Stress oxydatif et ions de calcium

La maladie de Parkinson est une maladie neurologique qui affecte le système nerveux central et qui entraîne une perte de contrôle progressive des capacités de mouvement.

L’hypothèse la plus répandue au sujet du mécanisme par lequel ces cellules dégénèrent est qu’il s’agirait de l’œuvre du stress oxydatif. Ce dernier surviendrait lorsque les cellules sont surutilisées et produisent de l’énergie.

Ces neurones hyperactifs sont inhabituels, car ils génèrent une activité électrique rythmique qui entraîne un flux anormal  d’ions de calcium dans les cellules. Or, la régulation des niveaux de calcium à l’intérieur des cellules est extrêmement importante. Dans une cellule surutilisée, parce qu’atteinte de Parkinson, les ions calcium qui doivent normalement être expulsés de la cellule se trouvent donc en plus grand nombre. Le processus d’expulsion requiert évidemment de l’énergie, et les chercheurs croient que cette surcharge de travail pourrait générer un stress oxydatif supplémentaire.

C’est l’équipe du neurophysiologiste James Surmeier, de la Northwestern University de Chicago, qui a permis de mettre en évidence que ce processus d’expulsion des ions de calcium «stresse» les neurones et cause leur mort précoce. Leur recherche parue dans le magazine Nature met du même coup en évidence qu’un médicament utilisé dans le traitement de la pression sanguine élevée et qui a pour effet de bloquer les ions de calcium pourrait être efficace dans le traitement de la maladie de Parkinson. En effet, ce médicament (l’isradipine) rendrait les neurones moins vulnérables aux agents de stress oxydatif rencontrés dans le microenvironnement.

Thérèse Di Paolo, professeure au département de pharmacie de l’Université Laval, estime qu’il «s’agit d’une étude intéressante» dont la publication dans «l’un des plus prestigieux périodiques de recherche au monde» augmente la crédibilité, mais qu’«il faudra valider dans des études cliniques chez l'humain». Mme Di Paolo étudie comment traiter et prévenir les effets secondaires de la Lévodopa, le médicament le plus utilisé et le plus efficace à ce jour pour traiter les symptômes moteurs du Parkinson. «Il y a plusieurs traitements symptomatiques de la maladie de Parkinson, mais aucun traitement pour guérir la maladie ou pour arrêter sa progression», rappelle-t-elle.  

Unanimes
Les avis des experts de l’Université Laval pour la maladie de Parkinson sont unanimes : «en termes d’application clinique, tenter de bloquer les canaux ioniques [de calcium] est une hypothèse valable qui mérite d’être vérifiée avec les médicaments déjà sur le marché», estime Frédéric Calon, professeur à la faculté de pharmacie. «La sélectivité des composés posera surement des problèmes, mais il faut l’essayer tout de même», croit-il.

Par ailleurs, Claude Rouillard, professeur au département de psychiatrie et de neurosciences, ajoute que «même si ces drogues sont couramment utilisées en thérapeutique et sont des médicaments sécuritaires, il y a des questions importantes que l’on peut soulever. Premièrement, les premiers symptômes du Parkinson apparaissent seulement lorsque la maladie est relativement avancée; c’est-à-dire lorsqu’il y a une diminution de la dopamine d’environ 80% dans le cerveau». À ce moment, précise-t-il, «il est plausible que l’on puisse ralentir la progression de la maladie, mais il serait plus difficile de la  stopper et encore plus de la renverser». Il souligne également que «le stress oxydatif est une cause parmi plusieurs de la dégénérescence des neurones dopaminergiques. Il se pourrait donc que, chez plusieurs patients, la cause de la dégénérescence de ces neurones soit d’une autre origine que ce stress oxydatif, rendant ainsi inappropriée l’utilisation de ces drogues», soulève-t-il.

Toutes les expérimentations réalisées dans le cadre de l’étude ont été réalisées in vitro sur des neurones de souris. Un énorme pas reste à franchir entre ces données et la mise en marché de médicaments efficaces. «Il faut donc toujours être prudent dans l’interprétation de nos résultats de recherche», souligne le Dr Rouillard. «Les connaissances avancent rapidement, mais il faut éviter de créer trop rapidement de faux espoirs», tempère-t-il.  

Enfin, une étude de phase II pour tester la tolérance des patients atteints de Parkinson à l’isradipine est déjà en cours sous la direction de l’équipe de Surmeier. Il s’agira ensuite de vérifier si le traitement se montre concluant. Si tel est le cas, l’isradipine pourrait devenir le premier médicament qui permettrait de ralentir la progression du Parkinson.

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