Entrevue avec Robert Lalonde : De Tchékhov aux carrés rouges

Découragement, désespoir et pessimisme sont loin d’être les termes qui décrivent ce que ressent Robert Lalonde envers la jeune génération. Entrevue.

À l’encontre de plusieurs, l’auteur aux 24 romans croit en la relève ; c’est pourquoi il décide de dialoguer et d’échanger avec elle, brisant ainsi l’idée qu’une génération ne peut discuter avec l’autre.

C’est justement ce en quoi croit Anton Tchékhov, le personnage principal de son nouveau livre paru le 8 mars dernier. Se déroulant au travers d’une correspondance entre le célèbre dramaturge russe et un jeune écrivain assoiffé de conseils, Le petit voleur en inspirera plus d’un. Bien qu’il se déroule en Russie, au XIXe siècle, le roman est bien ancré dans l’actualité. Basé sur les thèmes de la révolution et de l’écriture, il saura plaire à bien des étudiants.

Guide de révolution

Ayant été professeur d’art dramatique et de création littéraire dans plusieurs écoles, Robert Lalonde est un habitué de l’univers étudiant. C’est en quelque sorte ce qui a inspiré son livre. C’est au moment de la crise du printemps érable que l’idée de ce roman, qui devait être au départ une nouvelle, lui est venue.

« J’enseignais à l’époque, on était avec des étudiants et on avait des discussions éthiques dans la rue ou dans la classe, quand il y avait des classes », explique-t-il.

C’est aussi là que Tchékhov est entré dans le portrait. Ayant toujours à portée de main une des œuvres de l’écrivain, il s’est demandé ce que celui-ci penserait du contexte, comment il prendrait position dans le conflit étudiant. Lalonde s’est surtout demandé pourquoi une voix comme la sienne ne se faisait pas entendre à ce moment. « Pourquoi n’y-a-t-il personne qui soit capable de dire la valeur que la révolte peut avoir ? », se demandait-il alors.

Il répond lui-même à sa question en expliquant que les gens vivent encore avec la vision selon laquelle il faut à tout prix gagner une place confortable et ne plus trop s’en séparer. Vision qu’il considère désuète et déplorable.

Mentor ou élève

Gravitant dans le milieu artistique depuis des années, Robert Lalonde est un habitué de la relation mentor-élève. Dans ce milieu où la transmission de savoir est monnaie courante, il a pu y jouer, comme Tchékhov, le rôle de guide, mais aussi celui d’élève, notamment au Conservatoire d’art dramatique de Montréal. « J’ai eu un mentor en littérature et un autre en théâtre. L’un d’eux ne supportait pas ce que je faisais, il me regardait travailler et me disait : “Pourquoi tu te compromets pas plus que ça?” », raconte-t-il.

De cette relation, l’auteur retient surtout l’exigence de ses professeurs. C’est d’ailleurs une valeur, qu’il décrit comme n’étant pas très à la mode, qu’on retrouve dans le roman. Voyant un certain potentiel dans les lettres de son apprenti, Tchékhov lui demande d’écrire encore et encore, l’aidant ainsi à progresser toujours un peu plus.

« Je pense que c’est ça un mentor, c’est quelqu’un qui est capable d’être fraternel avec toi et en même temps très exigeant », croit l’auteur.

La bonne manière

Le petit voleur s’ajoute à une liste déjà longue de livres signés par Robert Lalonde. Il est donc évident qu’il a réussi à entrer et à perdurer dans le dur milieu qu’est celui de l’art québécois.

Le « truc » ultime selon lui ? « Trouver une façon qui nous convienne et l’imposer. Il faut se l’imposer à nous-même d’abord parce qu’il y a un certain acte de foi de croire en quelque chose quand on n’est pas sûr », révèle-t-il. Bien que ce soit inquiétant, c’est à cela, selon lui, qu’on reconnaît les grands artistes.

Robert Lalonde sera présent au Salon du livre de Québec qui aura lieu du 13 au 17 avril prochain. Pour lire la critique du Petit voleur, c’est ici.

Consulter le magazine