Pour une dernière fois, j’occupe le poste de chef de pupitre aux actualités d’Impact Campus. Dès l’automne, c’est Louis-Philippe Boulianne qui prendra la relève, un gars super sympathique en qui j’ai pleinement confiance.

Pour une dernière fois, j’occupe le poste de chef de pupitre aux actualités d’Impact Campus. Dès l’automne, c’est Louis-Philippe Boulianne qui prendra la relève, un gars super sympathique en qui j’ai pleinement confiance. De mon côté, d’autres projets m’attendent. En effet, la vie étant ce qu’elle est, c’est l’heure de passer «au prochain niveau».

J’ai donc décidé de me gâter avec une petite chronique «opinions», chose que je me suis empêché de faire durant mon mandat comme chef de pupitre pour des raisons bien évidentes. Je ne sais pas trop comment tout cela va sortir, mais je pense que simplement cracher le morceau est la meilleure chose à faire.

Parce que je ne sais pas pour vous, mais je nous trouve collectivement pris dans une espèce de vortex spatio-temporel, comme si nous vivions une inertie horrible. Au niveau politique, peu importe le palier de gouvernement, on a l’impression d’être dans un sketch de Monty Python.

Au niveau fédéral, les réformistes (je refuse d’insulter l’héritage conservateur en nommant ce parti par son nom officiel) continuent leur travail de destruction de l’État canadien. Environnement, économie, mesures sociales, tout y passe. Tant et si bien que j’entends de plus en plus de gens dire ouvertement qu’ils ne se sentent plus chez eux, comme si le Canada n’était plus leur pays. Ah!, s’il y avait opposition crédible, je dirais simplement qu’on a qu’à tasser ce gouvernement au prochain scrutin général. Cependant, non seulement le poids démocratique québécois s’amenuise continuellement, mais les deux autres choix possibles (les libéraux de Trudeau et les néo-démocrates de Mulcair) semblent trop occupés à danser entre deux chaises en tentant de satisfaire l’ouest canadien comme l’est. Tant et si bien qu’on se demande si l’un d’entre eux est réellement en position d’inquiéter le gouvernement Harper pour le prochain scrutin général prévu pour 2015.

Au niveau national, ce n’est pas vraiment mieux. Le PQ accumule les gaffes et les reculs plus rapidement que leur ombre en utilisant continuellement le prétexte du gouvernement minoritaire. L’opposition, quant à elle, joue aux enfargeurs systématiques en voyant bien que le gouvernement actuel tente de sauver la chèvre et le chou, ne se gênant pas pour dire le contraire de ce qu’ils ont dit en campagne électorale dans le but de faire mal paraître le gouvernement.

Au niveau municipal, c’est la galère. Les accusations de copinages, de collusion et de malversations s’accumulent et ça ne semble qu’être la pointe de l’iceberg. Au point où on se demande sérieusement si un seul jeune sera intéressé par la politique municipale un jour, probablement la plus importante des trois sphères politiques principales dû à sa proximité avec le citoyen.

Comment en sommes-nous arrivés là? Est-ce que la chose politique s’est toujours vécue ainsi et on commence simplement à s’en rendre compte?

Je parlais plus haut des jeunes, en politique. Si vous le permettez, je vais me faire le porte-voix de notre génération, un instant.

Mon grand-père m’a laissé en héritage cette maxime toute simple: “le but de tout humain est de se coucher chaque soir en se disant qu’il est fier de lui”. J’ose croire que les générations passent et que cette maxime reste bien vivante. Parlant de génération, laissez-moi être le porte-étendard de la mienne un instant.

J’ai 27 ans. On dit souvent de ma génération que la politique ne l’intéresse pas, qu’elle est nombriliste, que chacun d’entre nous ne pense qu’à lui-même. Mais entre vous et moi, est- ce qu’on peut vraiment nous blâmer? Soyons clairs: quand les décideurs publics nous offrent comme projet de société de dilapider nos ressources au profit de quelques intérêts privés pour une poignée de dollars, ça ne nous inspire rien. Quand ces mêmes décideurs publics renchérissent en nous disant que l’autre projet de société est de laisser des investisseurs trouer la Vallée du St-Laurent pour une poignée de dollars, ça ne nous inspire rien. Quand on nous lance comme grand projet de couper 4000 postes à Hydro- Québec en criant à tue-tête que c’est ça le changement, ça ne nous inspire rien. Quand on dit que nous devons financer les hôpitaux et les soins de santé au mérite, au volume et à la performance en laissant probablement de côté la recherche médicale, on a l’impression d’être que de simples numéros, que des bouches à nourrir. Quand on nous dit “peut-être, ça dépend des sondages, on vous en parlera en temps et lieu”, ça ne nous inspire vraiment pas. Quand on met la mauvaise gestion de la finance publique sur le dos des jeunes en augmentant les frais de scolarité ce qui a pour effet de les endetter de manière substantielle, on a juste plus le goût d’entendre parler la classe politique. Ben oui, comme par magie, dans ces moments-là, on perd tout intérêt envers nos décideurs publics.

Mais quand on nous parle d’un réel virage vers un développement durable comme héritage à laisser aux futures générations, on accroche. Quand on nous parle de gratuité scolaire dans le but de bâtir une vraie société de propriétaire, qui a ses propres entreprises et embauche des employés d’ici, on est intéressés. Quand on parle d’électrification de nos transports pour ne plus être esclaves des pétrolières et finalement arriver à une réelle indépendance énergétique, on sourit. Quand on parle de prendre en main notre destiné en ayant nos lois, nos impôts et nos traités commerciaux qui nous lient aux autres nations, on applaudit. Ben oui, comme par magie, on a le goût de se faire un pays qui nous ressemble et qui nous rassemble.

Est-ce vraiment si compliqué?

Le Québec n’a jamais été aussi efficace, performant et uni que lorsqu’il avait de grands projets. Hydro-Québec, par exemple. Les citoyens, l’État et le privé, main dans la main, décidé à faire du fleurdelisé un objet de fierté. C’est passé où, cette audace? L’avons-nous perdu en chemin?

Qu’on soit bleu, rouge, orange, vert ou au logo surréaliste multicolore: peu importe. Tout ce qu’on demande, c’est d’être fier de nous en se couchant le soir…et avoir hâte de se réveiller le lendemain. Est-ce vraiment trop demandé?

Je termine donc avec un message clair à la classe politique: nous ne sommes pas de la marchandise électorale à consulter aux quatre ans. Nous sommes le peuple. Nous sommes vos employeurs, ceux qui vous ont élu. Alors, retombez sur Terre et cessez de penser à vos petits intérêts personnels.

Merci à tous les lecteurs d’Impact Campus, j’ai passé un très bon moment.

Jérôme Boucher

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