On a tous déjà ressenti ce sentiment d’optimisme incroyable, celui de mieux parler la langue une fois qu’on a acheté son premier manuel d’allemand,

On vit dans le futur

On a tous déjà ressenti ce sentiment d’optimisme incroyable, celui de mieux parler la langue une fois qu’on a acheté son premier manuel d’allemand, celui d’être plus intelligent dès qu’on entre dans une bibliothèque, celui de mieux connaître son domaine dès qu’on commence un cours.

J’y pensais hier, alors que je me passais la soie dentaire. D’ailleurs, quand mon dentiste me demande si je me passe la soie dentaire, je me retiens toujours pour lui demander «si c’est si important, pourquoi avez-vous besoin de me le demander? Ça devrait être évident, non?». À chaque fois, je me rappelle qu’elle a entre ses mains une panoplie d’instruments de torture et que je suis en position de relative soumission. Je me ferme la bouche au sens figuré en la gardant ouverte au sens propre. Fin de la parenthèse.

C’est un peu ce qui s’est passé pour moi quand j’ai découvert Wikipédia il y a quelques années. À l’époque, la version française était tellement incomplète que c’est la version adolescente de votre humble serviteur qui a démarré l’article sur l’«angle». Ça ressemblait à ça:

    «Point de croisement de deux segments, demi-doites ou droites. Un angle peut être mesuré (degrés) selon l'inclinaison d'un des segments par rapport à l'autre.

    Voir: Géométrie, Trigonométrie.»

En 2004, même ces deux phrases et demie avec une faute d’orthographe valaient mieux qu’une page vierge. Dès le lendemain, j’avais cédé ma place à des spécialistes qui ont étoffé l’article jusqu’à un merveilleux recueil illustré de plusieurs pages et bourré de liens vers plus d’articles bien étoffés.

Après dix ans d’existence, nul ne peut encore se payer le luxe de prendre Wikipédia de haut. Avec Google et Facebook, l’encyclopédie joue le rôle de colonne vertébrale du Web, servant à organiser la recherche, la découverte et le trafic sur le réseau. Trois structures d’une grande importance qui ont d’ailleurs trois visions du réseau. Si Facebook mise sur l’attrait populaire d’un jardin fermé spécialement fait pour les interactions sociales de tous les jours, Google a clairement axé sa stratégie sur la supériorité technologique de ses outils.

Pour Wikipédia, c’est une particularité d’ordre idéologique qui s’impose. On a fait grand cas de l’«économie du savoir» ces dernières années, mais force est de constater que les prochaines années seront placées sous le signe du contrôle de l’information. Le pavé que Jimmy Wales et Larry Sanger, les instigateurs de Wikipédia, ont lancé dans la mare, prouve que le pouvoir collectif peut être efficace pour construire. Après tout, le renouveau de l’information libre et collaborative passe par un homme d’affaires ayant fait fortune, entre autres, dans les «intérêts masculins» et par un docteur en philosophie idéaliste.

Personne n’aurait deviné que le futur, dans le fond, ne s’apparenterait qu’à une rentrée scolaire permanente où nous sommes devant une mine d’or de connaissances. Maintenant, ce qu’il reste à imaginer pour une vraie science-fiction est un monde où les humains sont capables d’organiser le tout et où l’absence de caries signifie la fin de la soie dentaire.

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Vendredi dernier, des membres de notre équipe étaient au Pavillon Alphonse-Desjardins, au milieu des autres associations étudiantes, pour rencontrer les nouveaux arrivants intéressés à participer au journal. Ce genre d’événement est toujours agréable pour nous et j’en profite pour vous inviter à venir nous rencontrer, toute l’année, à nos bureaux. Si vous préférez vous servir de votre clavier, tapez donc redaction@impact.ulaval.ca dans l’en-tête d’un courriel, écrivez ce que vous pensez et envoyez-moi le tout!

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