Tiré de Steam

Infernax : sang, aventure et démon rétro

Quelque part entre un hommage à l’époque 8-bit, un platformeur, un RPG et des montagnes de sang dignes d’un film de Tarantino on retrouve Infernax. Ce jeu créé par le studio montréalais Berzerk nous propose d’incarner le duc Alcedor qui, en revenant de croisade, trouve ses terres ravagées par des démons. S’en suit une quête épique visant à protéger les innocent.es et à bannir le mal de ses terres, sauf bien sûr si l’on décide de prendre une approche moins chrétienne…

Par Ludovic Dufour, chef de pupitre société

Infernax se déroule à la façon d’un side-scroller semblable à Castlevania 2 ou Zelda 2 dont les développeur.euse.s reconnaissent tirer l’inspiration. L’exploration du monde occupe une grande part du gameplay. Bien que la carte ne soit pas immense, elle regorge de boutiques, de personnages donnant des indices sur la marche à suivre et de quêtes secondaires qui permettront d’améliorer son personnage.

On peut donc, comme dans tout RPG qui se respecte, obtenir de nouvelles capacités, un meilleur équipement et recevoir de l’expérience qui permet d’augmenter sa vie, sa force ou ses capacités magiques. La progression est satisfaisante quand l’on constate que l’on vainc facilement des ennemis qui étaient au paravent bien plus coriaces. Notre arsenal magique offre pour sa part de plus en plus d’options à mesure que l’on apprend de nouveaux sorts bien que le sortilège de guérison reste un favori pendant la majorité du jeu.

À la manière d’un Zelda, les phases d’explorations sont entrecoupées de donjons à parcourir, remplis de pièges et d’ennemis. Cependant, ici on n’encontre pas d’immenses labyrinthes suivis d’énigmes, mais plutôt des sections d’action et de plateformes. C’est ici que la difficulté commence à croître. Les salles remplies de monstres s’enchaînent et le moindre saut raté peut vous tuer d’un coup. De plus, les points de sauvegarde ne se trouvent qu’à l’entrée des donjons, ce qui nous force soit à le finir d’un coup, soit à faire un aller-retour pour sauvegarder après avoir ramassé un objet important, comme un sort ou une clé. Après avoir traversé ces défis, chaque donjon se termine par un boss, souvent relativement simple, mais qui nous renverra encore au début en cas de gameover. D’un autre côté, les donjons sont assez courts, ce qui limite le temps consacré à ces détours, d’autant plus que les joueur.se.s les moins patient.es peuvent baisser la difficulté du jeu pour avoir une sauvegarde en milieu de donjon ainsi qu’une vie supplémentaire.

Pendant que nous sommes sur la difficulté, ce jeu est dur, surtout si on l’aborde mal. J’ai été décapité, empalé par des pics, brulé vif, transpercé d’une lance, noyé, bref on fait face à l’échec souvent. Autre aspect sur la difficulté, en respectant la tradition des jeux rétros, le joueur ne reçoit pas de marqueur lui indiquant le chemin à suivre. On doit bien écouter ce que les personnages nous disent pour recevoir des indices, tant pour la quête principale que les quêtes secondaires.

Bien que la difficulté soit au rendez-vous, le jeu reste juste. Toutes mes morts, bien que parfois frustrantes, étaient le produit de mes erreurs et non pas d’un jeu particulièrement cruel. Les quelques fois où je suis resté bloqué, un peu plus d’attention portée au dialogue a suffi pour me montrer la voie. Avec un peu de patience, on s’habitue et on rencontre bien moins de difficultés. L’astuce la plus importante étant de bien explorer, de faire le maximum de quêtes secondaires et d’achat d’équipement avant de se lancer dans un donjon. C’est un réflexe que l’on développe naturellement après avoir rencontré le pic de difficulté du premier donjon et il favorise naturellement un intérêt à l’exploration et la découverte.

Mais un jeu ne se compose pas que de son gameplay et pour faire un jeu rétro, il faut une direction artistique qui renvoie bien à l’époque 8-bit et c’est quelque chose qu’Infernax fait avec brio. Que ce soit la musique, qui nous ramène à l’époque de la première console Nintendo tout en collant à l’ambiance pesante du jeu, ou les graphiques en pixel art, qui malgré leur simplicité parviennent à représenter les démons les plus effrayants et les scènes les plus sanglantes. On se permet également d’offrir des images plus détaillées dans les moments clés, ce qui nous change de la seule vue en side-scroller. On donne de l’attention aux détails pour donner le côté gore cher aux développeur.euse.s, tel que le personnage se couvrant de chair coupée et de sang plus il tue d’ennemis. Ce savant mélange réussit à nous vendre l’image d’une terre désolée, peuplée de monstres et de violence. Et ce n’est pas un hasard, car s’il y avait une volonté de faire un jeu rétro de la part des créateur.rice.s, iels voulaient également faire un jeu qui n’aurait pas été acceptable de publier à l’époque, jugé trop violent pour l’industrie.

Côté histoire, on ne trouve pas une trame narrative bien complexe, mais encore une fois, on colle à un thème sombre. Des villages attaqués par des monstres, des paysans maudits et des cultistes; en gros, un monde de souffrance et de douleur. Le tout devient bien plus intéressant cependant quand l’on réalise que certains de nos choix peuvent influencer les évènements. Comme dit plus haut, on peut partir en croisade contre le mal, option qui semble la plus évidente, ou prendre des chemins plus sombres.

En effet, à différents moments, on nous propose des choix moraux. Achever un mourant ou tenter de l’aider; mettre au bûcher un démon ou tenter de le raisonner. Ces dilemmes en plus de l’accomplissement de quêtes secondaires influencent l’histoire et surtout la fin du jeu, et c’est à la fois une force et une faiblesse. Une faiblesse, car ce système de moralité n’est jamais clairement expliqué, on le devine tout au plus. De plus, plusieurs décisions qui semblent dans une zone morale assez grise sont perçues tout en noir ou tout en blanc par le jeu. Il en résulte que le.la joueur.euse risque fort d’avoir une fin neutre, que je trouve assez fade, lors de sa première complétion. Les développeur.euse.s affirment que c’est voulu, finir le jeu une première fois ne représente qu’un premier contact avec celui-ci.

C’est là la force de ce système de moralité. Bien que cette première conclusion soit décevante, on complète le jeu en une dizaine d’heures et voir les autres fins possibles donne franchement le goût de relancer une partie, ne serait-ce que pour la curiosité ? De plus, à chaque nouvelle fin découverte, on nous donne des indices sur des secrets cachés et des codes offrant de nouveaux avantages. On peut même débloquer, au détour d’une obscure référence à Tom et ses chums, un personnage secret remplaçant le duc Alcedor par un sorcier.

En résumé, Infernax est un plaisir à jouer, mais surtout à rejouer. Le gameplay est simple, mais satisfaisant et représente certainement un défi, même pour les joueur.euse aguerri.e.s. Le système de progression nous garde engagé et nous donne toujours envie d’aller plus loin pour voir quelle nouvelle capacité nous allons obtenir. Les graphiques tout comme le son nous transportent de 30 ans dans le passé, mais gardent une touche unique qui donne un charme glauque à l’univers. Finalement, bien que la fin puisse être en deçà de nos attentes, on ne manque pas de prétexte pour relancer l’aventure et découvrir de nouvelle chose.

On a aimé

Un gameplay rapide

Des phases d’actions et de plates-formes tendues

Un défi qui nous garde en haleine

Un niveau de difficulté réduit pour ceux qui préfèrent

Le système de progression

L’exploration et les quêtes secondaires

Une direction artistique impeccable tant au niveau sonore que visuel

Une aventure un peu courte, mais qui donne le gout de recommencer

On a moins aimé

La frustration apportée par des points de sauvegarde parfois éloignés

Les nombreux allers-retours entre les points de sauvegarde

Un système de moralité un peu obscure

Une conclusion décevante

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