Joséphine Bacon - Image tirée du film

Je m’appelle humain : un poème devant la caméra

C’est l’automne et la lumière s’efface petit à petit, c’est un temps où plusieurs apprécient se blottir sous leurs couvertes en fin de soirée en ouvrant Netflix. Bien entendu, il ne s’agit pas de la seule plateforme qui offre du contenu à visionner; le site de l’ONF et ICI Tou.tv sont également très riches en métrages courts et longs, en documentaires et autres productions tantôt gratuites, tantôt requérant un abonnement. Regard sur une production de Terre innue réalisée par Kim O’Bomsawin qui traite de territorialité et de mémoire : Je m’appelle humain.

Réalisatrice : Kim O’Bomsawin | Production : Terre Innue

Par Sabrina Boulanger, journaliste multimédia

Photo de couverture : Joséphine Bacon, image tirée du documentaire

 

Pour celles et ceux qui apprécient la poésie, le documentaire Je m’appelle humain, réalisé par Kim O’Bomsawin, est un réel éclat de lumière qui présente la poétesse Joséphine Bacon, innue originaire de Pessamit. On y fait la rencontre de cette femme à la fois douce et fougueuse, à l’image du territoire qu’elle décrit. La poétesse ne se considère pas comme tel, tout au plus elle admet que « dans les mots simples qu[’elle écrit], les gens y trouvent leur poésie ». Le film expose avec délicatesse le regard que pose Bacon sur le monde qui l’entoure – il nous fait également visiter des morceaux de sa vie à elle : la rivière où elle a appris à nager, les rêves qui ont habité son esprit, le traversier qui l’a amenée au pensionnat. Les femmes du film racontent leur arrivée dans cet endroit qui leur était inconnu, dans cet immeuble de murs, de tellement de murs et de discipline, dans ce qu’elles vivaient comme une cage où elles ont été enfermées pendant plus d’une dizaine d’années.

Le mot « poésie » n’existait pas dans la langue innue, il a été inventé a posteriori. Mais le terme n’avait pas besoin de faire partie du vocabulaire pour que le concept imprègne la culture; aux dires de Joséphine Bacon, le peuple de nomades portait en lui une grande harmonie avec son environnement, qui l’imprégnait d’une poésie silencieuse. Le film est une petite fenêtre sur cette harmonie qui habite les pratiques et traditions innues, respect et gratitude en leur cœur.

Le plus beau du documentaire, en mon œil, réside dans la main délicate de la réalisatrice qui parvient à transmettre l’amour pour un espace, l’amour pour le passé. Il a la lenteur nécessaire pour faire naître chez le spectateur ou la spectatrice une complicité avec la protagoniste, un dialogue avec son environnement et sa mémoire. Il exprime merveilleusement bien le partage et la connivence, il révèle les vides et les peurs. Il est d’une transparence fraîche et saisissante, tout comme les femmes que l’on rencontre dans le film. Ces femmes parlent français parlent innu parlent la mémoire de leurs ancêtres, et exposent fièrement leurs interdépendances qui font leur force – les jeunes portent les aînés qui les guident et qui leur enseignent les récits et les savoirs.

Écouter Je m’appelle humain, c’est laisser diriger notre regard et nos oreilles sur ce qu’il faut regarder et écouter par la parole de Joséphine Bacon et de ses aînés-poètes qui l’inspirent, sous la perspective bienveillante de Kim O’Bomsawin. C’est écouter les mémoires qui gardent en vie le passé et s’enrichir des cultures que l’on avoisine. C’est un film d’une grande sensibilité où on sent l’infusion d’amour et de connaissance entre une aînée et sa jeune, puis entre le documentaire et son spectateur.

« Je sais que moi aussi un jour j’atteindrai l’horizon, et j’espère qu’il ressemblera à ça » – Joséphine Bacon, effleurant du bout des doigts cet horizon.

 

Lien vers le documentaire :

Je m’appelle humain | Je m’appelle humain | ICI TOU.TV

 

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