Analyse du projet de loi sur la numérisation du patrimoine culturel

Numériser de toute urgence

Quelques jours après le début de la consultation du projet de loi sur la préservation du patrimoine, l’enjeu de la numérisation des biens culturels québécois reste un point important, malgré quelques appréhensions parmi les professionnels.

Fin 2010, l’opposition officielle critiquait Mme Christine St-Pierre, ministre de la Culture, des Communications et de la Condition féminine, pour son manque de réaction concernant certaines archives historiques volées et conservées par les États-Unis. Yves-François Blanchet, porte-parole de l'opposition officielle en matière de culture et de communication, a avancé la nécessité de numériser ce patrimoine.

Les dangers seraient nombreux. Au fil des ans, à la suite d’une inactivité gouvernementale, des archives se perdent ou sont délocalisées vers de plus gros centres. Les municipalités de petite et moyenne taille se retrouvent dépossédées. Et d’autres craignent le transfert de responsabilités parce qu'elles n'ont pas ou peu de moyens ni les expertises requises. « On est tous pour une meilleure reconnaissance, préservation et démocratisation de notre patrimoine culturel », a précisé M. Blanchet.

Population mobilisée

De nombreux organismes, tels que Bibliothèque et Archives nationales du Québec (BAnQ) et la Société des musées québécois (SMQ), se sont mobilisés pour appeler à une plus grande précaution du patrimoine. Ils ont lancé, il y a quelques jours un Appel à la numérisation du patrimoine québécois, afin de renforcer leur position à la consultation du projet de loi. « Nous devons tous appuyer les efforts de numérisation et de diffusion du patrimoine québécois afin de contribuer à la survie et au développement de notre identité collective », a indiqué Michel Perron, directeur général de la SMQ.

Le but ultime est de créer un réseau patrimonial numérique québécois. Ainsi les transferts, les prêts et les récupérations de données et de documents seront plus simples. Alors que l’opposition dit garder les yeux ouverts face aux décisions du gouvernement, elle s’attend à ce que des actes concrets soient pris. M. Yves Blanchet explique que « le projet de loi ne doit pas être l’objet d’un simple brassage administratif, mais une véritable mise en valeur du patrimoine».

Précautions à prendre

Cependant malgré une quasi-unanimité au sein des professionnels, d’autres émettent des réserves face à l’urgence que peut décréter BAnQ ou la SMQ. En effet, la numérisation parait être la seule solution pour pallier au problème. M. Sébastien Tessier, archiviste au Centre d’archives d’Abitibi-Témiscamingue, est sceptique. Il précise qu’on ne peut garantir la survie du numérique dans quelques décennies. « Le document numérique est un très bon outil, mais il n’a pas la valeur du document original. Lorsqu’il devient un élément de préservation, il faut être très prudent. On pensait révolutionner la vidéo avec le Beta ou le VHS, regardez où nous en sommes aujourd’hui. » Selon lui, l’importance dans ce nouveau cheminement de préservation est de ne pas prendre le numérique comme acquis à jamais, mais plutôt de se prémunir d’autres outils complémentaires.

Il y a cinq ans, après une consultation à l’échelle de la province, BAnQ a dressé un état des lieux de la numérisation patrimoniale au Québec. L’enquête, menée par BAnQ et la SMQ, a mené à plusieurs résultats. À savoir que le taux actuel de numérisation au Québec est d’environ 6%, et que la volonté des organismes responsables serait d’intensifier le réseau de collaboration entre les différents centres d’archives.

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