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Pax Kingz est le nouveau venu dans l’univers cosmique de la musique dubstep, une nouvelle mouture hybride rassemblant le hip hop instrumentale et l’électro, popularisée magistralement par l’album Los Angeles de Flying Lotus. Le duo est constitué de beatmakers d’expérience de la Ville de Québec, Maxime Robin et Pascal Asselin A.K.A. Millimetrik. Tout ce qui a fait du dubstep ce qu’il est – des grosses basses bouillantes faisant résonner vos parois cervicales, un gros beat, des samples synthétiques et des sons interstellaires – se retrouve présent en abondance sur l’album. Par exemple, on y rencontre en alternance des sonorités orientales et organiques, puis cosmico-chimiques, comme sur la pièce «Grandilo», ce qui produit, malgré tout, un résultat bien cohérent et convaincant, livré avec une esthétique de films de monstres japonais.

Bien que la formation soit relativement jeune, l’expérience des deux musiciens a permis de façonner un son assez solide, qui permet de rivaliser avec les formations du même genre. La seule chose que l’on pourrait déplorer, après des écoutes répétées de l’album, c’est de n’avoir peut-être pas réussi à saisir ce petit quelque chose qui rend parfois ce type de musique presque «magique». L’album ne donne pas l’impression d’être amputé ou déficient pour autant, bien au contraire, mais semble témoigner d’un désir avoué de faire paraître un album avant l’été. D’ailleurs, cette parution permet à la formation, d’une part, de participer aux marathons de festivals musicaux, notamment à une performance à Mutek, mais aussi d’embarquer dans la mouvance galactico-planétaire au terme de laquelle le dubstep se sera logé dans la discothèque des mélomanes d’ici et d’ailleurs. Malgré tout, Pax Kingz est une parution assez intéressante, qui témoigne d’un bon amalgame d’influences transcendantales old-school et new-school.
 

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Pour le second volet de sa trilogie Radiolarians, Medeski Martin & Wood, ce célèbre trio formé en 1991 à Brooklyn, a su réinventer son son tout en le revisitant. Ce qui frappe d’abord, c’est le double caractère de l’album, accrocheur et expérimental à la fois. En ce sens, l’album se compare assez bien au précédent, bien que cette nouvelle parution soit davantage accrocheuse et un peu moins expérimentale. Dès le début, le trio s’impose avec un funk très électrique et éclectique, dirigé à la perfection par la section rythmique, le tout agrémenté du doigté de John Medeski. Alors que le précédent Radiolarians revisitait davantage le son expérimental développé avec les reprises des pièces de Masada et John Zorn sur Zaebos, celui-ci se situe plutôt entre ces expériences sonores et le son classique et groovy de MMW datant de leurs années sur la très réputée étiquette de disques Blue Note.

L’album oscille abruptement entre des moments festifs et d’autres plus mélancoliques. Il expose tantôt des moments intenses et techniques, puis des moments d’une simplicité et d’une sobriété élégante. Curieusement, l’album trouve malgré tout une certaine constance et une évidente cohésion tout au long de ces variations, aussi surprenantes que convaincantes. Si les recherches effectuées sur le premier album ont été injectées et développées dans les sonorités classiques du second, tout porte à croire que le troisième et dernier Radiolarians, prévu pour la fin 2009, devrait poursuivre la relecture stylistique avec davantage d’assurance et de finition.

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Land Of Kush est le projet cavalier du jazzman montréalais Sam Shalabi. Entouré ici d’un orchestre à géométrie variable, il développe des sonorités hybrides résultant d’un travail d’expérimentation hors du commun. La formation est née au cours du festival annuel Suoni Per Il Popolo à la Casa del Popolo et à la Sala Rossa, à Montréal.

Si on est d’emblée piqué au vif par une longue introduction expérimentalement électrisante et troublante, la formation amorce sans transition la première véritable chanson d’Against the Day sur une pulsation grimpante et envoûtante qui nous tient captif au sein des sonorités exotiques. On y retrouve assez rapidement des voix agencées à la trame de violon typiquement orientale. La mélodie se construit ainsi progressivement sur un fond intarissable de vibrations incisives. Les pièces sont, pour la plupart, assez longues. Elles permettent donc aux mélodies cérébrales de pénétrer notre cerveau et d’hypnotiser nos neurones musicaux.

Comportant des membres de plusieurs formations montréalaises, l’orchestre Land Of Kush offre un savant syncrétisme de post-rock-mystique dans la veine de Grails, de jazz à saveur indienne, comme celui de Rudresh Mahanthappa, et de musique expérimentale presque ambiante. À la fois déroutant et fascinant, le projet de Sam Shalabi, également membre fondateur de Shalabi Effect, impressionne par sa maturité et son inventivité. Chaque instrument y est savamment mis à contribution dans un vaste mouvement de charme aussi hypnotisant que savoureux. Les voix, masculines ou féminines selon la chanson, se marient parfaitement à la trame musicale pour produire des résultats plus que convaincants.
 

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Daniel Dumile de son vrai nom, anciennement MF DOOM, s’appelle maintenant DOOM seulement. Son plus récent opus, Born into this devrait combler les attentes presque démesurées des fans de ce fameux rappeur masqué. Si on a continué de l’entendre sporadiquement grâce à ses nombreuses et parfois douteuses collaborations, Born into this est sa première parution solo depuis l’excellent MM…Food? paru en 2004. Ici, on retrouve les bons vieux textes crus et humoristiques de DOOM, ainsi que le même don pour des titres à la fois drôles et louches. Si certains des instrumentaux sont un peu recyclés de ses Special Herbs ou empruntés à d’autres beatmakers, l’essentiel de l’album est constitué de tout nouveau matériel et témoigne de la solidité du flow de ce MC hors pair.

Mises à part quelques pièces plus faibles, dont la plupart sont issues de collaborations avec d’autres rappeurs ou rappeuses, l’album est excellent du début à la fin. Il contient une belle poignée de joyaux qui nous accompagneront pour les années à venir. Pour ne nommer que celles-là, les pièces «Ballskin», «Microwave Mayo», et «That’s That» sont d’excellents exemples de pièces qui, en plus d’être construites sur de très bons beats, se terminent de manière tonitruante par l’énonciation du titre. DOOM est passé maître depuis belle lurette dans l’art d’incarner son propre rôle de vilain d’univers de super héros, notamment avec les deux Madvillainy en compagnie de Madlib et les deux albums sous le pseudonyme Viktor Vaughn. On retrouve cet univers, à découvrir ici, dans toute sa splendeur.

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Ingénieux travail de recherche et de montage de la part d’Exile, ce beatmaker qui a multiplié les collaborations fructueuses ces dernières années, sur Radio, son plus récent album. Alex Manfredi de son vrai nom, originaire de San Diego, fait partie de la grande famille des producteurs de hip-hop instrumental de renom, suivant de près ses influences avouées comme le défunt J Dilla et le prolifique Madlib. Radio est son deuxième album solo en deux ans et demi et comporte un mélange éclectique de musique électronique et de hip-hop instrumentale.

Le titre indique bien le concept de l’album et toute la démarche créatrice de l’artiste.Après avoir enregistré ce qui jouait à la radio pendant des heures et des heures, Exile a complètement déconstruit, découpé et rafistolé des extraits de divers acabits afin de créer une musique nouvelle et unique par l’alliage de ces petits morceaux sonores d’origine radiophonique. Ainsi, on y retrouve tantôt des samples de rappeurs connus, tantôt des phrases prononcées par des animateurs, des morceaux d’annonces publicitaires, des fonds musicaux de soul, de jazz, d’électro, etc.

Le résultat est plus que convaincant, car Exile parvient à engendrer des véritables et authentiques grooves grâce aux petits morceaux disjoints nouvellement réunis. C’est assez impressionnant de voir le travail de montage, qui aurait pu donner par contre naissance à quelque chose de beaucoup plus expérimental, accrocheur, unique et fascinant. Le résultat est parfois planant, parfois entraînant, mais toujours captivant. À découvrir !

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Mi Ami, trio originaire de San Francisco, offre sur Watersports, ce premier album complet, un avant-goût assez net de la folie primesautière perceptible dans ses compositions et ses performances scéniques. S’il semble, à la première écoute, invraisemblable que les voix à la fois torturées et éthérées qu’on y retrouve soient issues des cordes vocales d’un homme, Daniel Martin McCormick, on en vient à apprécier malgré tout le caractère ingénu et déroutant de ces performances phoniques de celui qui est également le guitariste. L’hypnose et la dissonance sont effectivement au rendez-vous, sur fond de rythmes carrés et de lignes de basse minimalistes et efficaces, gracieuseté de Jacob Long qui, avec le chanteur-guitariste, évoluait auparavant au sein de la formation Black Eyes. Les effets de guitare contribuent également bien à façonner ces paysages sonores confondants où l’on pourrait s’assoupir si ce n’était de la performance vocale hyperactive et délurée du guitariste.

La formation, complétée par la batterie pulsative de Damon Palermo, arrive toujours à façonner des murs de son assez captivants pour encourager des écoutes répétées et assidues. Sans être accessible à tous, l’album gagne toutefois à être connu, car il parvient tout de même à engendrer des passages décidément plus accrocheurs, bien alternés avec les moments déroutants. Préparez-vous pour un rendez-vous dissonant d’union des contraires, matérialisée musicalement avec beaucoup de dynamisme et d’obscurité énergétique. À découvrir avec tolérance et flexibilité auditive, deux qualités qui seront récompensées par la découverte d’un son psychédélique et audacieux, voire risqué, mais très intéressant.

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La Maladresse, jeune formation originaire de Lévis, donne dans le math-rock expérimental aux accents punk. Elle nous offre sur ce premier album éponyme complet un intéressant amalgame de compositions aussi percutantes les unes que les autres. Le son du groupe est difficile à définir ou à comparer et s’inspire probablement d’une pléthore de formations bien établies dans le domaine du rock technique et angulaire.

On retrouve ici huit pièces d’une grande qualité et d’une fougue hargneuse et abrasive, incitant fortement à bouger la tête, quitte à la rentrer dans les murs. Les riffs mordants sont aussi mémorables et accrocheurs qu’inusités et déroutants. Bien que la formation soit un duo composé seulement d’une guitare et d’une batterie, le son ne souffre pas tellement de l’absence de plus d’instruments et parvient malgré tout à  atteindre des profondeurs remarquables. Ce qui n’est pas sans rappeler le travail en duo de la formation Hella, mais qui se trouve ici moins hypnotisant, répétitif et chirurgical.

Sur cette musique convaincante et énergique vient se greffer des voix un peu screamo et agressives. Assez peu présentes, elles viennent toutefois s’imbriquer avec succès dans les failles du mur de son généré par le dynamique duo. Le son du groupe est surtout efficace dans les moments chaotiques plus calculés, comme sur la pièce «Le rêve», l’une des plus puissantes de l’album.

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Bien que The Happiness Project soit un album difficilement catégorisable, reste qu’on y retrouve du jazz sous une forme ou une autre. Né d’enregistrements de conversations avec des gens heureux, conversations qui sont ensuite décortiquées et montées de telle sorte qu’elles permettent d’y adjoindre une trame musicale directement imbriquée, le plus récent projet du bassiste et compositeur canadien Charles Spearin étonne par son caractère novateur. Incomparable, on y retrouve tantôt une sorte de spoken word adjoint d’une trame musicale, où piano, trompette ou basse accompagnent à la note près chacun des mots, tantôt des envolées lyriques plus planantes, analogues à celles de ses autres projets. Le tout, enrobé d’une espèce de jazz ludique et imaginatif.

Pour quiconque a déjà vu une performance de la formation Do Make Say Think au sein de laquelle Charles Spearin évolue, il s’en dégage un positivisme intarissable et quasi cosmique qui induit automatiquement au spectateur une bonne dose de bonheur et de contentement. Quelque chose d’analogue est ici à l’œuvre. Les conversations enregistrées et rééditées renseignent sur les aspirations toutes simples de ces individus, pour la plupart immigrants, qui semblent avoir trouvé la recette d’un bonheur tout simple. Certains évoquent des souvenirs de jeunesse, d’autres font allusion à la joie que leur induisent les bonnes relations qu’ils entretiennent avec leurs voisins.

Ainsi décrit, l’album semble extrêmement étrange et particulier, et c’est d’ailleurs le cas. Toutefois, le bonheur qui émane du produit final est indescriptible et rafraîchissant. Osez l’écouter !
 

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À la fois audacieux, imaginatif, éthéré, déroutant, convaincant, fascinant, repoussant et constant, Merriweather Post Pavilion, la douzième parution de la meute américaine Animal Collective, comble les attentes démesurées alimentées par les récents bons coups de la formation. Rien de si étonnant pour les fans, car la recette habituelle est encore une fois appliquée avec succès, grâce à une fusion unique d’un mur de son électro-pop psychédélique, parfois atmosphérique, parfois accrocheur et parfois répulsif. Extrêmement difficile à caractériser, l’album mérite sans contredit des écoutes répétées pour être apprécié à sa juste valeur, car son lyrisme y est souvent entaché par le caractère expérimental des sonorités développées ici.

Encore une fois, les voix fournies par Panda Bear donnent à l’album sa saveur unique, tout en occultant au passage certaines ambiances qui auraient pu mériter davantage d’air. On dirait que les voix contraignent l’auditeur à se situer dans un registre d’écoute particulier alors que la trame sonore lui laisse davantage de liberté. Des paroles obscures, symboliques ou évasives sont matérialisées par l’unique vocaliste et comme par le passé, cela doit contribuer au succès général de cette entreprise unique.

Les pièces les plus efficaces sont sans contredit celles dominées par un bon pulse, qui donne aux compositions une direction plus nette et un fil conducteur moins ténu que sur la plupart des autres pièces. Un album aussi exigeant que gratifiant, probablement parmi les plus importantes parutions indie de 2009.  
 

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French Miami, trio math-rock/art-rock/post-punk de San Francisco, s’apparente autant à Battles et Don Caballero qu’à Animal Collective par moments. Des riffs mordants, psychédéliques et mélodiques, qui rappellent le travail de Hella dans le genre. Ajoutez des synthétiseurs et des voix nerveuses, une rythmique bien définie, hypnotisante et concentrique, et vous commencerez à avoir une idée de ce qui est en vigueur ici.

Certaines pièces sont dominées par une facture sonore pop, comme «Science Fiction», alors que d’autres sont davantage expérimentales. Autant angulaire qu’accrocheur, le son de la toute jeune formation est déjà bien défini et assez riche sur ce premier opus éponyme. Des grooves bien ficelés et des moments plus planants s’y alternent efficacement et en toute simplicité. Comme deux des trois membres de la formation sont multi-instrumentistes, les sonorités développées ne semblent jamais réellement s’essouffler ou faire preuve de lacunes, le son demeure toujours assez plein. Des mélodies abrasives et accrocheuses sont donc confectionnées efficacement et ludiquement par les trois membres du groupe.

L’échine du son du groupe, c’est la batterie de Chris Crawford, mais les performances simultanées au synthétiseur et à la guitare de Roland Curtis contribuent à mettre de la chair autour de l’os. Tout comme d’ailleurs celles du chanteur Jason Helselmann qui, en plus des voix, s’occupe d’un second synthétiseur, d’une guitare supplémentaire et de percussions additionnelles. L’absence d’une véritable basse n’implique jamais que le son du groupe en écope, car les synthétiseurs prennent habilement la relève pour produire les basses fréquences. Agréable surprise !

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Maus Haus propose, avec son premier album Lark Marvels, de la pop-rock expérimentale fracturée, avec une généreuse dose de synthés dominant la facture sonore. Ce sextet de San Francisco est visiblement influencé par le psychédélisme des années 1960 et 1970, ainsi que par certains groupes précurseurs de l’électronique. Le style est définitivement rétro, avec des éléments progressifs et surf rock fondus dans l’amalgame expérimental qui résulte de leur fusion des styles. Les influences fusent en fait de toutes parts, de Silver Apples à Portishead en passant par les United States of America, ce qui procure aux sonorités développées par la formation un éclectisme dynamique et surprenant, sans toutefois que le résultat ne soit déroutant.

Les synthétiseurs volent effectivement la vedette ici, au point que le rock de la formation devienne autant caractérisé par son appartenance à l’électronique qu’à un genre de indie-grunge nouveau genre. En fait, on dit de ce son qu’il s’inscrit autant dans la foulée de Battles et qu’il est un clin d’œil à Captain Beefheart. On a vu le band par le passé faire la première partie de Black Moth Super Rainbow et Fourtet, ce qui témoigne encore davantage de ses affinités avec la musique électronique. On peut déplorer le fait que l’album soit inégal, car certaines pièces sont un peu tièdes et mélancoliques, bien que la formation excelle surtout dans les enchaînements entre des climax assourdissants et des mélodies synthétiquement sucrées. Un son à la fois vaporeux et abrasif, à découvrir.
 

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For All I Care est le déroutant sixième album studio des vétérans new-yorkais du jazz déconstruit, The Bad Plus, qui s’allient ici avec une chanteuse, Wendy Lewis, pour poursuivre leur entreprise de relecture de la musique populaire d’hier et d’aujourd’hui. En entendant l’album, on constate d’emblée que coucher une voix sur une telle musique est une entreprise difficile. Ainsi, la musique en écope à certains moments où la voix de la chanteuse, un peu trop standard pour les Bad Plus, prend l’avant-plan des compositions et reprises qui constituent l’album. Malheureusement pour Lewis, c’est surtout sur les interludes instrumentaux que la vigueur créative et déconstructrice du trio atteint encore une fois des sommets d’inventivité.

Si on décortique l’album, on constate que la première pièce, une reprise de «Lithium», de Nirvana, est de loin la plus efficace des pièces chantées, ce qui n’est pas étranger au fait que le chaos musical généré par l’audacieuse formation y vole la vedette. S’ensuit une reprise de «Comfortably Numb», de Pink Floyd, qui imprègne de perplexité, à moitié émouvante et à moitié décourageante par son lyrisme excessif. Quelques autres pièces, originales ou reprises (l’obscure reprise de «Barracuda», entre autres), où se couche la voix de Lewis laisseront l’auditeur assez froid par leur manque d’inventivité qui contraste de manière décevante avec ce à quoi la formation nous a habitué. On peut déplorer nostalgiquement que l’opus ne soit pas véritablement un album authentique de The Bad Plus, mais bien plutôt un spin-off venant enrichir leur univers unique et fascinant.

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Money est le cinquième opus officiel de Skeletons, quartet originaire de l’Ohio et désormais basé à New York. L’album s’inscrit en continuité avec l’expérimentation de la formation amorcée précédemment. Skeletons, qui a d’abord vu le jour comme projet solo de Matthew Mehlan, ne s’est jamais assis sur ses lauriers et s’est plutôt évertué à redéfinir les normes de la composition musicale grâce à un judicieux amalgame de sonorités diverses. Le band nous offre désormais des sonorités oscillant nerveusement entre un indie rock déjanté et polyrythmique et un free jazz déroutant, genres au sein desquels sont également greffés des guitares afrobeats, des cuivres imprévisibles et des percussions hétéroclites.

Après une courte pièce d’introduction où tonitruent de multiples klaxons sur fond de piano et de voix effacée, on voit poindre des pièces donnant tout de suite le ton au reste de l’album. Celles-ci nous introduisent donc immédiatement aux structures polyrythmiques complexes que le groupe a préconisées ici. On y retrouve un vocal rappelant celui de Thom Yorke, de Radiohead, sur un fond de funk infectieux, incitant l’auditeur à entrer dans la grande danse macabre organisée par ces sympathiques moribonds. Cette description rend bien justice à la majorité des pièces, mais n’épuise pas l’étonnante variété en vigueur ici. On retrouve donc parallèlement des sonorités presque contemporaines, ce qui est autant déroutant que rafraîchissant. Enfin, certaines pièces plus traditionnelles viennent compléter le paysage façonné par ces êtres squelettiques, se décrivant eux-mêmes comme une «unité de divertissement». Pour les mélomanes téméraires !

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Pour son quatrième album sur autant d’étiquettes de disques, Crime In Choir reprend exactement là où l’album précédent, Trumpery Metier, nous avait laissés. Sont encore une fois à l’œuvre, dans Gift Givers, les sonorités prog revival qui ont fait la notoriété de ce septuor originaire de San Francisco. Les mélodies complexes et grandioses sont toujours aussi efficaces, tout comme les longues ascensions d’intensité que l’on retrouve dans plusieurs pièces. Sans réinventer complètement leur son, ils lui adjoignent toutefois de nouvelles ambiances, laissant davantage de place à des atmosphères planantes qui peuvent patiemment s’installer, parfois sur des morceaux entiers.

La pièce titre, «Gift Givers», nous met tout de suite dans le bain quant à ce qui est confectionné par la jeune formation. On y retrouve effectivement des sonorités typiques des synthétiseurs Moog, bien présentes tout au long de l’album. Les solos de guitares électriques, quelque peu passéistes, s’agencent toutefois très bien avec l’esthétique générale du groupe, qui s’évertue depuis neuf ans à développer le rock progressif instrumental afin de lui donner une actualité convaincante. Les compositions du groupe ne sont toutefois pas confinées dans ce territoire vintage qu’est le progressif, car elles sont influencées par des styles plus récents, comme le math-rock, intégré ici au sein d’une démarche à la fois expérimentale et accessible. Les beats sonnent comme du disco, alors que les synthétiseurs alimentent le côté progressif, pour donner une esthétique «années 1970 du futur», un peu à l’image d’un commandant de vaisseau spatial arborant de magnifiques pantalons à pattes d’éléphant.

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La jeune formation australienne Pivot a récemment fait paraître son second opus, mais son premier sur l’étiquette de l’heure, Warp Records.

Puisant ses influences dans la musique d’une pléthore de formations toutes aussi diverses les unes que les autres (Vangelis, Arcade Fire, Aphex Twin, Lightning Bolt, Kraftwerk, Talking Heads, etc.), Pivot réussit tout de même à se confectionner un son qui lui est propre et qui cadre bien dans l’esthétique warpienne. Parfois planant, au bord du shoegaze, parfois électro/math-rock, parfois lourd et glauque, le son de O Soundtrack My Heart est riche en textures puisées dans les années 1980 et modernisées. Le fait que l’album soit réalisé par John McEntire, le mastermind de la formation Tortoise, contribue à diversifier encore davantage les sonorités développées ici.
 
Après une courte et minimaliste introduction enchaîne immédiatement une des pièces les plus marquantes et réussies de l’album, «In The Blood», où se reconnaissent aisément les influences du groupe. Comme la plupart des autres morceaux mémorables («Sing, You Sinners», «Didn’t I Furious», «Nothing Hurts Machine»), «In The Blood» nous offre un son combinant la distorsion de la guitare de Richard Pike, tout en laissant de la place au psychédélisme des séquences et synthétiseurs de son frère Laurence, le tout sur un fond de batterie simple mais lourd, gracieuseté de Dave Miller. Enfin, le trio australien devrait réussir à vous convaincre avec O Soundtrack My Heart, grâce à sa richesse et à sa diversité, qui en offre autant à l’amateur de musique expérimentale qu’aux mélomanes moins audacieux.  

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Kids Eat Crayons, formation montréalaise, offre sur ce premier album un amalgame impressionnant de jazz et de métal, avec un ou deux vocalistes omniprésents mais talentueux, dans la veine de Mike Patton et de son légendaire groupe, Mr. Bungle. Les compositions originales, au bord de la schizophrénie, ne cessent de nous surprendre et de nous abasourdir par leur complexité et leur force d’attraction. Sept musiciens et deux chanteurs, voilà tout ce qu’il faut au groupe pour concocter des pièces aux structures changeant dramatiquement, tissées en partie de jazz suave et de métal chaotique et frénétique.
 
Si ce qui nous frappe d’abord est la justesse des vocaux de J. Phil Major, auxquels s’ajoutent des vocaux additionnels du batteur D.W. Lee et d’un autre chanteur, on est ensuite saisis de voir à quel point les musiciens sont aussi virtuoses que visionnaires. En dépit des changements brusques et d’un apparent chaos, les compositions écrites de main de maître vont toujours là où elles doivent aller et témoignent d’une science musicale qui ne laisse rien au hasard.
 
Tout ce qu’on pourrait déplorer de cette galette, c’est que la basse ne réussit jamais vraiment à ressortir du lot et que les compositions, malgré la variété et l’éclectisme de chacune d’entre elles, finissent par se ressembler. Malgré tout, ce disque aux sonorités définitivement années 1990 – dans le bon sens du terme –, saura plaire aux fans de jazz autant qu’aux fans de métal qui cherchent comment élargir leurs horizons musicaux. Obnubilant et déroutant.

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Enfin lancé vendredi dernier à la galerie Morgan Bridge, le split Écoutez Po La Vitre des beatmakers talenteux que sont Snowflake, A.K.A. Millimetrik A.K.A. Pascal Asselin, et Maxime Robin, en offre beaucoup aux mélomanes nostalgiques des belles années du hip hop. D’abord, on a six pièces concoctées par Snowflake, deux faisant l’objet d’intéressantes collaborations avec Mashup Potatoes et Slipmat. Préparées avec une certaine naïveté et une nostalgie des années 1990, elles témoignent d’une ferveur juvénile. Par exemple, certains samples sont employés avec un peu trop d’enthousiasme. Ainsi, quand la Face A se termine, on se trouve assez accroché tout en restant partiellement sur notre appétit, vu le léger manque de profondeur des beats et la courte durée de cette première moitié. 
 
Lorsqu’on retourne la somptueuse galette, on a d’abord une impression de continuité, grâce à la modeste introduction de Maxime Robin qui s’appuie elle aussi fortement sur un sample invoqué à répétition. Ensuite, on tombe rapidement dans le vif du sujet pour constater que le trifluvien d’origine n’a rien perdu de son impeccable sensibilité musicale. Les pièces s’enchaînent mieux ici, conférant à l’ensemble une impression de live mix. On constate que Maxime Robin nous offre un hip hop instrumental davantage mûri et on aurait aimé voir la Face B prolongée.
 
On peut donc dire que l’album est trop court et que Pascal Asselin est davantage à l’aise dans la peau de Millimetrik que dans celle de Snowflake, alors que Maxime Robin est ici en terrain bien connu. Toutefois, il est indéniable que leur expertise est mise à profit dans cet effort conjoint.

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Le premier opus solo de Tom Fec, porte étendard de Black Moth Super Rainbow, est rafraîchissant, malgré le fait qu’il s’inscrive en continuité avec des sonorités développées ces dernières années. La recette est bien simple : prenez des lecteurs cassettes, des vieux synthétiseurs, des machines à bidouiller le son et autres technologies rétrogrades ; utilisez ensuite les samples bien trafiqués et «post-processés» afin de faire ressortir le grain et le bruit des mélodies synthétiques ; posez enfin ces sons sur une rythmique définitivement hip hop et vous aurez produit quelque chose d’analogue à Fucked Up Friends.

Les pièces les plus mémorables sont dispersées un peu partout sur la galette et ce, dès l’ouverture, avec la pièce «Street Trash», une des plus efficaces de l’album avec la tardive «Gross Magik» et «Little Pink Riding Hood». Les morceaux plus estompés sont bien intercalés entre les morceaux plus mouvementés, qui rappellent certaines sonorités développées par Justice par exemple, mais avec plus de cachet et de chaleur.

La collaboration avec un rappeur, déterminante pour un album de hip hop instrumental, est judicieusement choisie en la personne d’Aesop Rock, sur la pièce «Dirt».

Enfin, la seule chose qu’on puisse reprocher à l’album est de manquer un peu de constance, mais le contrepoids de cette accusation nous force à reconnaître son éclectisme et sa diversité.

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This Is It and I Am It and You Are It and So Is That and He Is It and She Is It and It Is It and That Is That. Si le fait de prononcer le nom du dernier album de Marnie Stern vous donne du fil à retordre, vous n’avez rien vu encore. Le jeu de la jeune guitariste (ici accompagnée encore une fois par Zach Hill, membre de Hella, qui signe la production de ce second opus) est d’une telle ardeur technique que même son écoute pourrait vous rendre la vie dure. Toutefois, l’attention et l’effort requis pour y parvenir ne sont pas sans quelques gratifications: on trouve sur cet album des riffs complètement ahurissants, enchaînés à une vitesse vertigineuse pour le plus grand plaisir des mélomanes exigeant plus de technique dans leur musique. Contrairement à son premier album, la mélodie n’écope plus tellement ici, car l’époustouflant duo parvient tout de même à créer des envolées accrocheuses.
 
Extrêmement nerveuse, saccadée, rapide, alerte, voire étourdissante, la guitare qu’on entend sur les pièces est accompagnée d’une performance hors pair à la batterie, placée en parfaite conjonction avec la moindre note présente, grâce aux spasmes calculés de Zach Hill. Si le vocal de la Marnie Stern nous laisse parfois pantois, car il lui arrive d’être nasillard ou dissonant, ce n’est pas ce qui attire généralement notre attention. Ce qui est ici à l’œuvre est un peu analogue, mais les histoires du légendaire bassiste sont remplacées par des textes répétitifs et presque mystiques, souvent chantés sur le même ton que les notes jouées en arrière plan par le tapping frénétique de la guitariste. Les paroles philosophiques et mystiques tentent d’inciter les gens à prendre en main leur existence ou à simplement réfléchir, comme sur «Transformer» :  «The future is yourself/ Fill this part in».

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Le pianiste et artiste électronique new yorkais Leo Tardin, sous le pseudonyme de Grand Pianoramax, a collaboré notamment avec trois batteurs et trois MCs différents pour produire The biggest piano in town, un remarquable second opus qui vient encore redéfinir le genre. L’album donne droit ici à un mélange inusité et éclectique de jazz, d’électro, de breakbeat et enfin, de rap, grâce, entre autres, au passage de Mike Ladd et de ses paroles empreintes d’humour sur la pièce d’ouverture, «The Showdown». Plusieurs des pièces instrumentales confectionnées autour du jeu de Tardin, comme «Ride I : The Race», viennent s’intercaler très efficacement entre celles où l’on retrouve du rap ou du spoken word, comme la pièce «Blue Gol» où figure Invincible, une rappeuse dont la voix n’est pas sans rappeler celle de Jean Grae, fidèle collaboratrice de la formation The Herbaliser.

Le rythme ahurissant et fort digne d’intérêt des premières pièces s’estompe après «Ride II : Driftin’». On se retrouve alors à dériver pacifiquement au son des dernières pièces en éprouvant une certaine nostalgie à l’égard des premières. Malgré tout, The Biggest Piano In Town est un album polyvalent qui se prête autant à l’écoute active qu’à la musique de fond ; il est aussi apte à vous faire danser qu’à vous faire penser.

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La seconde parution de Bad Dudes, les vilains garnements de la musique qui vous conseillent ouvertement de manger des drogues, a le potentiel de rejoindre un fort public. On retrouve sur Eat Drugs un son oscillant du côté de l’électro-pop «post-processé» et léché à la Ratatat, comme sur le morceau «Better Than Nature». On perçoit tantôt un côté noise-pop à la manière des sympathiques Chinese Stars, récemment passés dans notre ville, tantôt un penchant vers des sonorités et des structures typiquement progressives, ou néo-prog, comme ce que Crime In Choir a l’habitude de faire. Mais en fait, Bad Dudes ont bien résumé leur approche musicale multipolaire par une appellation représentative de l’album : ils font ce qu’ils appellent du party prog.
Ainsi, le son est toujours accrocheur. Les mélodies sont, quant à elles, généralement simples, incluant bien souvent des références sonores au 8-bit et quelques incursions en territoire décidément plus loud. Enfin, les chansons que l’on retrouve sur l’album sont à écouter et à réécouter, car elles sauront combler vos attentes si vous cherchez de la musique dynamique et comique, tout à fait propice pour faire lever vos partys. À découvrir !

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Voici un album plus que convaincant de la part de l’ex-Kobayashi Franco Proietti, saxophoniste alto, flûtiste et leader de la nouvelle formation The Franco Proietti Morph-Tet. Accompagné de son Morph-Tet, il nous présente un opus alliant des sonorités dark jazz avec des moments plus trip-hop, des cuivres tonitruants et des basses vibrantes, des vocaux aussi originaux que rares et une panoplie d’instruments venant compléter chacune des ambiances diverses de l’album.
 
On retrouve d’ailleurs un MC sur quelques unes des pièces, Omari Newton, ainsi qu’un DJ, Andrew Kushinr, responsable des scratchs et des séquences électroniques pré-enregistrées, qui contribuent à donner à l’album un son définitivement nu-jazz. Enfin, une solide section rythmique, composée du batteur Fernando Gelso et du bassiste JF Martins, ainsi qu’un autre saxophoniste alto et une saxophoniste baryton également flûtiste, Averil Parker et Melissa Pipe respectivement, viennent compléter la liste des musiciens figurant sur cet album éclectique et rafraîchissant comportant un son décidément cinématique. Les compositions qui nous y sont proposées sont tout à fait accessibles sans tomber dans le commercial, grâce notamment à des expérimentations inusitées et à une fusion des styles plutôt originale.
 
Les deux premières chansons de l’album «Lucky 13» et «Bushido», ainsi que la dernière pièce, «DT», sont de loin les plus mémorables. D’ailleurs, la seule chose qu’on peut reprocher à l’album est de manquer de constance sur certains morceaux, mais cela contribue généreusement à sa diversité bien appréciée.
 
À écouter si vous aimez Kobayashi, Loka, Portishead, JMC Project ou Bobby Previte & The New Bump. Un pur délice et une qualité exemplaire de jazz canadien.

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Pour son dixième album complet (incluant deux trames sonores et mise à part la pléthore de EPs et de singles publiés), Mogwai, quintet de Glascow, en Écosse, poursuit bien la lancée «piano-centrique» surtout amorcée avec l’album précédent, Mr. Beast. Ici, les créations sont encore une fois bien ficelées, témoignant d’une longue et prolifique carrière de la formation, mais nous laissent parfois sur notre appétit.
 
D’abord, on est frappé que le fil conducteur soit aussi ténu, Mogwai nous présentant en alternance des pièces extrêmement mélancoliques et tranquilles et des pièces d’une rare lourdeur dans leur catalogue, comme «Batcat». C’est principalement avec le premier extrait, «The Sun Smells Too Loud», que la formation étonne le plus : on y retrouve un riff empreint de légèreté, accrocheur et tendance, rappelant davantage le indie rock que le rock atmosphérique ou post-rock, étiquette qui leur est généralement accolée, bon gré mal gré. Tout en faisant preuve de l’excellence qu’on leur connaît et qui leur a valu de devenir un des groupes emblématiques de cette récente tradition musicale, avec comme contre partie la formation montréalaise Godpeed You Black Emperor! qui a quant à elle davantage influencé les groupes de post-rock orchestral. Le son en vigueur ici illustre un difficile équilibre entre conservatisme et innovation, et ce déséquilibre coûte un peu au rythme de l’album.
 
Malgré ces critiques davantage négatives, il ne faut pas se méprendre : Mogwai n’a rien perdu de sa capacité à écrire des chansons pouvant nous émouvoir, d’une rare beauté dans l’industrie musicale. En confectionnant une aussi belle musique, la formation nous montre qu’elle se trouve encore au sommet de son art. Malgré que cette parution est de loin inférieure à My father my king, leur production la plus réussie à ce jour, on regrette les vieux jours de la formation tout en appréciant à chaque fois leurs nouvelles créations. 

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Kinsman est avant tout un album envoûtant du début à la fin, constitué de compositions savamment ficelées selon une fusion des styles tout à fait inusitée et réussie, entre des sonorités indo-orientales et jazz. Le procédé est bien simple : prenez deux maîtres du saxophone alto, ajoutez à cela un ensemble de musique traditionnelle indienne pour assurer la trame sonore derrière les prouesses et dialogues saxophoniques de ces deux maîtres, et vous aurez une petite idée de ce à quoi vous pouvez vous attendre.
 
Le projet se veut surtout une symbiose complète, contrairement à un simple alliage: la fusion est si totale que les deux genres amalgamés semblent davantage commensaux que rapiécés tant le son qui en résulte est organique. Mais c’est surtout sur les pièces mouvementées comme «Snake!» ou «Ganesha» que le résultat est le plus convaincant. Les arrangements de multiples cuivres rappellent Masada Volume 3 : Gimel de John Zorn et Dave Douglas, grâce aux saxophones des deux principaux collaborateurs de ce projet, dont le jeu est aussi fidèle à ses influences que celui des instruments et percussions utilisés traditionnellement dans la musique indienne.
 
Le résultat est unique et enivrant, que ce soit dans les moments plus estompés ou exaltés, et il incarne une des plus belles découvertes parmi les récentes parutions de jazz moderne.

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Mad Gregs, quatuor originaire de Los Angeles, constitué des membres de Mae Shi, offre avec son premier opus, Big Nun, un petit album d’une douceur délectable et d’un charme ineffable. On peut caractériser grossièrement le groupe par ses sonorités folks, grâce au pincement de cordes de leurs instruments acoustiques. On constate qu’un son assez inusité pour ce type de formation est presque omniprésent dans leurs compositions : celui de la clarinette basse, instrument peu populaire chez les groupes pops, mais dont le son est accueilli ici comme un vent de fraîcheur. Ajoutez à cela de nombreuses et belles harmonies vocales, des sons inusités, un bon dosage de moments plus mélancoliques ou alors plus rythmés, aussi festifs qu’une petite fanfare (analogue à certaines sonorités développées par Man Man ou Torngat, ou comme à la fin du Dead Flag Blues de Godspeed You! Black Emperor), et vous aurez un portrait rapide de cette petite galette.

L’ambiance sonore y est légère et sympathique, parfois quelque peu ennuyeuse mais généralement bien ensoleillée. La musique s’estompe parfois pour faire ressortir les harmonies vocales et, lorsque celles-ci cessent, la petite fanfare reprend et la clarinette basse vient compléter et feutrer le son du groupe pour lui donner une finition assez innovatrice sur fond de beat presque dansant. Cet album fort prometteur en ce qui concerne la suite des choses pour Mad Gregs saura plaire à tous, mais se prête mieux aux soirées de discussions posées qu’aux fêtes bien arrosées, contrairement à ce que propose Mae Shi.

Enfin, il s’agit d’une remarquable et unique incursion dans la musique pop de chambre de la part de cette formation dont on n’a probablement pas fini d’entendre parler. Un incontournable pour tous ceux qui aiment un peu de variété et d’innovation dans leur indie.

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La plus récente parution de Flying Lotus, beatmaker américain originaire de Los Angeles, qui a d’ailleurs donné son nom à ladite parution, marque un nouveau départ. D’abord, les sonorités qui y sont développées s’éloignent progressivement de ce qu’on avait pu entendre sur l’album et le EP parus plus tôt au cours de sa carrière. FlyLo offre ici un son plus intime, plus personnel et plus cohérent du début à la fin.
«Brainfeeder» et «Breathe.something/Stellar star», premiers morceaux de l’album, mettent tout de suite cartes sur table. On y découvre l’ambiance et les sonorités qui accompagneront tout au long de cette épique création. Des sons de distorsions, des sons organiques, des synthés presque new age par moments, un rythme hypnotique qui s’installe tranquillement. C’est surtout avec «Beginner’s Falafel» que le son prend son envol et que le rythme triomphe. Plus mystérieux et plus psychédélique, mais aussi plus accrocheur, le morceau offre des moments magiques avant le retour au calme de la pièce suivante, «Camel», quant à elle constituée avec des samples de cordes plus soul, estompés jusqu’à la finale plutôt intense. S’ensuivent «Melt!» et «Comet Course», deux morceaux hypnotiques, rythmés et organiques, au sein desquels on voit apparaître des tambours et des tamtams, avant de retrouver un son définitivement plus hip hop. Après une intermission et des morceaux moins marquants, plus ambiants et plus électroniques, on voit poindre deux autres chansons bien accrocheuses, «GNG BNG» et «Parisian Goldfish» qui sauront faire bouger.

Un album envoûtant du début à la fin, une trame sonore merveilleuse pour de lentes balades en automobile dans des quartiers sombres aux pavés mouillés ou pour des soupers dans des bistros top-tendance. Vous allez à coup sûr vous en délecter.
 

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At Mount Zoomer, la nouvelle parution sur Sub Pop Records pour le quintet montréalais formé autour de Dan Boeckner et Spencer Krug, en offre beaucoup aux fans. D’abord, la grande majorité des pièces sont bonnes, voire mémorables, et l’album jouit d’une constance accrue par rapport à l’inégal, quoique excellent, prédécesseur, Apologies To The Queen Mary. Ensuite, même si les deux chansons les plus remarquables de leur répertoire figurent sur le précédent opus, At Mount Zoomer offre aux auditeurs un son raffiné sans être déroutant, d’une simplicité désarmante et d’un charme inépuisable.

Des mélodies simples, des synthétiseurs accrocheurs et 80’s, des petits riffs simples et efficaces, une sonorité qui rappelle certains succès de David Bowie ou d’autres artistes cultes de cette décennie maudite. Toutefois, la constance et la simplicité des compositions pourront donner l’impression de redondance à certains auditeurs, mais permettront à d’autres de les dévorer des oreilles. À chaque fois qu’on croit voir poindre la monotonie à l’horizon, un nouveau riff, un nouveau beat et une nouvelle mélodie, toujours mémorables, apparaissent pour reconquérir les auditeurs. ??

Parmi les titres marquants, on retrouve d’abord les trois premières chansons, «Soldier’s Grin», «Call it a Ritual» et «Language City», qui nous mettent tout de suite dans le bain quant aux sonorités, aux synthétiseurs et aux riffs d’une effarante efficacité. Ensuite, «Grey Estates» et «Fine Young Cannibals» sont remarquables pour la petite joie qui en émane, avec des riffs plus lumineux. Notons aussi «An Animal In Your Care» qui, après un début pas si convaincant, construit quelque chose pour nous faire apprécier la chanson, à travers ses divers mouvements.

Enfin, l’épique conclusion de l’album, la chanson «Kissing the Beehive», propose aux auditeurs près de onze minutes de musique originale, bien composée, accrocheuse et un tantinet plus prog que ce à quoi Wolf Parade nous a habitués. Plusieurs sections de la chanson s’enchaînent avec de superbes transitions et des vocaux qui partent et reviennent sans crier gare, mais sans non plus laisser pantois. ??Une des plus belles parutions de l’été, un des meilleurs albums du genre indie-rock-alternatif, assez intéressant pour vous faire retomber amoureux avec un genre qui semblait stagner, ou tout simplement vous convaincre de devenir un de ses fans vendus. 
 

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 On y entre comme dans une alcôve empreinte de mélancolie. On se laisse bercer et blesser, on se laisse piéger par une poésie lunaire et fataliste. On a le mal de l’espace, la claustrophobie du temps présent. Parce que The Devil, You + Me n’est pas une question de périmètre, mais bien d’intrusion intimiste au cœur de notre univers spatio-temporel.

Ce septième album démontre avec éloquence la maturité du trio allemand The Notwist, avec une maîtrise saisissante de l’émotion pour la paraphraser en arrangement électro-acoustique. Toujours cette économie de mots, un langage universel qui appelle à la métaphore plutôt qu’au factuel. Tout est si fluide, au point où l’on sent rapidement s’immiscer une proximité étonnante avec la voix monocorde du chanteur, chargée d’apesanteur.

L’électronique est employé surtout à tisser les ambiances obscures en écho au propos, parfois à donner le pouls aux pièces.
Mis à part la déroutante et non moins excellente «Alphabet», The Devil, You + Me n’est pas avant-gardiste, ni-même original par rapport au désormais classique Neon Golden, paru en 2002.

Avec une production fignolée et une approche davantage linéaire, The Notwist signe un autre opus impeccable, honnête et c’est tout ce qui importe pour réaliser un grand album.

 

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