Famille (a)normale

Pour une deuxième visite en autant d’années au Carrefour international de théâtre, Claudio Tolcachir et son Teatro Timbre 4 reviennent présenter à Québec l’une de ses productions. Après La omisión de la familia Coleman, El viento en un violin.

Cyril Schreiber

Encore une fois, l’auteur et metteur en scène espagnol explore le thème de la famille, une famille décalée où règnent les marginaux. Cette fois-ci, un couple de lesbiennes, Céleste et Léna, essaye d’avoir un enfant. Pour ce faire, elles choisiront Dario, un mésadapté social, qui s’avère être le fils de la bonne de Léna, lui-même tiraillé entre son psychanalyste Santiago et sa mère, chez qui il vit encore. Dario, bien sûr, viendra se mêler de cette histoire et voudra élever son enfant…

La pièce, présentée en espagnol avec surtitres français (ce qui crée une distance, un petit décalage avec l’action, malheureusement), se déroule dans un univers réaliste, intérieurs d’appartements où les dialogues résonnent tout aussi vrais. Ce réalisme, cette justesse dans le ton, est sans doute l’une des deux grandes forces de El viento en un violin : à la manière espagnole (c’est-à-dire verbomotrice, sentie et sans complexes), Claudio Tolcachir réussit à bien cerner cette situation complexe tout aussi actuelle que réelle, en explorant efficacement les thèmes de la paternité, de la maternité, de la marginalité et de la cellule familiale explosée.

Courtoisie : Magali Hirn

L’autre grande force, ce sont les six comédiens, tous excellents, qui campent à merveille leurs personnages inter-reliés, provenant de deux classes sociales (mais aussi de deux mentalités) différentes, qui s’affrontent. Avec El viento en un violin, comédie dramatique oscillant avec équilibre entre humour et tendresse, Tolcachir signe une très bonne pièce qui ne révolutionne rien mais fait passer un bon moment. En filigrane de ces questions sociales se dessine aussi l’absurde, le non-sens de la vie, une « libération » pour le personnage de la mère une fois accepté, même si le présent et le futur restent noirs et sans issue. À moins que la solution ne soit ce bruit du vent dans un violon, ou encore ce nouveau-né…

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