace les chakras
Synopsis: Un groupe féministe se retrouve pour laisser des écrits sur les murs de Montréal. Leur défi : éveiller les consciences aux féminicides.
Avis: On ne tue jamais par amour donne l’impression d’être un.e témoin furtif.ve qui vole des images : demi visages, gros zooms, plans instables. La formule qui s’approche du documentaire permet une intrusion dans le collectif Collages féminicides Montréal, où on sent les colleuses fortes de leur désir de porter un message malgré les haineux et la police. Court film qui met bien en lumière la démarche de femmes solidaires.
Opération carcajou (18 minutes) – Coup de coeur
Réalisation: Nicolas Krief | Mood: Ça déménage !
Synopsis: Une perquisition policière trouble la quiétude d’une famille de banlieue et éveille chez Nicolas des soupçons sur son père Sylvain.
Avis: Un court-métrage qui intrigue, inquiète puis fait sourire au fil des minutes qui présentent un segment semi-autonome – toutes nos questions ne sont pas répondues, mais a-t-on besoin de tout savoir pour capter la complexité des humains ? Gros coup de cœur pour la dernière scène avec sa tension et sa musique ainsi le sentiment de clin d’œil qui l’accompagne : absolument délectable.
Municipal relaxation module (6 minutes)
Réalisation: Matthew Rankin | Mood: Ça va mal à shop…
Synopsis: Ken à une grande idée pour un banc.
Avis: Le synopsis dit tout : Ken a une grande idée pour un banc. Un banc public, où s’asseoir. Qu’est-ce qu’on fait, sur ces bancs ? Qu’est-ce qu’on aime y contempler, une fois assis ? On en veut où ? Court-métrage très court, très simple, qui fait sourire jaune via le monologue entre Ken et Phil, et qui propose de poser son regard sur le module de relaxation municipal.
Errance (5 minutes)
Réalisation: Guillaume Lambert | Mood: Ça surprend
Synopsis: De jeunes gens errent dans un froid polaire, et cherchent un sens à leur vie.
Avis: Le titre décrit parfaitement le film : une errance dans la narration, la musique, les pensées des personnages. On se sent dans une story Instagram commentée avec un filter noir et blanc, qui forme un collage de tranches de vie décontextualisées partagée avec un public désintéressé. Le format horizontal standard ramène les pieds sur terre : ceci est un court-métrage, pas une story. Je ne sais pas ce que j’en tire, ça surprend, comme le Mood l’indique.
27 janvier – Emmy Lapointe, rédactrice en chef
Ousmane (25 minutes) – Coup de coeur
Réalisation: Jorge Camarotti | Mood: Ça va mal à shop…
Synopsis: Ousmane, un nouvel immigrant burkinabé vivant à Montréal, voit sa vie prendre un tournant inattendu lorsqu’il rencontre une vieille dame désorientée.
Avis: Si le mood, c’est ça va mal à shop, c’est que oui, une part du court-métrage arrache un peu le coeur, mais au-delà de ça, d’Ousmane (le personnage comme le film) une grande tendresse, une tendresse à laquelle n’échappe toutefois pas une mélancolie certaine. Outre une ou deux répliques clichées, on a affaire à une œuvre qui, en moins un peu moins de 30 minutes, déploie un fil narratif clair et suffisamment étayé pour qu’on en retire quelque chose lorsque le générique apparaît à l’écran.
La main gauche (13 minutes)
Réalisation: Maxime Robin | Mood: Ça surprend
Synopsis: La maman du petit Maxime se fait beaucoup de souci pour lui quand sa professeure le déclare « anormal».
Avis: Hommage discret à C.R.A.Z.Y et à ces interprètes féminines comme Marie Carmen, Danielle Messia, Marie-Denise Pelletier. La main gauche semble reprendre quelques codes de la représentation de la communauté LGBTQIA2+ du cinéma noir (lesbianisme sous le couvert d’une allure rigide et sévère, homosexualité masculine représentée par l’appropriation d’éléments traditionnellement féminins et donc un peu monstrueux). Néanmoins, la représentation finale est rayonnante.
We are not speaking the same language (8 minutes)
Réalisation: Danika St-Laurent | Mood: Ça te replace les chakras
Synopsis: Par le biais du perlage, Danika repense à sa grand-mère et au lien qu’elle entretient avec son identité autochtone.
Avis: Mise en scène assez sobre par des plans serrés, des chants en fond et une voix-off qui nous parle de son héritage matrilinéaire et du « saut de génération ». Si le tout ne se démarque pas grandement, le court-métrage demeure touchant.
The talking stage (papotage) (2 minutes)
Réalisation: Lily Paris | Mood: Ça déménage !
Synopsis: Phoebe est une personne complètement normale avec beaucoup de choses à dire qui sont, elles aussi, complètement normales.
Avis: Illustration éloquente tant dans les propos que dans les traits qui bougent devant nous du stress qui hante les premières dates et du flot verbal qui nous traverse sans qu’on ait aucun contrôle sur lui. Peut-être légèrement trop sombre pour l’élément qu’il raconte : une date dans un café.
Photos fournies par le Festival Plein(s) Écran(s)